Theodor Oberländer

personnalité politique allemande
Theodor Oberländer
Fonctions
Député au Bundestag
4th German Bundestag (d)
-
Elisabeth Vietje (d)
Député au Bundestag
3e Bundestag allemand (d)
Hildesheim (en)
-
Député au Bundestag
2e Bundestag allemand (en)
-
Député bavarois
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 93 ans)
BonnVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Cimetière de Poppelsdorf (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
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Formation
Activités
Autres informations
A travaillé pour
Partis politiques
Membre de
Sturmabteilung
Deutschvölkischer Schutz- und Trutzbund
Deutsche Gildenschaft (d)
Corps franc de l'Oberland (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conflit
Condamné pour
Distinctions

Theodor Erich Ernst Emil Otto Oberländer, né le à Meiningen et mort le à Bonn, est un ingénieur agronome, universitaire et homme politique allemand.

Biographie modifier

A 18 ans, il prend part à la tentative de putsch d'Hitler à Munich en 1923[1]. Il n'adhère au parti nazi qu'en 1933, après l'arrivée au pouvoir d'Hitler. Il devient un cadre local de la Sturmabteilung (SA)[1].

Docteur en sciences agricoles (1929) de l'Université de Berlin et docteur en économie de l'Université de Königsberg (1930), c'est un spécialiste des questions agraires et de l'Europe orientale, en relation avec les recherches sur l'Est. Il est assistant à l'Institut de l'économie de l'Europe de l'Est de l'Université de Königsberg (Prusse-Orientale) à partir de 1931 puis son directeur à partir de 1933.

Le journaliste et historien allemand Götz Aly le classe parmi les intellectuels nazis qui ont pensé avant son exécution la politique nazie de liquidation des populations à l'Est, juives notamment, dans la mesure où il préconise une extension de la civilisation germanique à l'Est au détriment des Slaves et des Juifs car l'Allemagne est selon lui surpeuplée[1]. Il préside en tout cas le Bund deutscher Osten (Ligue de l'Est allemand, BDO) à partir de 1934, dirige en Prusse-Orientale le Verein für das Deutschtum im Ausland (société pour la promotion de la germanité à l'étranger, VDA), devient le conseiller du gauleiter de Prusse-Orientale Erich Koch[1].

Il est toutefois écarté du BDO en 1937[2] car il s'est exprimé contre la radicalisation des projets nazis à l'Est[3]. Il doit quitter également l'Université de Königsberg et le VDA. Il enseigne ensuite à l'Université de Greifswald puis à celle de Prague, dans le Protectorat de Bohême-Moravie, en 1940.

L'historien français Alfred Wahl note que son parcours comporte des zones d'ombre pour la période 1941-1942, durant laquelle il est mobilisé comme officier subalterne sur le front de l'Est, à la suite de l'opération Barbarossa qui marqua l'invasion de l'URSS en juin 1941 par les Allemands. Sous les auspices de l'Abwehr, il est chargé de mettre en place en 1941 deux unités spéciales de la Wehrmacht, composées de Slaves, le bataillon Nachtigall, composé en majorité de nationalistes ukrainiens, puis le Sonderverband Bergmann. Les historiens ne sont pas d'accord sur son rôle exact dans les crimes commis par ces unités, notamment les massacres de Polonais et de Juifs à Lviv (Lemberg en allemand) durant l'été 1941. Alfred Wahl souligne que le biographe allemand d'Oberländer est indulgent et le disculpe, contrairement à Aly. Philipp-Christian Wachs, biographe d'Oberländer, démontre que ce dernier a contesté la violence inhumaine des nazis contre les peuples slaves, ce qui lui valut sa disgrâce et son retour à l'université, à Prague en 1943. En mars 1945, il s'engage à nouveau et sert comme officier de liaison dans l'Armée Vlassov[1].

En France, Théodor Oberländer aurait été le principal responsable nazi des tueries de Saint-Nazaire-en-Royans (Drôme) de juillet et aout 1944 : 46 personnes ont été fusillées dans la cour du château de cette localité[4].

Théodor Oberländer s’est rendu aux Américains en avril 1945.

Il adhère à la fin des années 1940 au Bloc des réfugiés, devient chef de ce parti en Bavière jusqu'en 1953 puis son dirigeant national avant de rejoindre en 1955 la CDU. Il est secrétaire d'État pour la question des réfugiés du Land de Bavière à partir de 1950 puis ministre fédéral des expulsés, des réfugiés et des blessés de guerre de 1953 à 1960, dans des gouvernements dirigés par Konrad Adenauer. Il est membre du Bundestag de 1953 à 1961 et de 1963 à 1965[1].

Les attaques à propos de son passé commencent en RDA en 1954. Son passé nazi est dévoilé à partir de 1957 en Bavière. En septembre 1959, la presse soviétique et est-allemande révèle son passé nazi, ses écrits et ses actes, et l'accuse surtout d'avoir commis des crimes à la tête du bataillon Nachtigall en 1941 à Lemberg (Lviv). Une agence de presse polonaise apporte des témoignages tandis que la commission spéciale soviétique d'enquête sur les crimes de guerre lui impute des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité en 1960. Un procès mené à Berlin-Est par la RDA le condamne par contumace à la prison à vie en avril 1960[1],[5],[6],[7],[8],[9],[10]. Quoique cela participe d'une campagne de la RDA visant à déstabiliser la RFA[3], des périodiques ouest-allemands comme Der Spiegel et Die Zeit évoquent aussi son passé et il est mis en cause par l'association allemande des victimes du nazisme et par des parlementaires de la CDU et du SPD qui demandent son retrait[11]. Il se défend à La Haye, devant une commission de personnalités, réunies à sa demande[12] ,[13]. Adenauer le défend timidement, reconnaissant qu'il a été « brun et même très brun ». Oberländer démissionne le 3 mai 1960 de sa fonction de ministre après avoir résisté un temps aux pressions de ses adversaires et de ses alliés politiques[1],[14],[15],[16].

Anticommuniste convaincu et radical, il est inséré dans les années 1960 et 1970 dans plusieurs réseaux transnationaux combattant le communisme. En 1965, à New York, il donne un discours devant des membres américains du Bloc des nations anti-bolchéviques (ABN), une organisation nationaliste et anticommuniste qui rassemble des émigrés issus de peuples non-russes de l'URSS et d'autres pays communistes du Bloc de l'Est, dirigée depuis Munich par l'Ukrainien réfugié en RFA Iaroslav Stetsko[17]. En mars 1966, il participe à Lisbonne au 6e congrès d'une organisation transnationale qui lutte contre le communisme athée, le Comité international de défense de la civilisation chrétienne (CIDCC), alors présidé par l'Espagnol José Solís Ruiz et qui a comme président d'honneur l'ancien chancelier Adenauer, aux côtés d'autres Allemands comme le ministre CDU Bruno Heck ou Hermann Pünder (Politiker) (de) (président de la branche ouest-allemande de cette organisation), de représentants d'autres pays européens (parmi lesquels les Français Antoine Pinay et Marie-Hélène Cardot) mais aussi américains[18]. Il assiste la même année, en novembre, à la 12e conférence de la Ligue anticommuniste des peuples d’Asie (Asian Peoples' Anti-Communist League ou APACL) à Séoul, qui voit la fondation de la Ligue anticommuniste mondiale (World Anti-Communist League/WACL). Il prend part par la suite aux congrès de la WACL qui ont lieu dans diverses métropoles mondiales et préside son chapitre ouest-allemand, est membre un temps du comité exécutif du Conseil européen de la liberté ou European freedom council (EFC)[19], animé notamment par Iaroslav Stetsko - qu'il a côtoyé à Lisbonne et à Séoul en 1966 -, fondé en 1967 et lié à la WACL, et est vice-président du WACL Council for Europe, fondé en 1979.

Contesté du fait de son passé nazi, il gagne tous ses procès contre ses adversaires jusqu'à sa mort[1].

Bibliographie modifier

  • Alfred Wahl, La seconde histoire du nazisme dans l'Allemagne fédérale depuis 1945, Armand Colin, .
  • Philipp-Christian Wachs, Der Fall Oberländer (1905–1998). Ein Lehrstück deutscher Geschichte, Frankfurt am Main, Campus Verlag, 2000

Notes et références modifier

  1. a b c d e f g h et i Wahl 2006.
  2. Christian Ingrao, La promesse de l'Est. Espérance nazie et génocide 1939-1943, Seuil, 2016, p. 122
  3. a et b Hélène Miard-Delacroix, Question nationale allemande et nationalisme, Perceptions françaises d'une problématique allemande au début des années cinquante, Presses universitaires du Septentrion, , p.110.
  4. site museedelaresistanceenligne.org, MÉMORIAL DE SAINT-NAZAIRE-EN-ROYANS. La page allemande de wikipédia n'évoque pas cet épisode et affirme qu'il a quitté l'armée allemande en 1943. La page anglaise l'évoque en se fondant sur cette même source.
  5. « Varsovie publie un dossier sur les crimes reprochés aux unités commandées à Lvov par le Dr Oberlaender », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  6. « La Commission soviétique sur les crimes de guerre accuse à son tour M. Oberlaender », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  7. « Un nouveau film soviétique consacré au Dr Oberlaender sort à Moscou », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  8. « Ouverture du procès du Dr Oberlaender », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  9. « " Le Pr Oberlaender nous a félicités après les massacres de Lvov ", affirme à Berlin-Est un témoin du procès », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  10. « Le professeur Oberlaender condamné à Berlin-Est aux travaux forcés à perpétuité », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  11. « Nouvelles attaques contre le Dr Oberlaende », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  12. « Pour la commission de résistants da La Haye, le Dr Oberlaender n'est pas responsable des massacres de Lvov », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  13. « " Le secrétaire hollandais de Comité international à la Résistance disculpe le Pr Oberlaender », Le Monde,‎ (lire en ligne). (La commission internationale constituée en novembre dernier comprend Karel Van Stkal (Hollande), Ole Bjørn Kraft (ancien ministre danois des affaires étrangères, qui va côtoyer Oberländer à la WACL et à l'European Freedom Council), Hans Capellen (Norvège), Kurt Schock (Suisse) et le professeur Flor Peters (Belgique). Certains de ses membres ont démissionné.
  14. « Malaise au Bundestag et dans la majorité chrétienne démocrate à propos du cas Oberlaender », Le Monde,‎ .
  15. « Le Dr Oberlaender démissionnera avant la fin de ses vacances », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  16. « Le parquet de Bonn dément que la justice allemande ait renoncé à se saisir du cas Oberlaender », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  17. ABN correspondence, november-december 1965, p. 41. Sans surprise, l'ABN, dominée par des réfugiés ukrainiens nationalistes, a défendu Oberländer contre ses accusateurs à propos des massacres de Lviv et du bataillon Nachtigall, mis en cause, voyant ces accusations comme une opération du KGB : ABN correspondence, may-june 1960, p. 17-22 et ABN correspondence, january-february 1964, p. 42-44
  18. Crusade for God and dignity of Man, ABN correspondence, juillet-août 1966, p. 32-38. Sur le CIDCC, cf. Johannes Grossmann, L’« Internationale des Conservateurs ». Cercles d’élites transnationaux, diplomatie informelle et biographies croisées en Europe occidentale depuis 1945, dans Histoire, économie et société, 2016/2 (Lire en ligne)
  19. Th. Oberländer, « Report on the Activities of the European Freedom Council », in ABN correspondence, november-december 1971, p. 20-22

Liens externes modifier