Marcel Degliame, né le à La Cassine (Ardennes) et mort le à Sennevières (Indre-et-Loire)[1], est un ouvrier, un syndicaliste, un résistant français, Compagnon de la Libération, un historien de la Résistance, un administrateur de théâtre, un producteur de film et un ami de Boris Vian.

Biographie modifier

Premières années et syndicalisme modifier

Il est né deux jours avant Noël, le , à La Cassine (Ardennes), d'un père bûcheron et d'une mère couturière[2], septième enfant du couple. En , au déclenchement de la Première Guerre mondiale, son père est mobilisé. Son épouse et ses enfants s'enfuient devant l'invasion du département par les troupes allemandes, et s'installent dans l'Aube. La famille reste installée dans l'Aube après la guerre, à Vendeuvre-sur-Barse. Marcel Degliame, certificat d'études en poche est apprenti ébénisterie dans la commune puis, à 17 ans, ouvrier bonnetier à Troyes. Puis il monte à Paris, en 1934, ouvrier textile toujours, et se lance dans le syndicalisme. Il prend des responsabilités à la fédération du textile CGTU puis CGT, et adhère au Parti communiste français (PCF) dès 1928[3]. Il se marie une première fois avec Berthe Goutverg le à Paris. Il est condamné et emprisonné en octobre- pour son rôle dans des grèves[4].

Au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, il est mobilisé en 1939 dans l'infanterie. Il est fait prisonnier par les Allemands. Transféré dans un stalag en Europe centrale, à Teplice, il réussit à s'en extraire, à sa deuxième tentative d'évasion, en pour gagner, avec sept de ses compagnons d'évasion, la Syrie, après avoir traversé, malgré la neige, les montagnes des Carpates, puis la Roumanie, et la Turquie[5]. Là, il refuse d'être enrôlé dans les forces françaises fidèles au régime de Vichy, commandées par le général Dentz. Mettant en avant son état de faiblesse, il se fait hospitaliser à Beyrouth puis rapatrier en France par le bateau-hôpital Canada. Il débarque à Marseille le , mais il s'est procuré une lettre d'introduction auprès de Claude Bourdet[5],[6],[3]

La Résistance modifier

Sa rencontre avec Claude Bourdet le décide à rejoindre le mouvement de résistance Combat[7]. Il est chargé de la diffusion du journal du mouvement de résistance dans la zone Marseille-Nice[6] et il en devient rapidement l'un des plus importants responsables, notamment chargé de l'organisation, du recrutement et de la propagande. En , il échappe à la police une première fois. Arrêté à nouveau quelques mois plus tard par la police française, il réussit à s'échapper[6]. À Lyon, il travaille à l'édition de journaux et de tracts avec André Bollier. En , il fonde des groupes de sabotage dans les entreprises travaillant pour les Allemands[5], puis de groupes de sabotages ferroviaires. Il est un des cadres des Mouvements Unis de Résistance (MUR), nés de la fusion entre les trois grands mouvements de Résistance de zone Sud : Combat, Franc-Tireur et Libération-Sud. Ainsi en contact avec les autres mouvements de la Résistance, et utilisant ses liens avec le mouvement communiste, il participe à la constitution des Forces françaises de l'intérieur (FFI). Il représente Combat au sein du Conseil national de la Résistance (CNR)[5], y remplaçant Claude Bourdet arrêté par la Gestapo[7]. En , le général Koenig l'élève, depuis Londres mais en accord avec le délégué militaire pour la zone sud, Maurice Bourgès-Maunoury, au grade de lieutenant-colonel. Sous les surnoms de Fouché et parfois de Dormoy, il parcourt le territoire français en tous sens jusqu'au débarquement allié[8], puis participe à la libération de Lyon où il prend une part déterminante[5].

Après-guerre modifier

Il est fait compagnon de la Libération en . Il est délégué à l'Assemblée consultative provisoire et secrétaire de la commission de la défense. À ce titre, il s'occupe de l'intégration des FFI dans la 1re armée commandée par le général de Lattre de Tassigny. Puis, jusqu'en 1948, il est gouverneur militaire du district de Constance, dans le cadre de la mission d'occupation de cette région de l'Allemagne confiée aux troupes françaises[5].

Après la guerre, il fait carrière aux usines d'aviation de la SNECMA. En , il se remarie avec Jeanne Marie Eugénie Andrieu. En 1952, Marcel Degliame quitte sans éclat le Parti communiste français. De 1951 à 1956, il devient administrateur et codirecteur du Théâtre de Babylone. Il y fréquente de jeunes artistes, dont Jean-Marie Serreau, Michel Piccoli et Éléonore Hirt, et y fait la connaissance en de Boris Vian. Ils deviennent très proches, Boris Vian ayant une affection et une estime particulière pour celui qu'il surnomme «Frère Marcel»[9], malgré leur différence de parcours : « Boris ne possédait que de vagues notions politiques. Il n'avait fait aucune lecture dans ce domaine » témoignera ainsi Marcel Degliame[10].

Il crée ensuite une société de production de films, Les Films d'Aujourd'hui, assurant notamment la production de films de Pierre Kast : Le Bel Âge[11]... Il entre à l'ORTF et y travaille au service des coproductions[12]. Il y suit notamment la réalisation du film Le Chagrin et la Pitié, dans lequel il témoigne, même si la télévision française refuse en définitive d'acheter les droits du film. Il se remarie une troisième fois le , au milieu des vignobles bourguignons, à Pernand-Vergelesses, avec Jeannine Manuel[13]. À partir de la fin des années 1960, il rédige en collaboration avec Henri Noguères et, pour les deux premiers volumes, Jean-Louis Vigier, une histoire de la Résistance qui fait référence, plusieurs décennies après les faits, mais alors que les principaux intervenants sont encore vivants[14],[15],[16].

Il prend sa retraite dans une maison de campagne située à Sennevières, accompagnée de sa femme Jeannine. Il y partage son temps entre l'écriture et des travaux de menuiserie et de jardinage[7]. Marcel Degliame décède en à Loches. Il est incinéré à Esvres-sur-Indre[5].

Publications modifier

Distinctions modifier

Références modifier

  1. « matchID - Moteur de recherche des décès », sur deces.matchid.io (consulté le )
  2. a et b « Marcel DEGLIAME », sur Musée de l'Ordre de la Libération (consulté le )
  3. a et b Le Monde 1989.
  4. Barbe 2013, p. 56-60.
  5. a b c d e f et g Site de l'Ordre de la Libération
  6. a b et c Barbe 2013, p. 57.
  7. a b et c Bourdet 1989.
  8. Barbe 2013, p. 58.
  9. Marchand 2009.
  10. Boggio 1993, p. 145.
  11. « Marcel Degliame », sur Unifrance Films International
  12. Barbe 2013, p. 59.
  13. Barbe 2013, p. 60.
  14. a et b Duhamel 1967.
  15. a et b Théolleyre 1976.
  16. a et b Roussel 1982.
  17. Gillet 1973.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Marie-France Barbe, « Une figure originaire de La Cassine, Marcel Degliame », Le Petit Cassinois, no 38,‎ , p. 56-64.
  • Michel Fratissier, Jean Moulin ou la fabrique d'un héros, Éditions L'Harmattan, , 755 p., p. 165, 516, 705.
  • Valère-Marie Marchand, Boris Vian, le sourire créateur, Éditions Écriture, , 500 p. (lire en ligne).
  • Maurice Kriegel-Valrimont, Mémoires rebelles, Éditions Odile Jacob, , 264 p., p. 39, 42, 51-53, 87-89, 214.
  • Marc Lapprand, Boris Vian, la vie contre, Presses de l'Université d'Ottawa, , 138, 145, 224.
  • Bruno Permezel, Résistants à Lyon, Éditions BGA Permezel, , 556 p., p. 151.
  • Philippe Boggio, Boris Vian, Flammarion,

Articles de journaux modifier

Liens externes modifier