Vincent Raymond

enlumineur français actif à Rome au XVe siècle

Vincent Raymond (appelé aussi Vincenzo Raimondi) est un enlumineur actif à Rome entre 1535 et 1557, né à une date inconnue à Lodève en Languedoc et mort à Rome le .

Vincent Raymond
Naissance
Date inconnueVoir et modifier les données sur Wikidata
LodèveVoir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Période d'activité
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Activité
Partenaire
Lieu de travail
Mécènes

Biographie modifier

 
Graduel de Charles Quint, Bibliothèque nationale d'Espagne, folio 1.

Vincent Raymond est un clerc originaire de Lodève dans le Languedoc ayant une activité d'enlumineur. Sa formation et sa vie en France sont en grande partie inconnue. Il semble être arrivé à Rome dès l'époque du pape Léon X (1513-1521). Il pourrait être arrivé en même temps que Guillaume Briçonnet ou son frère Denis, deux prélats envoyés en ambassade à Rome qui ont été par ailleurs chacun évêque de sa ville d'origine[1]. Il a été cependant avancé qu'il serait arrivé sur place dès le pontificat de Jules II (1503-1513)[2]. Il aurait pu appartenir alors à l'entourage de François Guillaume de Castelnau de Clermont-Lodève, cardinal ayant lui aussi assuré les fonctions d'ambassadeur du roi de France et lodévois d'origine[3].

Plusieurs documents permettent de retracer sa carrière à Rome. Il est le seul miniaturiste mentionné dans les archives papales entre le et le , réalisant plusieurs livres liturgiques pour la chapelle Sixtine notamment. En 1538, un document d'archive indique qu'il fait l'acquisition pour 250 écus d'or d'une maison avec jardin dans le Rione Rigola entre la via Giulia et le Tibre. C'est à cette époque qu'il entre au sein de la congrégation du Panthéon, la future Accademia di San Luca. En 1540, il reçoit 170 écus des administrateurs de l'église Saint-Jacques des Espagnols pour la décoration d'un graduel commandé par Charles Quint, aujourd'hui conservé à Madrid. Il connait, par ailleurs, des problèmes d'argent : il emprunte à son compatriote Rigal de Saint-Marsal la somme de 50 écus d'or en 1548. Le , un motu proprio de Paul III le désigne enfin comme miniaturiste attitré du pape, de la chapelle et de la sacristie pontificale, et ce, à vie. Il perçoit d'ailleurs la somme de 24 écus d'or à la mort de ce pape[4].

Il reçoit encore de son successeur Jules III un don de 20 écus d'or pour la décoration d'un petit livre de prières en 1550[5]. En 1554, les archives signalent sa collaboration avec Apollonio de' Bonfratelli - même si les deux artistes ont probablement commencé à travailler ensemble depuis au moins 1540. Ce dernier lui succède à la tête de l'atelier papal en 1556[3]. Il semble terminer sa vie en difficulté financière, laissant à sa mort le , 6 enfants en bas âge et sa veuve dans un certain dénuement. Philippe Néri doit venir en aide à cette dernière, alors qu'il est prêtre à l'église San Girolamo della Carità, voisine de son habitation et dont Raymondi avait été son pénitent[6].

Au cours de sa vie, il semble avoir connu une véritable reconnaissance de ses pairs. En effet, l'artiste portugais Francisco de Holanda, après un séjour à Rome, n'hésite pas à le classer, dès 1548, parmi les meilleurs miniaturistes de son temps, au milieu de Giulio Clovio, Attavante degli Attavanti et Simon Bening[7].

Style modifier

 
Psautier de Paul III : Dieu créant le monde, f.182v.

Pendant longtemps, son style a été défini d'après la première œuvre qui lui a été attribuée par son premier biographe, Léon Dorez, à savoir le psautier de Paul III aujourd'hui conservé à Paris. Il contient une grande miniature représentant Dieu le père directement inspiré de Michel-Ange et notamment du plafond de la chapelle Sixtine. Cependant, Jonathan Alexander a souligné le fait qu'un seul manuscrit lui est attribué formellement par les textes : il s'agit du graduel commandé par Charles Quint aujourd'hui à la Bibliothèque nationale d'Espagne. Selon lui, lorsque l'on compare les miniatures de ce graduel avec les décorations du psautier de Paul III, on reconnait la main de Raymond dans la plupart des miniatures et lettrines du psautier sauf justement dans la grande miniature de Dieu qui selon Alexander doit être attribuée à un peintre de grands formats, actif à Rome à cette époque et resté anonyme[8].

Le style de Vincent Raymond se caractérise par des décors de marge particulièrement originaux, expérimentant une nouvelle iconographie faite de trompes-l'œil, d'insectes, d'animaux, de poissons, de grotesques ainsi que de cadres en forme de cartouches. Outre l'inspiration tirée des œuvres de Matteo da Milano, son prédécesseur au poste de miniaturiste papal, au début de sa carrière, ses motifs décoratifs montrent des reprises de Giovanni da Udine ou de Perin del Vaga[9].

Œuvres modifier

Manuscrits modifier

 
Antiphonaire de la chapelle Sixtine, Capp.Sist.11 f1r.

Livres imprimés modifier

Miniatures découpées modifier

  • Montage de miniatures et décorations de marge d'un ou plusieurs livres liturgiques pour Léon X ou Clément VII, vers 1523, Morgan Library and Museum, M.1134[23]
  • Montage de miniatures (Naissance de saint Jean Baptiste et Martyre de saint Laurent) et décorations de marge d'un ou plusieurs livres liturgiques pour Léon X ou Clément VII, après 1523, musée national de la Renaissance, Ec.1849 et 1915[24]
  • Montage de miniatures (saint Côme et saint Damien) extraites d'un livre de chœur, Victoria and Albert Museum, E.4577-1910[25]
  • Miniature de la crucifixion, tirée d'un missel, 1545, Getty Center, Ms.85[26]
  • Montage de miniatures et décorations de marge d'un manuscrit liturgique pour Paul III, British Library, Add.35240[27]
  • Enluminures découpées d'un missel de Clément VII, BL, Add. 35254[28] et 21412[29]

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Léon Dorez, Psautier de Paul III : Reproduction des peintures et des initiales du manuscrit latin 8880 de la Bibliothèque Nationale, précédée d’un essai sur le peintre et le copiste du Psautier, Paris, Imprimerie Berthaud Frères, (lire en ligne)
  • (it) Nello Vian, « Disavventure e morte di Vincent Raymond, miniatore papale », La Bibliofilia, no 60,‎ , p. 356–60 (JSTOR 26206311)
  • (es) J. M. Llorens-Cistero, « Miniaturas de Vincent Raymond en los manuscritos musicales de la Capilla Sixtina », in Miscelánea en homenaje a Monseñor Higino Anglés,I , Barcelone, 1958-61, pp. 475-498
  • (it) M. Saffiotti Dale, « Raymond de Lodève, Vincent », dans Dizionario biografico dei miniatori italiani, Milan, 2004, p. 899-902.
  • (it) E. De Laurentiis, «Un francese dal papa : Vincent Raymond (prima parte) », Alumina, XIV, no 55, 2016, p. 18-29.
  • (it) Fabio Della Schiava, « Due inediti per il catalogo di Vincent Raymond de Lodève, miniatore papale », Miscellanea Bibliothecae Apostolicae Vaticanae, Città del Vaticano, vol. XVIII,‎ , p. 189-201 (lire en ligne)
  • (en) Jonathan J. G. Alexander, The Painted Book in Renaissance Italy 1450-1600, New Haven/London, Yale University Press, , 400 p. (ISBN 978-0-300-20398-1), p. 162-163

Articles connexes modifier

Liens externes modifier

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Notes et références modifier

  1. Francis Moreau, Vincent Raymond miniaturiste pontifical au XVIe siècle
  2. (es) Emilia Anna Talamo, Códices de la Capilla Sixtina. Manuscritos miniados en colecciones españolas. Edición del catálogo de la exposición a cargo de E. de Laurentis, Madrid 2010, pp. 1-21: 18.
  3. a et b Manuel Lalanne, « Nouvelles identifications concernant trois enluminures du livre d’Heures de Claude d’Urfé (Rome, 1549, Huntington Library, San Marino, HM 1102) », Les Cahiers de l’École du Louvre [Online], 6, 2015, [lire en ligne]
  4. Dorez 1909, p. 7-11
  5. Vian 1958, p. 358
  6. Vian 1958, p. 358-360
  7. Dorez 1909, p. 9-10
  8. Alexander 2016, p. 162
  9. Alexander 2016, p. 161-163
  10. Reproduction sur le site de la BAV
  11. Notice de la BNF
  12. (en) Maria Francesca P. Saffiotti, « "Disiecta Membra" from a Sistine Chapel Choir Book: MS Cappella Sistina 11 Illuminated by Vincent Raymond de Lodève », Music in Art, vol. 23, nos 1/2,‎ spring-fall 1998, pp. 33-47 (JSTOR 41561902)
  13. Reproduction du ms. sur le site de la BAV
  14. Elli Doulkaridou-Ramantani. « Enjeux de la décoration du missel du cardinal Juan Alvarez de Toledo ». ArtItalies, Association des historiens de l’art italien, 2017, 23, pp.93-108. [lire en ligne]
  15. Reproduction sur le site de la BAV
  16. Della Schiava 2011
  17. Notice de la bibliothèque Condé
  18. (en) Elena De Laurentiis, « Praeparatio ad missam pontificalem, Vincent Raymond di Lodève (illuminator) », in Beyond Words: Illuminated Manuscripts in Boston Collections (Houghton Library at Harvard University, McMullen Museum of Art at Boston College and Isabella Stewart Gardner Museum), 2016 [lire en ligne].
  19. Notice de la BNE
  20. Notice de la Bodleian
  21. Notice de la Bodleian
  22. (it) Emilia Anna Talamo, «  Un codice scritto da Federico Mario Perugino con una miniatura inedita di Vincent Raymond », Miscellanea Bibliothecae Apostolicae Vaticanae, vol. 433, no XIII,‎ (DOI 10.1400/227164)
  23. Notice de la Morgan
  24. Notice photo RMN
  25. Notice du V&AM
  26. Notice du Getty
  27. Notice de la BL
  28. Notice de la BL
  29. Notice de la BL