Problème de Prouhet-Tarry-Escott

En mathématiques, et plus particulièrement en théorie des nombres et en combinatoire, le problème de Prouhet-Tarry-Escott est de trouver, pour chaque entier , deux ensembles et de entiers chacun, tel que :

pour chaque de jusqu'à un entier donné[1]. Si et vérifient ces conditions, on écrit .

On cherche une solution de taille minimale pour un degré donné. Ce problème, toujours ouvert, est nommé d'après Eugène Prouhet, qui l'a étudié en 1851, et Gaston Tarry et Edward Brind Escott, qui l'ont considéré au début des années 1910.

La plus grande valeur de pour laquelle on connaît une solution avec est . Une solution correspondante est donnée par les ensembles suivants[2] :

Exemple modifier

L'entier   de la définition est le degré, et l'entier   est la taille. Il est facile de voir que pour toute solution, on a  . On cherche donc une solution de taille minimale.

Pour la taille   et le degré  , les deux ensembles

  et  

sont une solution du problème, puisque :

 
 
 
 
 .

Une solution idéale est une solution dont la taille est égale au degré + 1. La solution ci-dessus est donc idéale.

Histoire modifier

En 1851, Eugène Prouhet pose le problème plus général de répartir les entiers x de 1 à nm en n classes, de façon que la somme des puissances k-ièmes des entiers de chaque classe soit la même, pour k = 0, 1, ... Le procédé qu'il propose[3] revient à numéroter les classes de 0 à n – 1, à décomposer chaque entier x – 1 dans la base de numération n, à faire la somme de ses chiffres, à calculer le reste r de cette somme modulo n et à affecter l'entier x à la classe r.

Dans le cas où n = 2, le placement de l'entier x dans l'une des deux classes d'indice 0 ou 1 se fait selon que le x-ème terme de la suite de Prouhet-Thue-Morse est 0 ou 1. Par exemple, les 8 premiers entiers sont répartis en : 1, 4, 6, 7 d'une part, et en 2, 3, 5, 8 d'autre part, et la somme des puissances k-ème des entiers de ces deux classes coïncide jusqu'à k = 2.

Leonard Eugene Dickson consacre un chapitre de son Histoire de la théorie des nombres aux « Sets of integers with equal sums of like powers »[4], et liste pas moins de 70 articles sur ce sujet. Dans son article historique[5], Edward Maitland Wright note que l'article de Prouhet n'a été redécouvert qu'en 1948.

Les récents développements sont décrits par Peter Borwein et ses coauteurs[6],[7],[8] ; voir aussi l'article de Filaseta et Markovich[9]. Une version en deux dimensions a été étudié par Alpers et Tijdeman (2007).

Propriétés et résultats modifier

  • Si le couple   et   est une solution de degré  , alors pour tout   et tout   le couple est encore une solution du même degré. Ainsi, la solution donne aussi la solution Cette observation permet de normaliser les solutions, en imposant par exemple qu'elles ne contiennent que des entiers positifs ou nuls, et que zéro y figure.
  • On ne connaît pas de solution idéale pour tout degré, mais on sait[6] que pour tout degré  , il existe une solution de taille  .
  • Solutions symétriques : une solution de taille paire   est symétrique si chaque composante est de la forme La solution donnée dans l'introduction est de cette forme.
  • Une solution de taille impaire est symétrique si les composantes de la solution sont opposées, c'est-à-dire  et  

Solutions idéales et symétriques modifier

Des solutions idéales et symétriques sont connues pour les degrés  , sauf pour  [10] :

  •  
 
  •  
 
  •  
 
  •  
 
  •  
 
  •  
 
  •  
 
  •  
 
  •  
 

Cette dernière solution est donnée, avec d'autres, dans Borwein et al. (2003). Aucune solution idéale n'est connue pour  .

Une formulation algébrique modifier

Il existe une façon plus algébrique de formuler le problème[11] :

Proposition —  Les conditions suivantes sont équivalentes :

  1.  
  2.  
  3.  

Notes et références modifier

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Prouhet–Tarry–Escott problem » (voir la liste des auteurs).

Notes modifier

  1. Borwein (2002), p. 85
  2. Solution donnée par Nuutti Kuosa, Jean-Charles Meyrignac et Chen Shuwen, en 1999, voir The Prouhet-Tarry-Escott problem.
  3. M. E. Prouhet, Mémoire sur quelques relations entre les puissances des nombres, C. R. Acad. Sci. Paris, série I, vol. 33, 1851, p. 225.
  4. (en) Leonard Eugene Dickson, History of the Theory of Numbers (en) [détail des éditions], vol. 2, 1919, chap. XXIV, p. 705-716.
  5. Wright (1959)
  6. a et b Borwein et Ingalls (1944)
  7. Borwein (2002)
  8. Borwein, Lisonĕk et Percival 2003
  9. (en) Michael Filaseta et Maria Markovich, « Newton polygons and the Prouhet–Tarry–Escott problem », Journal of Number Theory, vol. 174,‎ , p. 384–400 (DOI 10.1016/j.jnt.2016.10.009).
  10. Borwein (2002) et The Prouhet-Tarry-Escott problem.
  11. Voir Borwein et Ingalls (1944) pour des références.

Références modifier

  • (en) Andreas Alpers et Robert Tijdeman, « The two-dimensional Prouhet-Tarry-Escott problem », J. Number Theor., vol. 123,‎ , p. 403-412
  • (en) Peter Borwein, Computational Excursions in Analysis and Number Theory, New York/Berlin/Heidelberg, Springer, coll. « CMS Books in Mathematics », , 220 p. (ISBN 0-387-95444-9, lire en ligne)
    Le chapitre 11: The Prouhet–Tarry–Escott problem (pages 85-96) est consacré au problème.
  • (en) Peter Borwein et Colin Ingalls, « The Prouhet-Tarry-Escott problem revisited », Enseign. Math., vol. 40, nos 1-2,‎ , p. 3-27 (lire en ligne)
  • (en) Peter Borwein, Petr Lisonĕk et Colin Percival, « Computational investigations of the Prouhet-Tarry-Escott problem », Math. Comp., vol. 72, no 244,‎ , p. 2063-2070 (lire en ligne)
  • (de) Albert Gloden (lb), Mehrgradige Gleichungen : Mit einem Vorwort von Maurice Kraitchik, Groningen, P. Noordhoff, (MR 0019638)
  • G. H. Hardy et E. M. Wright (trad. de l'anglais par F. Sauvageot), Introduction à la théorie des nombres [« An Introduction to the Theory of Numbers »], Paris et Heidelberg, Vuibert et Springer,
    La section 20.5 « Le théorème des quatre carrés » traite de ce sujet. Les sections 21.9 « Le problème de Prouhet et Tarry : le nombre   » et 21.10, p. 423-427, sont consacrées au problème de Prouhet-Tarry.
  • (en) Edward M. Wright, « Prouhet's 1851 solution of the Tarry-Escott problem of 1910 », Amer. Math. Monthly, vol. 66,‎ , p. 199-201

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Liens externes modifier