Second Empire d'Haïti

ancien pays (1849-1859)

Le Second Empire d'Haïti (en créole haïtien : Anpi an Ayiti) est une ancienne monarchie située dans les Caraïbes et qui fut en place de 1849 à 1859.

Empire d'Haïti
(ht) Anpi an Ayiti

 – 
(9 ans, 4 mois et 20 jours)

Drapeau
Drapeau d'Haïti
Blason
Armoiries d'Haïti
Devise « Dieu, ma patrie et mon épée »
Description de l'image LocationHaiti.svg.
Informations générales
Statut Monarchie absolue
Capitale Port-au-Prince
Langue(s) Français, créole haïtien
Religion Catholicisme
Monnaie Livre haïtienne
Histoire et événements
26 août 1849 Couronnement de Faustin Soulouque
1856 Fin de la guerre d'indépendance dominicaine
1858-1859 Révolution de 1859
15 janvier 1859 Abdication de Soulouque
Empereur
1849-1859 Faustin Ier

Entités précédentes :

Entités suivantes :

L'Empire est créé par le président de l'époque, l'ancien lieutenant général et commandant suprême des gardes présidentielles sous le président Jean-Baptiste Riché, Faustin Soulouque[1], qui, inspiré par Napoléon Ier, s’est proclamé empereur d'Haïti sous le nom de Faustin Ier le . Couronné à la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption de Port-au-Prince[2], son règne est marqué par plusieurs guerres livrées contre la République dominicaine voisine[3] dans le but de la reconquérir, et par l'autoritarisme du pouvoir impérial.

Toutefois, les tentatives infructueuses de l'empereur pour reconquérir la République dominicaine minèrent son pouvoir et une conspiration menée par le général Fabre Nicolas Geffrard amena à une révolution, ce qui le contraignit à l’abdication en 1859.

Fin de la République modifier

 
Faustin Soulouque, président puis empereur d'Haïti.

Le 1er mars 1847, le général Faustin Soulouque est élu président de la République par le Sénat et succède au président Riché, décédé en fonctions. Pendant son mandat, ce dernier avait agi comme un homme de paille de la classe dirigeante boyériste, qui se mit tout de suite en quête d’un remplaçant. Son attention se concentra vite sur Faustin Soulouque, dans lequel la plupart voyaient quelqu’un d’un peu effacé et un ignorant. Âgé de 65 ans, il paraissait un candidat malléable et fut donc incité à accepter le rôle qu’on lui offrait. Il prêta le serment d’entrée dans les fonctions présidentielles le .

Au début Faustin parut remplir convenablement son rôle de marionnette. Il conserva à leurs postes les ministres de l'ancien président et continua le programme de son prédécesseur. Il fallut peu de temps cependant pour qu’il se débarrassât de ses partisans et se fît le maître absolu de l'État haïtien. Selon le livre de Mark Kurlansky A Continent Of Islands: Searching For The Caribbean Destiny « il organisa une milice privée, les Zinglins, et fit arrêter et massacrer, tous ceux qui s'opposaient à lui, en particulier les mulâtres, consolidant par là son pouvoir sur le gouvernement ». Ce processus, qui comprit un massacre des mulâtres à Port-au-Prince le [réf. nécessaire], culmina au Sénat et à la Chambre des Députés où il se fit proclamer empereur d'Haïti le .

Soulouque invita également les Louisianais noirs à émigrer à Haïti. Un afro-créole originaire de la Nouvelle-Orléans et qui avait été élevé à Haïti, Emile Desdunes, travailla comme agent de Soulouque et, en 1859, organisa le transport gratuit à Haïti d’au moins 350 personnes désespérées. Un grand nombre de ces réfugiés devaient rentrer plus tard en Louisiane.

Le règne de Soulouque fut marqué par une violente répression contre l'opposition et par de nombreux meurtres. Le fait que Soulouque était ouvertement un adepte de la religion africaine Vaudou contribua à sa réputation de violence[4]. Au cours de son règne Soulouque fut agi par les préjugés, la haine et la discrimination à l’égard des créoles (les mêmes sentiments existant évidemment en miroir).

L'Empire modifier

Couronnement modifier

 
Cérémonie de couronnement de l'empereur Faustin.

Le 25 août 1849, Soulouque se fait proclamer empereur par le Parlement sous le nom de Faustin Ier. Son sacre a lieu le 18 avril 1852, dans un faste ruineux pour les finances de ce pays, et le paiement de la dette doit être interrompu. Soulouque a payé 2 000 £ pour sa couronne et 30 000 £ pour le reste des accessoires (selon Sir Spenser St John, chargé d'affaires britannique en Haïti dans les années 1860, sur son compte: "Hayti ou La République noire", p. 95–96).

Gustave d'Alaux décrit cet événement dans son livre, Soulouque et son empire: « Sa majesté impériale fit appeler un matin le principal marchand de Port-au-Prince et lui ordonna de commander immédiatement à Paris un costume, identique à celui du sacre de Napoléon. Faustin Ier a d'ailleurs commandé pour lui-même une couronne, une pour l'impératrice, un sceptre, un globe terrestre, une main de justice, un trône et tous les autres accessoires, comme tous ceux utilisés lors du couronnement de Napoléon ».

En , Faustin épousa sa compagne de longue date, Adélina Lévêque. Le , à la capitale, Port-au-Prince, l'empereur et l'impératrice sont couronnés lors d'une immense et somptueuse cérémonie, à l'instar du couronnement de l'empereur des français.

L'empereur prononce son discours et conclut par : « Vive la liberté, vive l'amour ! »(Gustave d'Alaux). Le couronnement est illustré dans « l'Album Impériale d'Haïti », gravé par Severyn, publié à New York, 1852 (disponible à la British Library).

 
Armoiries de l'Empire d'Haïti.

Politique modifier

Pour affirmé sa légitimité, Faustin fait revenir les enfants du premier empereur, Jean-Jacques Dessalines, leur redonne le titre de « prince » et « princesse » et offre une pension à l'ancienne impératrice Marie-Claire Bonheur.

Par la suite, il organise une répression violente contre les mulâtres et rétablit l'absolutisme sur l'île. La constitution impériale, qu'il a lui-même rédigé, proclame l'empire héréditaire. L'unique fils de l'empereur étant mort en 1849, la succession passa donc au prince Mainville-Joseph, fils du grand-duc Jean-Joseph, lui-même frère de l'empereur. Afin d'avoir des descendants sur le trône, Faustin organisa le mariage de sa fille aînée, la princesse Olive Soulouque, avec son cousin le prince Mainville-Joseph. Le couple donnera trois enfants à la Couronne.

La politique étrangère de l'empereur était centrée sur la prévention de l'intrusion étrangère dans la politique et la souveraineté haïtienne. L’indépendance de la République dominicaine (alors appelée Saint-Domingue), constituait, selon lui, une menace directe pour Haïti.

En 1849, Soulouque entreprit sa première invasion de la République dominicaine, mais son armée prit la fuite après la défaite à la bataille d'Ocoa. Une deuxième invasion s'ensuivit en 1850, où Haïti fut soutenu par la France, le Royaume-Uni et des États-Unis. Lors de la troisième et dernière invasion en 1855, Soulouque entra en République dominicaine à la tête d'une armée de 30 000 hommes qui dut battre en retraite. Durant ses trois expéditions, il dut faire face au général Pedro Santana qui dirigeait alors la République dominicaine.

Noblesse modifier

 
Caricature de Charivari : "L’empereur Soulouque se promenant dans ses états, suivi de deux aides-de-camp attachés à sa personne."

L'empereur a tenté de créer un gouvernement centralisé fort qui, tout en conservant un caractère profondément haïtien, s'inspirait énormément des traditions européennes, en particulier de l'Empire napoléonien. Un de ses premiers actes après avoir été déclaré empereur fut d'établir une nouvelle noblesse. La Constitution du accorde à l'empereur le droit de créer des titres héréditaires et de conférer d'autres honneurs à ses sujets. Les volumes 5 et 6 du magazine The National de John Saunders and Westland Marston (publié en 1859) expliquaient que l'Empire était composé de 59 ducs, 90 comtes, 30 chevaliers et 250 barons. Cette nouvelle noblesse comprenait également l'ancienne noblesse du Premier Empire et du Royaume du Nord. Les premières lettres patentes ont été émises par Soulouque le . D'autres sources ajoutent "trent cent Chevaliers" et "quatre cents nobles" à cette liste.

Chute de l'Empire modifier

Révolution modifier

En 1858, une révolution commença, dirigée par le général Fabre Geffrard, duc de Tabara et ancien fidèle de l'empereur. En décembre de la même année, Geffrard défit l'armée impériale et s'empara du contrôle de la plus grande partie du pays. Dans la nuit du , Geffrard quitte Port-au-Prince dans un petit bateau, accompagné de son fils et de deux fidèles disciples, Ernest Roumain et Jean-Bart. Le , il est arrivé aux Gonaïves, où l'insurrection a éclaté. La République a été acclamée et la Constitution de 1846 a été adoptée.

Le , le comité départemental des Gonaïves, qui avait été organisé, a décrété l'abolition de l'Empire et l'arrestation de plusieurs membres de la famille impériale. Cap-Haïtien et tout le département de l'Artibonite se sont associés à la restauration de la République. Les journées de et de janvier 1859 affaiblissent considérablement le pays. Les troupes impériales pourtant épuisées et vaincues à plusieurs reprises par les révolutionnaires continuent à se battre contre l'insurrection. Les révolutionnaires prennent alors le nom de "geffrardistes" et réclament l'arrestation et le procès de l'empereur.

Abdication et exil modifier

Le , le palais impérial est attaqué, l'empereur est contraint d'abdiquer le jour même. Il fut exilé avec sa famille à bord d'un navire de guerre britannique le . Le général Geffrard se fit alors élire président de la République. Peu de temps après, l'empereur et sa famille arrivèrent à Kingston, en Jamaïque. Autorisé à retourner en Haïti par le gouvernement de Sylvain Salnave, Faustin mourut à Petit-Goâve le et fut enterré à Fort Soulouque.

Références modifier

Sources modifier

  1. The impact of the Haitian Revolution in the Atlantic world. David Patrick Geggus (ed), p. 25. University of South Carolina Press, 2001. (ISBN 1-57003-416-8), (ISBN 978-1-57003-416-9).
  2. Rogozinski, Jan (1999). A Brief History of the Caribbean (Revised ed.). New York: Facts on File, Inc. p. 220.
  3. John E. Baur, « Faustin Soulouque, Emperor of Haiti His Character and His Reign », The Americas, vol. 6, no 2,‎ , p. 131–166 (DOI 10.2307/978436, JSTOR 978436).
  4. Randall T. Schuh, « Remembering James Alexander Slater 1920–2008 », Entomologica Americana, vol. 115, no 2,‎ , p. 172–181 (ISSN 1947-5136 et 1947-5144, DOI 10.1664/09-sn-007.1, lire en ligne, consulté le ).