Utilisateur:William Henne/Brouillon

Photo (détail) prise par les membres du Sonderkomando en août 1944.

Alberto Errera modifier

Alberto Israel Errera, né le 15 janvier 1913 à Larissa et décédé en août 1944 à Birkenau, est un officier et résistant juif grec, membre du Sonderkommando d’Auschwitz-Birkenau [1] de mai à août 1944.

Biographie modifier

Alberto Errera est officier de l'armée grecque (marine). Il rejoint les partisans pendant l’occupation allemande en Grèce et prend le nom chrétien de Alex (Alekos) Michaelides. Il est arrêté par les Allemands, parmi 225 juifs, à Larissa la nuit du 24 au 25 mars 1944. Il est déporté le 2 avril depuis Athènes et arrive le 11 avril à Auschwitz. Il fait partie des 320 Grecs sélectionnés pour le travail (matricules allant de 182.440 à 182.759). Son matricule est le 182.552. Il est affecté comme “chauffeur” (c’est-à-dire, un membre du Sonderkommando affecté aux fours crématoires) au Krematorium V de Birkenau. Il prendra part à la préparation de l’insurrection [2] du Sonderkommando aux côtés, entre autres, de Yaacov Kaminski, Jankiel Handelsmann, Jukl Wrobel, Josef Warszawski, Wladek, Giuseppe Baruch et Zalmen Gradowski [3]. Grâce au témoignage d’Alter Fajnzylberg [4] [5], on sait que c’est Errera qui prendra les quatre fameuses photos du Sonderkommando [6]. Hormis les photos des déportés prises à l’entrée du camp à des fins de propagande par les SS Ernst Hoffmann et Bernhard Walter, il est strictement interdit de prendre des photos dans l’enceinte du camp, y compris pour les SS. En août 1944, Erich Kulka et Ota Kraus trouvent un petit appareil photo dans un landau, parmi les biens confisqués aux déportés et triés dans l’entrepôt du Kanada (l’entrepôt où sont triés ces biens). Les hommes du Sonderkommando ont intentionnellement endommagé le toit bitumé du Krematorium V. Dawid Szmulewski [7], qui fait partie du Kommando volant, chargé de le réparer et qui est membre de la résistance, a caché l’appareil photo dans une gamelle à double-fond. Une fois sur le toit, il le fait parvenir à Errera, posté contre le mur Nord sous la saillie du toit. Pendant que trois autres membres du Sonderkommando, Szlama Dragon, son frère et Alter Fajnzylberg, font le guet. Errera, depuis l’intérieur du bâtiment, fait deux photos des fosses d’incinération. Il dissimule l’appareil et contourne le bâtiment vers l’Est. Il prend, à la sauvette, deux photos dans le bois de bouleaux où les détenus se déshabillent avant d’être emmenés à la chambre à gaz. L’appareil est replacé au fond de la gamelle. Le bout de pellicule est extrait de l’appareil, ramené au camp central et sorti d’Auschwitz dans un tube de dentifrice où l’a caché Helena Dantón, employée à la cantine SS [8]. Il parviendra le 4 septembre 1944 à la résistance polonaise de Cracovie, accompagné d’une note écrite par deux détenus politiques, Józef Cyrankiewicz et Stanislaw Klodzinski. Errera enterrera l’appareil photo dans le sol du camp, de même qu’Alter Fajnzylberg enterrera des restes de Zyklon B dans une boîte en métal et des notes en Yiddish sur le nombre de personnes destinées au gazage.

Pendant longtemps, l’auteur de ces photos n’a pas été identifié, elles étaient créditées comme anonymes ou, par défaut, à Dawid Szmulewski, même si ce dernier mentionnait un certain Juif grec nommé Alex[9],[10].

Le 9 août [11], lors d’un transport de cendre du Krematorium, destinée à être déversée dans la Vistule, Errera tente de convaincre ses trois co-détenus (dont Hugo Baruch Venezia et Henri Nechama Capon) de s’échapper, mais ces derniers refusent. Une fois arrivé sur place, Errera assomme, à coup de pelle, les deux Schupos qui les accompagnent et plonge dans la Vistule. Il est rattrapé le lendemain ou le surlendemain, est torturé et abattu. Comme il est de coutume lorsqu’un évadé est rattrapé, son corps est exposé en exemple à la vue des autres détenus à l’entrée du camp.

Cette tentative d’évasion est rapportée dans leur écrits et témoignages par Errikos Sevillias [12], Schlomo Venezia [13], Leon Cohen [14], Marcel Nadjari [15], le Dr. Miklos Nyiszli [16], Alter Fajnzylberg [17] et Daniel Bennahmias [18].

  1. Cfr http://www.sonderkommando.info
  2. Cfr Filip Müller, Trois ans dans une chambre à gaz d’Auschwitz, p. 75.
  3. Cfr Zalmen Gradowski, Au cœur de l’enfer, Tallandier, 2009.
  4. Cfr Alter Fajnzylberg, Les cahiers d'Alter Fajnzylberg : ce que j'ai vu à Auschwitz, les Éditions des Rosiers, 2014.
  5. Cfr Alban Perrin, Ecrits au cœur de la catastrophe : http://www.akadem.org/sommaire/colloques/ecrire-la-destruction-du-monde-judeo-polonais-1945-1960-/ecrits-au-coeur-de-la-catastrophe-2-2-09-07-2014-60879_4534.php
  6. Sur ces photos, cfr le livre de Georges Didi-Huberman, Images malgré tout, Les Éditions de Minuit, 2003.
  7. Cfr le témoignage de Szmulewski in Jean-Claude Pressac, Technique and operation of the gas chambers, Beate Klarfeld Foundation, 1989. En ligne ici : http://www.holocaust-history.org/auschwitz/pressac/technique-and-operation/pressac0424.shtml
  8. Cfr Hermann Langbein, Hommes et femmes à Auschwitz, p. 253. Ainsi que Hermann Langbein, La Résistance dans les camps de concentration nationaux-socialistes : 1938-1945, Fayard, 1981.
  9. Cfr conférence de Philippe Mesnard, Bruxelles, 2013 : https://www.youtube.com/watch?v=4zEZk8-CUYw
  10. Sur le sujet aussi : Gary Spicer, The Sonderkommando photographs : http://www.academia.edu/2552802/THE_SONDERKOMMANDO_PHOTOGRAPHS
  11. D’après le registre du poste de police allemand à Auschwitz du 9 août 1944. Cfr conférence d’Igor Bartosik à Bruxelles, 2013 : https://www.youtube.com/watch?v=mx9QflSlCSE
  12. Cfr Errikos Sevillias, Athens-Auschwitz, Lycabettus Press, 1983.
  13. Cfr Shlomo Venezia & Béatrice Prasquier, Sonderkommando : dans l'enfer des chambres à gaz, Albin Michel, 2006.
  14. Cfr Leon Cohen, From Greece to Birkenau : the crematoria workers'uprising, Salonika Jewry Research Center, 1996.
  15. Cfr Marcel Nadjary, Χρονικό 1941–1945 [Chronicle], Ιδρυμα Ετσ - Αχα'ι'μ, Thessaloniki, 1991.
  16. Cfr Miklos Nyiszli, Médecin à Auschwitz, J’ai lu, 1971.
  17. Cfr Alter Fajnzylberg, Les cahiers d'Alter Fajnzylberg : ce que j'ai vu à Auschwitz, Éditions Rosiers, 2014.
  18. Cfr Rebecca Camhi-Frome, The Holocaust odyssey of Daniel Bennahmias, Sonderkommando, University of Alabama Press, 1993.