Ninetjer

pharaon égyptien

Ninetjer
Image illustrative de l’article Ninetjer
Fragment du vase de Ninetjer portant son nom de Nebty.
Période Période thinite
Dynastie IIe dynastie
Fonction roi
Prédécesseur Nebrê
Dates de fonction -2790 à -2754 (selon D. B. Redford)
-2785 à -2742 (selon J. von Beckerath)
-2750 à -2707 (selon J. Málek)
Successeur Ouneg

Ninetjer, est le troisième roi de la IIe dynastie pendant la période thinite. Il succède à Nebrê. Manéthon l'appelle Binôthris et lui compte quarante-sept ans de règne. Le Canon royal de Turin lui en compte quatre-vingt-quinze ans. Les égyptologues remettent en question ces deux affirmations comme des interprétations erronées ou des exagérations ; ils attribuent généralement à Ninetjer un règne de quarante-trois ou quarante-cinq ans. Leur estimation est basée sur les reconstructions de l'inscription bien connue de la pierre de Palerme qui rapporte les années 7-21 pour le fragment nommé pierre de Palerme, et les années 36-44 sur le fragment nommé pierre du Caire. On situe son règne de -2790 à -2754[1].

Attestations modifier

 
Nom d'Horus de Ninetjer dans un serekh.

Ninetjer est l'un des grands rois de la IIe dynastie. Son nom apparaît en grand nombre sur des inscriptions sur des récipients en pierre et sur des sceaux d'argile provenant de sa tombe à Saqqarah. Un grand nombre d'objets portant son nom a également été trouvé dans la tombe du roi Péribsen à Abydos et dans les galeries sous la pyramide à degrés du roi Djéser. Cependant, la datation de certaines inscriptions, en particulier celles à l'encre noire, a posé quelques problèmes. Des archéologues comme Ilona Regulski soulignent que les inscriptions à l'encre sont un peu plus tardives que les sceaux et les inscriptions gravées sur la pierre. Elle date les marques à l'encre des règnes des rois tels que Khâsekhemoui et Djéser et suppose que les artefacts proviennent d'Abydos. En fait, des vases en albâtre et des pots en terre avec des inscriptions à l'encre noire au dessin très similaire montrant le nom de Ninetjer ont été trouvés dans la tombe de Péribsen[2],[3].

Le nom de Ninetjer apparaît également sur une inscription rocheuse près d'Abou Handal en Basse-Nubie. Cela pourrait représenter un indice que Ninetjer a envoyé une expédition militaire dans cette région, bien que l'inscription ne fournisse que des informations limitées[4].

Identité modifier

Ninetjer est communément identifié avec les noms ramessides Banetjer de la liste d'Abydos, Banetjerou de la table de Saqqarah et ...netjeren du Canon royal de Turin. L'inscription sur la pierre de Palerme présente un nom doré inhabituel de Ninetjer : Ren-nebou, signifiant « progéniture dorée » ou « veau d'or ». Ce nom apparaît déjà sur des artefacts contemporains de Ninetjer et des égyptologues tels que Wolfgang Helck et Toby Wilkinson pensent qu'il pourrait s'agir d'une sorte de précurseur du nom d'Horus d'or qui a été établi dans la titulature royale au début de la IIIe dynastie sous le roi Djéser[5].

Règne modifier

 
Pierre de palerme présentant les années sept à vingt-et-un du roi Ninetjer.

La plupart des informations connues sur le règne de Ninetjer se trouvent sur les principaux fragments de la Pierre de Palerme de la IIe dynastie. La Pierre de Palerme énumère les événements suivants[6] :

  • 7e année : Escorte d'Horus (3e recensement des bovins)...(il manque le reste)
  • 8e année : Apparition du roi ; étirement des cordes (une cérémonie pour une fondation[6]) pour Hor-Ren. Niveau de crue : 1,57 mètre.
  • 9e année : Escorte d'Horus (4e recensement des bovins). Niveau de crue : 1,09 mètre.
  • 10e année : Apparition du roi de Basse et Haute-Égypte ; Race du taureau Apis (pḥrr Ḥp). Niveau de crue : 1,09 mètre.
  • 11e année : Escorte d'Horus (5e recensement des bovins). Niveau de crue : 1,98 mètre.
  • 12e année : Apparition du roi de Basse-Égypte ; deuxième célébration de la fête de Sokar. Niveau de crue : 1,92 mètre.
  • 13e année : Escorte d'Horus (6e recensement des bovins). Niveau de crue : 0,52 mètre.
  • 14e année : Première célébration de Hor-seba-pet (Horus l'étoile dans le ciel) ; Destruction/fondation des villes de Schem-Rê (Le soleil est venu[6]) et Ha (La ville du nord[6]) (la lecture de ce passage du texte fait l'objet de nombreuses discussions, puisque le signe hiéroglyphique d'une houe comme utilisé ici peut vouloir dire destruction ou fondation[6]). Niveau de crue : 2,15 mètres.
  • 15e année : Escorte d'Horus (7e recensement des bovins). Niveau de crue : 2,15 mètres.
  • 16e année : Apparition du roi de Basse-Égypte ; deuxième Race du taureau Apis (pḥrr Ḥp). Niveau de crue : 1,92 mètre.
  • 17e année : Escorte d'Horus (8e recensement des bovins). Niveau de crue : 2,40 mètres.
  • 18e année : Apparition du roi de Basse-Égypte ; troisième célébration de la fête de Sokar. Niveau de crue : 2,21 mètres.
  • 19e année : Escorte d'Horus (9e recensement des bovins). Niveau de crue : 2,25 mètres.
  • 20e année : Apparition du roi de Basse-Égypte ; offrande pour la mère du roi ; célébration de la Fête de l'éternité (cérémonie funéraire[6]). Niveau de crue : 1,92 mètre.
  • 21e année : Escorte d'Horus (10e recensement des bovins)... (il manque le reste).

La Pierre du Caire (autre fragment de la pierre de Palerme) donne les années 36-44. La surface de la dalle de pierre est endommagée. Par conséquent, la plupart des événements sont illisibles, à l'exception de la naissance (création) d'un fétiche d'Anubis et des parties d'une Apparition du roi de Basse et Haute-Égypte[6].

L'ancien historien égyptien Manéthon, plus de 2 000 ans plus tard, appelait Ninetjer Binôthrís et disait que pendant le règne de ce souverain les femmes avaient le droit d'acquérir la dignité royale, ce qui signifie que les femmes pouvaient régner comme un roi. Des égyptologues tels que Walter Bryan Emery supposent que cette référence était une nécrologie aux reines Merneith et Neith-Hotep du début de la Ire dynastie, toutes deux étant censées avoir occupé le trône égyptien pendant plusieurs années car leurs fils étaient trop jeunes pour gouverner[7]. Pendant le règne de Ninetjer, l'événement annuel Escorte d'Horus a été complété par un événement appelé recensement des bovins qui était de la plus haute importance économique pour le royaume égyptien, car c'était la mise en œuvre officielle des collectes annuelles des impôts. Cette nouvelle source de revenus de l'État a été dorénavant maintenue pour tous les temps. L'événement Escorte d'Horus a été abandonné au début de la IIIe dynastie[8].

Fin du règne modifier

 
Fragment d'un vase en diorite mentionnant le nom de Nesout-Nity de Ninetjer et de la déesse Bastet.

Des égyptologues tels que Hans Wolfgang Helck, Nicolas Grimal, Hermann Alexander Schlögl et Francesco Tiradritti pensent que Ninetjer a laissé un royaume qui souffrait d'une administration étatique trop complexe et que Ninetjer a décidé de diviser l'Égypte pour la laisser à ses deux fils (ou, au moins, à deux successeurs) qui allaient diriger deux royaumes séparés dans l'espoir que les deux dirigeants puissent mieux administrer les États[9],[10]. En revanche, des égyptologues comme Barbara Bell pensent qu'une catastrophe économique telle qu'une famine ou une sécheresse de longue durée a affecté l'Égypte à cette époque. Par conséquent, pour résoudre le problème de l'alimentation de la population égyptienne, Ninetjer divisa le royaume en deux et ses successeurs gouvernèrent deux États indépendants jusqu'à ce que la famine prenne fin. Bell cite les inscriptions de la pierre de Palerme, où, selon elle, les archives des crues annuelles du Nil montrent des niveaux constamment bas pendant cette période[11],[12]. La théorie de Bell est maintenant réfutée par des égyptologues tels que Stephan Seidlmayer, qui a corrigé les calculs de Bell. Seidlmayer a montré que les crues annuelles du Nil étaient à leur niveau habituel à l'époque de Ninetjer jusqu'à la période de l'Ancien Empire. Bell avait oublié que les hauteurs des crues du Nil dans les inscriptions de la Pierre de Palerme ne prennent en compte que les mesures des nilomètres autour de Memphis, mais pas ailleurs le long du fleuve. Toute sécheresse durable est donc moins susceptible de constituer une explication[13].

Il n'est pas clair non plus si le successeur de Ninetjer partageait déjà son trône avec un autre souverain, ou si l'État égyptien était divisé au moment de sa mort. Toutes les listes royales connues telles que la table de Saqqarah, le Canon royal de Turin et la liste d'Abydos énumèrent un roi Ouadjenes comme successeur immédiat de Ninetjer et comme prédécesseur d'un roi appelé Sénedj. Après Sénedj, les listes royales diffèrent les unes des autres en ce qui concerne les successeurs. Alors que la table de Saqqarah et le Canon royal de Turin mentionnent les rois Néferkarê-Aâka, Néferkasokar et un roi en lacune comme successeurs immédiats, la liste d'Abydos les ignore et mentionne un roi Djadjay (identique au roi Khâsekhemoui). Si l'Égypte était déjà divisée lorsque Sénedj gagne le trône, des rois comme Sekhemib et Péribsen auraient régné en Haute-Égypte, tandis que Sénedj et ses successeurs auraient régné en Basse-Égypte. Le roi Khâsekhemoui met fin à la division de l'Égypte[14].

Sépulture modifier

Le mastaba S2302 du haut dignitaire Rouaben était autrefois considéré comme le tombeau de Ninetjer, jusqu'à ce que l'on trouve le véritable site funéraire du roi. Les premières interprétations erronées étaient causées par la grande quantité de sceaux d'argile portant le serekh de Ninetjer qui ont été trouvés dans le mastaba de Rouaben. Par conséquent, le mastaba S2302 appartient à Rouaben qui a occupé son poste pendant le règne de Ninetjer.

La tombe de Ninetjer, composée de grandes galeries, se trouve sous la chaussée de la pyramide d'Ounas à Saqqarah et mesure 94 × 106 mètres. La rampe d'accès mène à vingt-cinq mètres de profondeur dans trois galeries en direction est-ouest, s'étendant dans un système labyrinthique d'entrées, de vestibules et de couloirs. Le Deutsches Archäologisches Institut (DAI) a réalisé cinq fouilles et a découvert que la tombe de Ninetjer présente de grandes similitudes architecturales avec la tombe de la galerie B, qui serait le site funéraire de Nebrê ou d'Hotepsekhemoui. Cela a conduit le DAI à la conclusion que Ninetjer s'inspirait de la tombe de son prédécesseur. Cinquante-six couteaux en silex, quarante-quatre rasoirs, quarante-quatre autres lames et des jarres pots à vin et à bière ont été trouvés. La galerie sud était presque intacte et contenait beaucoup d'objets royaux de la vie de Ninetjer, tels que plus de cinquante pots à vin scellés, des filets de transport, des boîtes de rangement en bois et des bouteilles en albâtre décorées. Certaines des jarres à vin proviennent des tombes de la fin de la Ire dynastie. Dans une autre galerie, le masque de la momie et le cercueil d'une femme de l'époque ramesside ont été retrouvés. La tombe de Ninetjer a donc été partiellement réutilisée par la suite. La chambre funéraire principale était située à l'extrémité sud-ouest de la tombe, mais l'ensemble du site est très instable et risque de s'effondrer[15],[16],[17].

Titulature modifier

Règne modifier

On ne possède de lui qu’une petite statuette. La pierre de Palerme consigne des événements ayant eu lieu sous son règne, entre l'an six et l'an vingt-six, parmi lesquels les fêtes de diverses divinités, la course du taureau Apis en l'an neuf, une campagne militaire en l'an treize. Au cours de celle-ci a eu lieu « la destruction de la cité de Shem-Rê et de la Maison-du-Nord ». En l'an quinze survient la naissance de Khâsekhemoui, l'héritier du royaume. Par ailleurs, Manéthon écrit qu'il fut alors décidé que les femmes pourraient désormais occuper le trône. Mais cela s'était déjà produit avec Merneith, sous la Ire dynastie.

Les successeurs de Ninetjer, Ouneg et Sénedj, ne sont pas très connus sauf dans les listes royales, ou sur des inscriptions gravées sur des vases provenant de la pyramide de Djéser.

Notes et références modifier

  1. Selon D. B. Redford. Autres avis de spécialistes : -2785 à -2742 (J. von Beckerath), -2750 à -2707 (J. Málek).
  2. Flinders Petrie, Royal Tombs of the Earliest Dynasties, Egypt Exploration Fund, London 1901. Chapter II, obj. 8, p. 12–13.
  3. Ilona Regulski, « Second Dynasty Ink Inscriptions from Saqqara », dans Stan Hendrickx & Barbara Adams, Egypt at its Origins, Leuven, Peeters Publishers, (ISBN 90-429-1469-6), p. 949 - 970.
  4. Z. Zaba, The Rock Inscriptions of Lower Nubia. Czechoslovak Institute of Egyptology, Praha 1974, p. 30-31.
  5. Wolfgang Helck, Untersuchungen zur Thinitenzeit - Ägyptologische Abhandlungen, vol. 45, Wiesbaden, Otto Harrassowitz, (ISBN 3-447-02677-4), p. 116 & 117.
  6. a b c d e f et g Siegfried Schott , Altägyptische Festdaten, Verlag der Akademie der Wissenschaften und der Literatur, Mainz/Wiesbaden 1950, p. 59–67. Voir aussi Francesco Raffaele, Ninetjer (nswt-bity Nynetjer).
  7. Walter Bryan Emery, Ägypten - Geschichte und Kultur der Frühzeit, Wiesbaden, Fourier-Verlag, (ISBN 3-921695-39-2), p. 104 & 175.
  8. Petra Andrassy, Untersuchungen zum ägyptischen Staat des Alten Reiches und seinen Institutionen (= Internet=Beiträge zur Ägyptologie und Sudanarchäologie XI), Berlin/London, (ISBN 978-1-906137-08-3), p. 16 online.
  9. Nicolas Grimal, A History of Ancient Egypt, Weinheim, Wiley-Blackwell, (ISBN 978-0-631-19396-8), p. 55.
  10. Francesco Tiradritti & Anna Maria Donadoni Roveri, Kemet: Alle Sorgenti Del Tempo, Milano, Electa, (ISBN 88-435-6042-5), p. 80–85.
  11. Barbara Bell, « Oldest Records of the Nile Floods », dans : Geographical Journal, no 136, 1970, p. 569–573.
  12. M. Goedike, Journal of Egypt Archaeology, no 42, 1998, p. 50.
  13. Stephan Seidlmayer, Historische und moderne Nilstände: Untersuchungen zu den Pegelablesungen des Nils von der Frühzeit bis in die Gegenwart, Berlin, Achet, (ISBN 3-9803730-8-8), p. 87–89.
  14. Hermann Alexander Schlögl, Das Alte Ägypten: Geschichte und Kultur von der Frühzeit bis zu Kleopatra, Hamburg, Beck, (ISBN 3-406-54988-8), p. 77-78 & 415.
  15. Walter Bryan Emery, Ägypten - Geschichte und Kultur der Frühzeit, Wiesbaden, Fourier-Verlag, (ISBN 3-921695-39-2), p. 104-105.
  16. Toby A. H. Wilkinson, Early Dynastic Egypt: Strategies, Society and Security, London/New York, Routledge, (ISBN 0-415-26011-6), p. 85–87.
  17. J. Van Wetering, « The royal cemetery of Early Dynasty Period at Saqqara and the Second Dynasty Royal Tombs », dans Stan Hendrickx, Egypt at its Origins, Leuven, Peeters Publishers, (ISBN 90-429-1469-6), p. 1065–1066.

Lien externe modifier