Naum Tiufekchiev (en bulgare : Наум Тюфекчиев, romanisé Naum Tûfekčiev), né le à Resen, dans l'Empire ottoman est un révolutionnaire artificier, tacticien et marchand d'armes anarchiste bulgare et macédonien. Il est un membre et un dirigeant de l'Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne (VMRO).

Naum Tiufekchiev
Naum Tiufekchiev entre 1903 et 1908
Biographie
Naissance
Décès
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SofiaVoir et modifier les données sur Wikidata
Activité
signature de Naum Tiufekchiev
Signature

Il sert à la fois d'enseignant dans des méthodes de guérilla urbaine, dans des méthodes de terrorisme, dans la pyrotechnie et comme plaque tournante d'armements. Il participe aussi à des complots, des attentats et des assassinats dans les Balkans. Il assassine, entre autres, Stefan Stambolov, premier ministre bulgare qui persécute la VMRO et qui est accusé de chercher un rapprochement important avec l'Empire ottoman.

En plus de l'anarchisme, il défend une réunion des Macédoniens et des Bulgares, et milite pour la libération de la Macédoine du Nord du joug ottoman. Il s'engage en outre dans de nombreuses collaborations avec des mouvements révolutionnaires étrangers, comme le Comité union et progrès (CUP), la Fédération révolutionnaire arménienne (FRA), les Frères rouges bulgares et le Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR). Il transmet ou vend son savoir faire d'artificier et des armes à de nombreux mouvements, et est à l'origine, entre autres, des premiers ateliers d'artificiers révolutionnaires dans l'Empire russe.

Il meurt assassiné par Todor Aleksandrov, le dirigeant de l'Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne (VMRO), dans le cadre de guerres de factions au sein de l'organisation, le à Sofia, en Bulgarie.

Biographie modifier

Il naît à Resen, alors sous contrôle ottoman, le . Il étudie la pyrotechnie à Liège, en Belgique[1].

En 1891, il fait partie du complot visant à assassiner Stefan Stambolov, le premier ministre bulgare de l'époque critiqué pour ses méthodes autoritaires, son soutien à l'Empire ottoman et la répression lancée à l'égard de la VMRO[2],[3], aux côtés, notamment, de ses deux frères et de Dimitar Rizov (en). L'attentat échoue, mais parvient à tuer le ministre des finances, Hristo Belchev[1],[4],[5]. Son frère Dencho est pris et torturé, puis meurt en détention, mais Naum parvient à s'enfuir en Serbie puis à Odessa et est condamné à mort par contumace[1].

En 1892, il rejoint Constantinople avec de faux papiers au nom de Ivan Hristo. Il y assassine le médecin et diplomate bulgare Georges Vulkovich, un ami de Stefan Stambolov[1],[6]. Il s'enfuit et retourne dans l'Empire russe et est condamné à 15 ans de prison par contumace dans l'Empire ottoman[1]. Les services secrets bulgares l'accusent d'avoir été en lien avec les services secrets russes pour faire cet attentat[7].

En 1894, il fonde, avec d'autres personnalités, la Société littéraire des Jeunes Macédoniens[8].

Il retourne en Bulgarie après que Stefan Stambolov a perdu le pouvoir et participe au complot qui l'assassine finalement, le [1],[5]. Il est acquitté, faute de preuves[1]. En 1903, il est élu président d'un comité d'action de l'Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne (VMRO), où il représente la tendance anarchiste et participe à l'Insurrection d'Ilinden contre l'Empire ottoman[9],[10],[11]. Dans ce cadre, il s'implique aussi en Albanie contre l'Empire ottoman[10] et entretient des liens avec Faik Konica (en), le dirigeant des révolutionnaires albanais[12].

En plus de l'anarchisme, Naum Tiufekchiev soutient les positions de Boris Sarafov (en) et milite pour la réunion des Macédoniens et des Bulgares, ce qui, au sein de la VMRO, est appelé le sarafisme[13].

Après la mort de son fils Alexandre, au début des années 1900, il donne 5000 levs bulgares à un évêque orthodoxe en Macédoine du Nord, pour qu'il les distribue en son honneur aux « pauvres macédoniens »[14].

En 1905, il reçoit une délégation d'anarchistes russes en Bulgarie à qui il enseigne les fondamentaux de la pyrotechnie, pour qu'ils soient capables de mettre en place des laboratoires directement dans l'Empire russe[15]. En 1909, il rencontre des dirigeants de la Fédération révolutionnaire arménienne (FRA) à qui il fournit un « nombre important d'explosifs » ainsi que des fusils et des pistolets autrichiens, selon un rapport de l'Okhrana, la police secrète de l'Empire russe[16]. Ils parviennent à transporter les explosifs et les armes en Arménie ottomane et en Arménie russe après les avoir embarqué sur un navire à vapeur qui accoste à Batoumi, en Géorgie[16].

Il entretient aussi des liens importants avec les bolchéviks, qui le consultent, il dirige ainsi le futur général soviétique, qui est alors chimiste, Georges Skosarevskii et reçoit le dirigeant de l'organisation terroriste du mouvement bolchévik, Nicolas Burenin (en), à plusieurs reprises[17]. Ce dernier le mentionne dans ses mémoires et déclare à son sujet[18] :

« En Macédoine, les participants à la lutte de libération nationale contre les esclavagistes turcs ont utilisé des bombes à main d'un type spécial. Tiufekchiev occupait une place prépondérante à Sofia, se tenait complètement ouvert et je l'ai trouvé sans trop de difficulté. Au lieu d'un mot de passe, Omega m'a donné une partie astucieusement découpée d'une carte de visite. La deuxième partie de cette carte de visite était avec Tiufekchiev. Après avoir comparé les deux parties, il était convaincu au nom de qui j'étais venu. Tiufekchiev m'a reçu cordialement, m'a escorté jusqu'à son bureau et a commencé à ouvrir et tirer les tiroirs de son grand bureau devant moi. Je n'en croyais pas mes yeux : toutes les caisses étaient pleines d'armes de toutes sortes - chargeurs, cartouches, armes à feu. Tiufekchiev m'a promis une assistance complète dans l'achat d'explosifs en France. »

En , Naum collabore avec les services secrets turcs du Parti union et progrès (CUP) et participe à un attentat dans un casino, visant à la fois le tsar de Russie, Nicolas II, et le roi de Bulgarie, Ferdinand. L'attentat échoue mais blesse 8 personnes et en tue 4, dont le fils du général bulgare Kliment Boyadjiev et une des filles du général Ivan Fichev[1].

Il meurt assassiné par Todor Aleksandrov, le dirigeant de l'Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne (VMRO), dans le cadre de guerres de factions au sein de l'organisation, le à Sofia, en Bulgarie[1].

Références modifier

  1. a b c d e f g h et i (bg) Стоян Тачев, « Наум Тюфекчиев – българският терорист на руска и турска служба », sur Българска история,‎ (consulté le )
  2. Blagovest Nyagulov, « Ideas of federation and personal union with regard to Bulgaria and Romania », Bulgarian Historical Review, nos 3–4,‎ , p. 36–61 (ISSN 0204-8906, lire en ligne)
  3. (en) Symeon A. Giannakos, « Bulgaria's Macedonian dilemma », Journal of Southern Europe and the Balkans, vol. 3, no 2,‎ , p. 153–170 (ISSN 1461-3190 et 1469-963X, DOI 10.1080/14613190120088565, lire en ligne, consulté le )
  4. (en) Venelın Terziev, « LITERATURE AS HISTORY AND EDUCATION IN THE MODERN BULGARIAN SOCIETY OF THE 20TH CENTURY », IJAEDU- International E-Journal of Advances in Education, vol. 8, no 24,‎ , p. 213–218 (ISSN 2411-1821 et 2411-1821, DOI 10.18768/ijaedu.1198801, lire en ligne, consulté le )
  5. a et b Dobrinka Parusheva, « The Web of Power and Power of the Webs: Political Elites in Romania and Bulgaria in the Late Nineteenth Century and Their Networks », Nathalie Clayer and Tassos Anastassiadis (eds), Society and Politics in South-Eastern Europe during the 19th century, Alpha Bank Historical Archives, Athens 2011, 141-176,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. (en) Charles et Barbara Jelavich, « The Occupation Fund Documents: A Diplomatic Forgery », American Slavic and East European Review, vol. 12, no 3,‎ , p. 343–349 (ISSN 1049-7544 et 2326-4985, DOI 10.1017/S1049754400006659, lire en ligne, consulté le )
  7. FERDINAND, O. P. ДИПЛОМАТИЧЕСКИ ОПИТИ ЗА МЕЖДУНАРОДНОТО ПРИЗНАВАНЕ НА КНЯЗ ФЕРДИНАД 1890-1892 ГОДИНА. ТОМ ХLIII, КНИГА 2, 2014 О Б Щ Е С Т В Е Н И Н А У К И, 35. https://btu.bg/images/Annual/annual_uaz_book_2_2014.pdf#page=37
  8. "100 years IMORO", prof. Dimitŭr Minchev, prof. Dimitŭr Gotsev, Macedonian scientific institute, 1994, Sofia, p. 37; (Bg.)
  9. Maria Nikolova, « Участието на Петър Манджуков в национално-освободителното движение в Смолянско през 1903 година (по негови спомени) », Македонски преглед, no 3,‎ , p. 131–138 (ISSN 0861-2277, lire en ligne, consulté le )
  10. a et b Fabio Bego, « Албано-българските отношения в рамките на Голямата война: инициативи, съмнения и провали », Македонски преглед, no 4,‎ , p. 67–90 (ISSN 0861-2277, lire en ligne, consulté le )
  11. « Писма от дейци на Върховния македонски комитет и на българските македоно-одрински революционни комитети в архива на д-р Константин Стоилов (1895-1898 г.) », Македонски преглед, no 4,‎ , p. 101–128 (ISSN 0861-2277, lire en ligne, consulté le )
  12. Vladimir Zlatarsky, « Първият коалиционен разрив. Спорът между България и Австро-Унгария в началото на 1916 г. », Епохи, vol. XXV, no 2,‎ , p. 398–416 (ISSN 1310-2141 et 2534-8418, lire en ligne, consulté le )
  13. Slavi Slavov, « Сарафизмьт като течение във Вътрешната македоно-одринска революционна организация », Исторически преглед, nos 1-2,‎ , p. 60–95 (ISSN 0323-9748 et 2815-3391, lire en ligne, consulté le )
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  16. a et b Houri Berberian, Roving revolutionaries: Armenians and the connected revolutions in the Russian, Iranian, and Ottoman worlds, University of California Press, (ISBN 978-0-520-27894-3 et 978-0-520-27893-6)
  17. Anna Geifman, Thou shalt kill: revolutionary terrorism in Russia, 1894 - 1917, Princeton Univ. Press, (ISBN 978-0-691-08778-8 et 978-0-691-02549-0)
  18. « Боевая техническая группа при ЦК РСДРП (б) », sur lenin-pam.narod.ru (consulté le )