Vincent de Soignies

saint belge
Vincent de Soignies
Buste de saint Vincent de Soignies,
bois polychrome XVIIe-XVIIIe siècle.
Musée du chapitre, Soignies.
Titre de noblesse
Comte
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Madelgarius de Famars de Hainaut
Surnom
Vincent en religion
Nationalité
Franc
Activités
Conjoint
Enfants
Autres informations
Ordre religieux
Étape de canonisation
Fête

Saint Vincent de Soignies, né Madelgaire de Famars de Hainaut vers 607 au château de Sotteville à Strépy dans le comté de Hainaut et mort le [1] à Soignies, était le fils de Mauger et Onuguerra[2],[3] et mari de sainte Waudru. Il se retira du monde vers 643 et fonda l'abbaye de Hautmont dont il devint l'abbé sous le nom de Vincent. Autour de son ermitage se développa une agglomération qui devint la ville de Soignies, dont il est considéré comme le fondateur. Liturgiquement, saint Vincent est commémoré le .

Il ne doit pas être confondu avec Madalgaire ou Madelgaire (Madalgarius), évêque de Laon en 682.

Éléments biographiques modifier

 
Lieu de naissance de Madelgaire à Strépy (ferme Sotteville).

Le plus ancien texte hagiographique (Opera hagiographica) connu à propos de saint Vincent, la Vita Vincentii Madelgarii Sonegiensis (uita prima), est assez tardif par rapport à sa mort en 677 puisqu'il date des environs de l'an 1020. Le texte hagiographique de sa belle-sœur, Aldegonde de Maubeuge, la Vita Aldegundis Malbodiensis (uita prima), plus ancien car du début du VIIIe siècle, permet de comparer les éléments rapportés à propos de Vincent dans les deux ouvrages.

Saint-Vincent, né sous le nom de Madelgaire de Famars de Hainaut, est le fondateur de la ville qui allait devenir Soignies. Il était le fils de Mauger et d'Onugerra (Omigère). Issu de l'aristocratie franque, il est né vers l'an 607 au château de Sotteville à Strépy et est décédé à Soignies, le . Mauger, son père, était l'un des leudes les plus puissants du royaume d'Austrasie[4].

Madelgaire fréquentait la cour de Dagobert Ier, puis de Sigebert III et accomplit différentes missions en Irlande[5] dont il revint avec de fervents évangélistes : Feuillien, Ultan, Fursy, Eloquius, Adalgis et Elton.

Madelgaire épousa Waudru ou Waldetrude de Lommois qui était la fille de Walbert, le gouverneur du Hainaut, et de Bertille (ou Berthilde) de Thuringe. Waudru et Vincent eurent quatre enfants : Landry, évêque de Meaux[6],[7] qui succéda à son père à la tête des monastères d'Hautmont et de Soignies, Dentelin (probablement décédé à l'âge de sept ans), Aldetrude qui succéda à Aldegonde (sa tante) comme Abbesse du couvent de Maubeuge et Madelberte qui succéda à sa sœur à cette charge.

Madelgaire et, à sa suite, Waudru décidèrent de se retirer du monde et entrer en vie religieuse. Madelgaire fonda un monastère à Hautmont qui devint l'abbaye bénédictine d'Hautmont. « Vincent » est son nom de moine en raison de sa victoire sur le « siècle » disent les textes anciens. Encore trop sollicité à Hautmont, il quitta le monastère avec quelques disciples vers un ermitage plus isolé encore. Ce dernier deviendra Soignies où il vécut jusqu'à sa mort (677). Aujourd'hui encore, ses reliques y sont vénérées en tant que saint patron fondateur de la ville.

Repères chronologiques modifier

 
Statue de Vincent de Soignies à Hautmont.

Les éléments repris ci-dessous sont issus, sauf mention contraire, des travaux des Bollandistes[8].

  • 607 : Naissance de Madelgarius de Famars à Strépy (cf. discussion sur son origine irlandaise)
  • 636 : Mariage avec Waldetrude de Lommois, (sainte Waudru). Madelgaire a alors 29 ans tandis que Waudru est âgée de 24 ans selon Jacques Simon[2], de 14 ans selon les Bollandistes.
  • 637: Naissance de son fils, Landry.
  • 643: Madelgaire fait bâtir le monastère bénédictin d'Haumont.
  • 646: Au décès de Walbert, Sigebert III confie la gouvernance du Hainaut au comte Madelgaire. Ce dernier accepte la charge, il l'assurera pendant dix années. (cf. discussion sur le titre de comte de Hainaut).
  • 656: Madelgaire prend la tonsure et entre à l'Abbaye d'Haumont sous le nom de Vincent. Il a alors 49 ans.
  • 670: Vincent se retire en ermitage, autour duquel se forme un monastère qui sera le berceau de la ville de Soignies.
  • 676: Landry, jusqu'alors évêque régionnaire, accepte la charge de père abbé du monastère de Soignies.
  • 677: Selon la tradition, c'est le que meurt Vincent.

Madelgaire était-il comte de Hainaut ? modifier

Madelgaire, selon Jacques de Guyse (XIVe siècle), fut le premier Comte de Hainaut[9]. À sa suite, son fils Saint-Landry aurait renoncé à la couronne comtale[10].

Historiquement, la lignée héréditaire des Comtes de Hainaut débute cependant avec Régnier Ier de Hainaut dit Régnier au long col en 880. La charge de gouverneur du Hainaut existait cependant au VIIe siècle. Elle fut notamment endossée par Saint Walbert, père de Waudru de Mons.

Alban Butler, plus prudent que de Guyse, avance que Madelgaire était Comte en Hainaut[11]. Il semble en effet que Madelgaire ait été élevé à la dignité de Comte et, par ailleurs, qu'il assura, au décès de Walbert, la gouvernance du Hainaut de 646 à 656. Il était donc probablement Comte-gouverneur du Hainaut.

Régnier au long col considérait probablement Madelgaire comme étant le premier Comte de Hainaut si l'on en juge par la dévotion dont il fit preuve à l'égard des reliques du Saint (cf. article sur Soignies). En 1397, le comte de Hainaut, Albert Ier de Hainaut, mentionne dans une charte qu'il est issu de Saint-Vincent de Soignies, Comte de Hainaut[12].

Mentionnons enfin que les armes primitives du Hainaut (d'or à trois chevrons de sable) sont celles de la famille de Walbert de Lommois, ce qui plaide également pour qu'un lien entre l'historique de mise en place de la couronne comtale du Hainaut et Madelgaire soit établi.

Contribution irlandaise modifier

Selon la tradition irlandaise rapportée par le chanoine et historien irlandais John O'Hanlon, Madelgaire serait d'origine irlandaise, et s'appelait Maelceadar (Mael Ceadar). Arrivé en France, ses qualités de guerrier aurait été reconnues et, en remerciement des services rendus (Dagobert Ier lui avait confié une mission en Irlande), la couronne comtale du Hainaut lui aurait été remise[13]. L'hagiographe irlandais John Colgan (XVIIe siècle) plaça Sainte Aldetrude au rang des saints irlandais en raison de son sang irlandais lui venant de son père[13]. Maelceadar est également fêté le [14].

Études contemporaines modifier

En 2002, Stefanie Hamann et Hermann Moisl (en) publient un article tendant à montrer que les sources irlandaises et franques semblent corroborer une présence de Madelgaire, envoyé par Dagobert Ier, à la bataille de Magh Rath à l'été 637. Madelgaire et Waudru se seraient installés en Irlande où leurs quatre enfants seraient nés[15].

Liste des avoués de saint-Vincent modifier

 
Châsse de saint Vincent (procession à Soignies en 2007).

Les reliques de Saint-Vincent furent très tôt l'objet de vénérations. Nombre de descendants du Saint vinrent en effet prêter serment sur son tombeau. Les Comtes de Hainaut, la famille de Bourgogne, la maison d'Autriche avaient pour coutume de prêter le serment d'honneur sur les reliques de saint-Vincent ce qui en faisait des avoués de saint-Vincent.

Le Tour Saint Vincent modifier

 
Carte Ferraris, vers 1775.

Chaque année, le lundi de la Pentecôte, les Sonégiens (habitants de Soignies) se réunissent tôt le matin pour « le grand tour » durant lequel ils « processionnent » la châsse de Saint-Vincent autour de la cité (11,2 km). Cette tradition fut mentionnée pour la première fois en 1262 (acte officiel du par l'évêque de Cambrai Nicolas III de Fontaine[18]) mais il est probable que la coutume lui soit antérieure de quelques années.

À six heures du matin, après la « descente » de la châsse et une messe solennelle, le cortège s'élance. Il sera accompagné par les tambours jusqu'aux portes de la ville (Cense del'Baille) d'où le Grand Tour démarrera véritablement. Un homme de fer, à cheval, accompagne le pèlerinage, il veille sur la châsse du Saint-Patron. Les confrères de la confrérie Saint-Vincent, se relaient pour porter la pesante châsse. De proche en proche, le cortège s'arrête aux différentes chapelles que compte le parcours. La foule entonne des Sante vincenti, ora pro nobis, le panégyrique de Vincent est fait à la chapelle du Marais Tilleriau lors d'une halte plus importante.

 
Sur tes chemins Vincent.

Une messe sera célébrée à l'église des Carrières. Avant de se remettre en route et de rallier la Cense del'Baille d'où démarrera la procession historique à 11 h. Cette procession est de tradition plus récente[19]. Elle est constituée de différents tableaux vivants retraçant la vie du Saint et est clôturée par la châsse de Saint-Vincent et son gardien fidèle: l'Homme de fer. Les festivités se clôturent par la « remontée » de la châsse en la collégiale Saint-Vincent qui reprend sa place dans la chapelle supérieure aménagée en 1720 au-dessus de l'autel du Chœur[20].

À droite, une carte établie selon la carte Ferraris (XVIIIe siècle) et reprenant l'itinéraire du grand tour tel qu'il existait à cette époque. Le trajet actuel n'a que peu varié. Les modifications sont dues à l'urbanisation de la ville (chemin de fer, zoning industriel)[19].

Vincent est célébré le .

Inauguration de la chapelle du 750e modifier

Le , à l'occasion du Grand Tour, les sonégiens ont fêté le 750e anniversaire de la première mention connue du tour Saint Vincent. Dans un courrier daté du , Nicolas III de Fontaines, évêque de Cambrai accorde aux pèlerins accomplissant le Grand Tour quarante jours d'indulgence. 750 ans plus tard, Monseigneur Garnier, Archevêque de Cambrai a consacré la chapelle du 750e située à la croisée du chemin de la Berlière et du chemin du Perlonjour à Soignies. Elle constitue désormais la dixième chapelle jalonnant le Tour[21],[22],[23],[24].

Références à saint Vincent modifier

Armoiries modifier

 
Armoiries de la ville de Soignies et des anciennes communes de Chaussée-Notre-Dame-Louvignies, de Mesvin et de Nimy
Blasonnement :
Écu : Parti, de sinople à la croix d'argent et d'or à trois chevrons de sable.
  • Arrêté royal :
  • Le premier parti est celui que la tradition attribue à l'écu de saint Vincent et le deuxième parti est l'écu de son épouse sainte Waudru



 
Armoiries de la commune d'Evere
Blasonnement :
Écu : Parti, au premier d'or au faucon au naturel, contourné, posé sur un rocher de trois coupeaux de gueules, mouvant de la pointe et surmonté d'une étoile à six rais du même ; au second de gueules au faucon au naturel posé sur un rocher de trois coupeaux d'or, mouvant de la pointe et surmonté d'une étoile à six rais du même.
Tenant : Écu tenu de la senestre par un saint Vincent auréolé assis tenant de la dextre un sceptre de lyses, le tout d'argent.



Drapeaux modifier

Les drapeaux de la ville de Soignies ainsi que des communes d'Evere et de Schaerbeek (qui relevaient toutes deux de l'abbaye puis du chapitre de Soignies) sont de vert et de blanc.

Édifices religieux modifier

Notes et références modifier

  1. a et b Maur-François Dantine, Ursin Durand, Charles Clémencet (dom), François Clément (dom. - "L'art de vérifier les dates des faits historiques, des chartes, des chroniques, et autres anciens monumens, depuis la naissance de Notre-Seigneur: par le moyen d'une table chronologique", Chez G. Desprez, 1770 - 934 pages - consultable ici.
  2. a et b Jacques, Simon, Le Portrait de l'état de mariage et de continence fait sur la vie de la très-illustre Sainte Waudru, Comtesse de Hainaut, Hoyois, 1627, reimprimatur 1846.
  3. Jacques simon explique que la mention relative aux parents de Madelgaire provient d'un vieux manuscrit conservé à Haumont mais sans citer lequel.
  4. Chanoine Paul Scarmure, Collégiale Saint-Vincent, Fédération du tourisme de la province du Hainaut, Mons, réédition 1962.
  5. « Hibernica tellus » désigne l'Irlande et non l'Ibérie comme traduit erronément in Vinchant, Annales de la province et comté du Hainaut, p. 33.
  6. Jean-Baptiste Dufau, dans son ouvrage intitulé Hagiographie Belge, T. 1, Ed. Ajamar explique que c'est à Guillaume Gazet (in L'histoire ecclésiastique du Pays-Bas contenant l'ordre et suite de tous les euesques et archeuesques de chacun diocese, auec vn riche recueil de leurs faicts plus illustres, ensemble vn catalogue des saincts, qui y sont spécialement honnorez; les fondati, Vervliet, 1614") et à la suite d'une erreur de traduction que nous devons de penser que Landry aurait pu être évêque de Metz. "tous les auteurs qui ont écrit en latin disent : meldensis episcopus, or Metz se dit en latin Metæ, metarum. L'adjectif qui en dérive est Metensis.
  7. On trouve également Metz, Grandmetz, Melsbroeck mais il est admis de manière unanime qu'il faille traduire Meldensis episcopus par évêque de Meaux.
  8. Bollandistes, Acta Sanctorum belgii.
  9. Jacques de Guyse, Histoire du Hainaut, t. 7, Paris, Bruxelles, 1829.
  10. Il faudra attendre le mariage d'Adélaïde de Bourgogne (née vers 900) avec Régnier II de Hainaut pour que la couronne comtale revienne à la lignée de Madelgaire.
    * Waudbert VII de Lommois (695-725), fils de Waudbert VI de Lommois et d'Adeltrude de Famars de Hainaut, il épousera Aldegonde de Bavière dont :
    * Waudbert VIII de Lommois qui épousera Richarde de Ponthieu dont :
    * Angilbert (le Saint) de Ponthieu (750-814) qui épousera Berthe de France (fille de Charlemagne) dont :
    * Hardouin de Ponthieu (né vers 800) qui épousera Richilde d'Amiens dont :
    * Beuves dit Bivin de Provence (822-877) qui épousera Richilde de Bourgogne dont :
    * Richard II le Justicier (856-921) qui épousera Adélaïde de Bourgogne (née circa 860) dont :
    * Adélaïde de Bourgogne qui épousera Régnier II, comte de Hainaut.
  11. Alban Butler et de l'Abbé Jean-François Godescard, La Vie des Saints, Lefort, 1855.
  12. Œuvres de Froissart. Chroniques. Tome 25 / [2] / publ. avec les variantes des divers ms. par M. le baron Kervyn de Lettenhove -Biblio (Osnabrück)-1867-1877.
  13. a et b Canon John O'Hanlon, Lives of the Irish Saints, vol. 9, 1873-1905.
  14. Martyrology dungallense, Calendarium sanctorum hibernae, Michael O'Clery, 1630 traduit du latin par John O'Donovan in Martyrology of Donegal: a calendar of the saints of Ireland, Dublin, 1864.
  15. Stefanie Hamann, Hermann Moisl “A Frankish aristocrat at the battle of Mag Roth”, in Michael Richter et Jean-Michel Picard (dir.), Ogma: essays in Celtic studies in honour of Próinséas Ní Chatháin, Dublin, Four Courts, 2002, p. 36-47.
  16. Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, Mémoires couronnés et autres mémoires, Volume 30, F. Hayez, 1880.
  17. Les Annales du Cercle archéologique du canton de Soignies, vol. XIX, p. 17.
  18. « Des traditions toujours vivantes », sur collegiale-soignies.be (consulté le ).
  19. a et b Gérard Bavay, Historique du Grand Tour, Soignies, , 87 p..
  20. comme l'atteste le chronogramme : « sonegIIs DIVo VInCentIo saCrUM ».
  21. La Nouvelle Gazette, 25 juin 2012.
  22. « Le Grand Tour fête ses 750 ans », La Libre Belgique,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  23. Bernadette Lennerts, « Soignies : Les 750 ans du Tour St-Vincent », sur info.catho.be, (version du sur Internet Archive).
  24. « Soignies: le soleil a béni le 750e Tour Saint-Vincent (Photos) », sur La Nouvelle Gazette, (consulté le ).

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Paul Bertrand, Le Moyen Age, t. CVII, Bruxelles, De Boeck Université, , 25 cm (ISBN 2-8041-3657-4, ISSN 0027-2841, OCLC 2131368, lire en ligne), « Études d'hagiographie hainuyère. L'exemple du "cycle de Maubeuge" : un état de la question », p. 537-546 (article téléchargeable en PDF).
  • Jacques Deveseleer & Monique Maillard-Luypaert (éd.), Saint Vincent de Soignies. Regards du XXe siècle sur sa vie et son culte. Recueil d'études publié à l'occasion du quatrième centenaire de la confrérie Saint-Vincent 1599-1999, Les Cahiers du Chapitre, Soignies, 1999.
  • Louis-Joseph Lalieu, Vie de saint Vincent Madelgaire et de sainte Waudru son épouse, princes et patrons du Hainaut, Decallonne-Liagre, Tournai / Zech & Cornet, Braine-le-Comte, 1886.
  • Léon van der Essen, Le siècle des Saints (625-739). Étude sur les origines de la Belgique chrétienne, La Renaissance du Livre, Bruxelles, 1942.
  • Gérard Bavay, « Historique du Grand Tour », Soignies, 1992, 87 p.

Articles connexes modifier

Liens externes modifier