Trésor de Berthouville

trésor d'orfèvrerie gallo-romain
Trésor de Berthouville
Bassin côtelé.
Date
IIe siècle
Localisation
Coordonnées
Localisation sur la carte de Normandie
voir sur la carte de Normandie
Localisation sur la carte de l’Eure
voir sur la carte de l’Eure

Le trésor de Berthouville est un trésor archéologique découvert en 1830 par un laboureur sur le territoire de la commune de Berthouville, près de Bernay, en Normandie. Il comprend une centaine de pièces d'argenterie, dont certaines figurent parmi les chefs-d'œuvre de la toreutique antique. Il est actuellement conservé à Paris au Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de France.

Découverte modifier

Le trésor est découvert le par Prosper Taurin, alors que celui-ci laboure son champ : le soc de sa charrue est bloqué par une tuile romaine qui, une fois dégagée, s'avère protéger un ensemble de pièces d'argenterie enfouies à 20 centimètres à peine dans le sol[1]. Le paysan confie sa découverte à un notable local, qui prévient des archéologues locaux. Le trésor est ensuite examiné par Charles Lenormant pour le compte du musée du Louvre et par Désiré Raoul-Rochette, conservateur des médailles et pierres gravées du Cabinet des médailles. Ce dernier se porte aussitôt acquéreur pour le montant assez modeste de 15 000 francs[2],[3]. Le trésor est publié pour la première fois en 1832 par l'archéologue normand Auguste Le Prévost, puis par Ernest Babelon, directeur du département des Monnaies, médailles et antiques de la Bibliothèque nationale de France.

Une copie des principales pièces du trésor est visible au musée municipal de Bernay.

Contexte archéologique modifier

Le trésor se trouvait dans une cache maçonnée dans une galerie pavée qui appartenait à un sanctuaire gallo-romain. Les fouilles menées entre 1897 et 1898 par Camille de La Croix à l'instigation du conseiller général brionnais Arthur Join-Lambert, ont révélé deux temples, un théâtre et des pièces chauffées par hypocauste[4]. Le sanctuaire a fait l'objet au moins d'une réfection importante dans son histoire. Dédié à Mercure, il portait le nom de Canetonum et dépendait de la cité des Lexoviens dont le chef-lieu était Noviomagus[5]. L'enfouissement du trésor fut au départ attribué à des troubles ou à la menace d'invasion, mais on retient plutôt désormais l'hypothèse d'une cache dénuée de toute urgence[6].

Description modifier

 
Centauresse et amours, détail de l'une des Coupes aux Centaures de Berthouville (cat. 60). Paris, département des Monnaies, médailles et antiques de la Bibliothèque nationale de France.

Le trésor comprend une centaine de pièces, principalement des vases et des fragments, mais aussi des statuettes de Mercure, dont l'une de 60 centimètres de haut[3]. Les pièces ont été déposées à titre votif dans un temple gallo-romain consacré à Mercure Canetonensis, l'un des principaux dieux gaulois[7], puis enterrées à la fin du IIe siècle apr. J.-C., sans doute pour les protéger d'une invasion barbare[8].

La plus grande partie du trésor est datable du IIe siècle ; l'un des vases comporte une inscription votive avec un nom de cette période ; un autre est clairement influencé par une colonne en relief du temple d'Artémis à Éphèse et doit dater de l'époque d'Hadrien[8]. Neuf des pièces, parmi les plus belles, ont été dédiées par un Quintus Domitius Tutus et se rattachent plutôt au Ier siècle. Une partie des pièces est de style gallo-romain, les autres sont l'œuvre d'un atelier italo-grec[8].

Le skyphos aux centaures, a été réalisé au Ier siècle après J-C, probablement à Rome. C'est un vase à boire sans pied, en argent et réalisé selon la technique du repoussé. D'une hauteur de 11,4cm et d'un diamètre de 15cm, il pèse environ 1,6 kg, les pattes de la centauresse en font une quasi-sculpture héritée de l'art hellénistique.

Notes modifier

  1. Le Prévost, p. 6.
  2. Auguste Le Prévost, « Archéologie », Journal de Rouen, no 127, 7 mai 1830, p. 2-3.
  3. a et b Waldstein, p. 97.
  4. Deniaux, 2006, p. 273
  5. E. Deniaux, 2006, p. 272
  6. Deniaux, 2006, p. 291-293
  7. César, Guerre des Gaules [lire en ligne] (VI, 17).
  8. a b et c Lehmann-Hartleben, p. 82.

Bibliographie modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Auguste Le Prévost, « Antiquités », Journal de Rouen, no 109, 19 avril 1830, p. 2-3.
  • Ernest Babelon, Le Trésor d'argenterie de Berthouville près de Bernay, Paris, 1916, 154 p.
  • Élisabeth Deniaux, « Les dédicants du trésor du sanctuaire de Berthouville (cité des Lexouii) », in M.Dondin-Payre et M.-Th. Raepsaet-Charlier éd., Sanctuaires, pratiques cultuelles et territoires civiques de l'Occident romain, Bruxelles, 2006, p. 271-295.
  • (en) Jon van de Grift, « Tears and Revel: The Allegory of the Berthouville Centaur Scyphi », American Journal of Archaeology, vol. 88, no 3, , p. 377-388.
  • Patrice Lajoye « Analyse sociale des donateurs du trésor de Berthouville (Eure) », in R. Häussler (dir.), Romanisation et épigraphie. Études interdisciplinaires sur l’acculturation et l’identité dans l’empire romain, Montagnac, 2008, p. 127-132.
  • Le Trésor et les substructions gallo-romaines de Berthouville (extrait du Bulletin archéologique), Paris, Imprimerie nationale, , 8 et I p.
  • (en) Karl Lehmann-Hartleben, « Two Roman Silver Jugs », American Journal of Archaeology, vol. 42, no 1, janvier-, p. 82-105.
  • Auguste Le Prévost, Liste des principaux objets trouvés à Berthouville, Ancelle fils, Évreux, 1830.
  • Auguste Le Prévost, Mémoire sur la collection de vases antiques trouvée en 1830 à Berthouville (arr. de Bernay), Caen, 1832.
  • (en) Charles Waldstein, « A Hermes in Ephesian Silver Work on a Patera from Bernay in France », The Journal of Hellenic Studies, vol. 3, 1882, p. 96-106.
  • Hubert Delobette, Histoires des plus incroyables trésors français, Papillon Rouge éditeur, 2016.
  • Franck Chevallier, « Le trésor de Berthouville », Archéologia, no 555, p. 38-43.