Rhapsody in Blue

œuvre pour piano et orchestre composée par George Gershwin en 1924

Rhapsody in Blue est une œuvre pour piano et orchestre ou harmonie composée par George Gershwin en 1924, qui combine des éléments de musique classique et de jazz.

Rhapsody in Blue
Image illustrative de l’article Rhapsody in Blue
Page de couverture de la partition de Rhapsody in Blue.

Genre Jazz symphonique
Musique George Gershwin
Dates de composition 1924
Dédicataire Paul Whiteman
Création
New York, Aeolian Hall
Interprètes Paul Whiteman (chef d'orchestre)
George Gershwin (piano)
Fichier audio
Gershwin - Rhapsody in Blue (1924, par orchestre de jazz)
noicon
Interprétation de Bramwell Tovey et le United States Marine Band datée de juillet 2018 (Durée 18:10)

L'œuvre a été orchestrée par Ferde Grofé à trois reprises, en 1924, 1926 et finalement en 1942. La première eut lieu lors d'un concert intitulé An Experiment in Modern Music le à l'Aeolian Hall de New York, interprétée par l'orchestre de Paul Whiteman, commanditaire de l'œuvre, avec George Gershwin au piano. Le Cambridge Music Handbook estime que « Rhapsody in Blue a établi la réputation de Gershwin comme compositeur de renom et est depuis devenue une des plus populaires œuvres orchestrales américaines ». Elle a également donné son nom à une rose.

Histoire modifier

Commande modifier

 
Rhapsody in Blue, de Paul Whiteman.
piano solo

Après le succès d'un concert expérimental jazz-classique de la chanteuse canadienne Eva Gauthier (en) au Aeolian Hall de New York le premier novembre 1923, le chef d'orchestre Paul Whiteman décida de se risquer dans un projet plus ambitieux[1]. Il commanda alors à Gershwin un concerto pour présenter lors d'un concert jazz au Aeolian Hall en . Whiteman avait commencé à s'intéresser à une composition de ce genre par Gershwin après avoir été impressionné par l'originalité de l'opéra en un acte Blue Monday, qui avait été un échec[2]. Gershwin n'était pas trop enthousiaste à l'idée de cette nouvelle pièce car sa nouvelle comédie, Sweet Little Devil, devait faire ses débuts à New York le . Il devrait encore probablement réviser la partition jusqu'à cette date et il ne pensait pas avoir le temps pour composer le concerto[2].

Le , le frère de George Gershwin, Ira Gershwin lut dans le New York Tribune[2],[3] un article intitulé « Qu'est-ce que la musique américaine ? » à propos du concert de Whiteman. Le dernier paragraphe annonçait que « George Gershwin travaillait à un concerto jazz ». Mis au courant, Gershwin décida finalement de composer la pièce.

Composition modifier

Comme il ne restait plus que cinq semaines avant le concert, Gershwin se mit rapidement au travail. C'est dans un train de Boston que les idées pour Rhapsody in Blue lui sont venues.

Il commença le , comme indiqué sur le manuscrit pour deux pianos[1]. La composition fut achevée en quelques semaines et Gershwin demanda à Ferde Grofé de faire les arrangements pour orchestre. Les orchestrations furent finies le , huit jours seulement avant la première[4].

Le célèbre solo de clarinette en glissando ouvrant l'oeuvre n'est pas de Gershwin, et n'était pas inclus dans la partition originale. Il s'agit d'un ajout du clarinettiste Ross Gorman (en) au cours d'une répétition, ce dernier travaillant alors pour Paul Whiteman[5]. Ce solo fut longtemps redouté des clarinettistes solistes, pour le niveau de technicité requise. Anecdote peu commune, Georges Grisez, premier clarinettiste de l'Orchestre symphonique de Baltimore meurt sur scène en 1946 juste après l'avoir achevé[6].


Première modifier

Rhapsody in Blue fut créé durant l'après-midi du sous le titre An Experiment in Modern Music. Le concert eut lieu au Aeolian Hall à New York[7].

L'orchestre de Whiteman était un jazz band incluant une section de cordes, avec George Gershwin au piano. Gershwin improvisa les solos de piano. Comme il n'écrivit la partition de piano qu'après le concert, nous ne savons pas à quoi ressemblait la Rhapsody originale.

Réception modifier

Le concerto suscita des critiques variées. Quelques-uns le qualifièrent de « musique de nègre », d'autres de musique sans forme. D'autres encore clamèrent le génie du compositeur.

Orchestration modifier

Gershwin a affirmé que Ferde Grofé était l'élément clé du succès de la pièce, et les critiques applaudirent les orchestrations. Grofé confirma en 1938 que Gershwin n'avait pas assez de connaissances en orchestration en 1924[8]. Après la première, Grofé fit de nouvelles orchestrations en 1926 et en 1942, chaque fois pour un orchestre plus large[9]. La version la plus récente est la plus souvent entendue.

L'orchestration de 1924 pour l'orchestre de 23 musiciens de Whiteman est pour une flûte, un hautbois, des clarinettes (en mi bémol, en si bémol, alto et basse), un basson, des saxophones, 2 cors, 2 trompettes, 2 bugles, un euphonium, 2 trombones, un trombone basse, un tuba, 2 pianos, un celesta, un banjo, des tambours, des timbales, une batterie, des violons, des contrebasses et un accordéon[10]. Plusieurs musiciens jouaient de deux instruments.

L'orchestration de 1942 est pour piano solo, 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes en si bémol (les deux doublant la clarinette en la), une clarinette basse en si bémol, 2 bassons, 3 cors en fa, 3 trompettes en si bémol, 3 trombones, un tuba, des timbales, des percussions (crash, caisse claire, grosse caisse, gong, triangle, cloches et cymbales), piano, 2 saxophones alto en mi bémol, un saxophone ténor en si bémol, un banjo, et des instruments à cordes (violons, altos, violoncelles et contrebasses)[11].

En 2014, le clarinettiste et musicologue spécialiste des Années Folles Frédéric Cellier, qui était déjà l'auteur d'une transcription intégrale de Rhapsody in blue pour clarinette et piano (réalisée en 1992 et publiée par les Éditions Henry Lemoine en [12]), a signé une nouvelle orchestration qui renoue avec un effectif orchestral plus léger, proche de celui du jazz band originel, mais confiée cette fois aux seules cordes. Elle est pour clarinette et piano solistes, violons 1, violons 2, altos, violoncelles et contrebasse.

Enregistrements modifier

Il existe deux enregistrements de Gershwin au piano avec l'orchestre de Whiteman : un de , et d', conduit par Nathaniel Shilkret[13]. Le premier a été inscrit en 2002 au registre national des enregistrements (National Recording Registry) de la bibliothèque du Congrès à Washington[14], le second a reçu en 1974 le Grammy Hall of Fame Award[15]. Il existe aussi un enregistrement de Gerhswin jouant la version pour deux pianos[16]. L'orchestre de Whiteman enregistra la pièce pour le film de 1930 The King of Jazz (Le roi du jazz) avec Roy Bargy au piano.

Depuis le milieu du XXe siècle, la version de 1942 a été la plus jouée par les orchestres. C'est devenu un classique du répertoire. Un des facteurs de succès de la pièce est son caractère populaire associé à une construction classique.

Durant les années 1970, un intérêt pour l'arrangement original est apparu. Des enregistrements ont été faits par Michael Tilson Thomas et le Los Angeles Philharmonic en 1975 mettant en vedette Gershwin grâce à l'enregistrement de la version pour deux pianos, et par Maurice Peress avec Ivan Davis au piano dans une reproduction du concert de [17].

Enregistrements notables modifier

Postérité modifier

Adaptations modifier

Duke Ellington s'en inspire pour sa rhapsodie de jazz Creole Rhapsody de 1931.

Les studios Disney ont mis en image la Rhapsody in Blue dans Fantasia 2000. Adaptant un style graphique proche de celui du dessinateur new-yorkais Al Hirschfeld, la musique illustre les destins croisés de quatre personnages qui cherchent leur bonheur.

De plus, Rhapsody in Blue est la musique du générique de Nodame Cantabile, un drama japonais ; cette version est quelque peu spéciale, étant arrangée pour big band et melodica/pianica.

Elle sert également d'introduction emblématique du film Manhattan de 1979, de Woody Allen, ainsi qu'au court-métrage Meetin' WA de 1986, de Jean-Luc Godard[18].

Elle est reprise par le groupe Liquid Tension Experiment dans un de ses lives[19]. Une version studio est ensuite enregistrée pour l'album Liquid Tension Experiment 3, sorti en 2021.

Œuvres inspirées par Rhapsody in Blue modifier

Notes et références modifier

  1. a et b Schiff p. 53
  2. a b et c Wood p. 81
  3. Jablonski, Edward (1999) "Glorious George « Copie archivée » (version du sur Internet Archive)", Cigar Aficionada Jan/Feb 1999
  4. Greenberg p. 69
  5. (en) édité par Colin Lawson, The Cambridge companion to the clarinet, Cambridge, Cambridge University Press, , 240 p. (ISBN 978-0-521-47668-3, lire en ligne), p. 102
  6. « Boston Symphony Orchestra Principal Musicians », sur www.stokowski.org (consulté le )
  7. Downes
  8. Greenberg p. 66
  9. Greenberg p. 76
  10. Schiff p. 5-6
  11. Gershwin, George; & Grofé, Ferde (1924, 1942). George Gershwin's Rhapsody in Blue miniature orchestra score. Warner Brothers.
  12. « Editions Henry Lemoine | Catalogue », sur www.henry-lemoine.com (consulté le )
  13. Greenberg pp. 75-76
  14. (en)« Rhapsody in Blue - Complete National Recording Registry Listing », sur loc.gov
  15. a et b (en)« Grammy Hall of Fame Award », sur grammy.com
  16. Schiff p. 64
  17. Sniff pp. 67-68
  18. (en-US) Tom Sutpen, « Meetin' WA (1986) - video Dailymotion », sur Dailymotion (consulté le )
  19. [1]
  20. (en) The Library of Congress Copyright Office, American Rhapsody, Copyright: Alpha Music Co, New York, New York,Composer: John Serry Sr. 1957.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Downes, Olin (1924). "A Concert of Jazz". The New York Times, February 13, 1924: p. 16.
  • Wood, Ean (1996). George Gershwin: His Life & Music. Sanctuary Publishing. (ISBN 1860741746)
  • Schiff, David (1997). Gershwin: Rhapsody in Blue. Cambridge University Press. (ISBN 0521550777)
  • Greenberg, Rodney (1998). George Gershwin. Phaidon Press. (ISBN 0714835048)

Articles connexes modifier

Liens externes modifier

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