Glacier de l'Allalin

Glacier de l'Allalin
Langue du glacier de l'Allalin.
Langue du glacier de l'Allalin.

Pays Drapeau de la Suisse Suisse
Canton Valais
District Viège
Massif Alpes pennines (Alpes)
Vallée Saastal
Cours d'eau Saaser Vispa
Type Glacier de vallée
Longueur maximale 6,3 km (2010)
Superficie 9,3 km2 (2010)
Altitude du front glaciaire 2 750 m
Coordonnées 46° 02′ 48″ N, 7° 55′ 40″ E

Géolocalisation sur la carte : Suisse
(Voir situation sur carte : Suisse)
Glacier de l'Allalin
Géolocalisation sur la carte : canton du Valais
(Voir situation sur carte : canton du Valais)
Glacier de l'Allalin

Le glacier de l'Allalin, en allemand Allalingletscher, se trouve en Suisse dans le canton du Valais. Il se trouve à l'ouest du barrage du Mattmark dans le Saastal. Il mesure 6,5 kilomètres de long et atteint une largeur de 1,5 kilomètre. Sa superficie est d'environ 9,3 km2. Depuis 1850, le recul estimé est de 1,7 km[1].

Géographie modifier

 
L'Allalinhorn avec à gauche le névé à l'origine du glacier du Hohlaub.

Le glacier est issu des névés accrochés au versant nord du Strahlhorn (4 190 m) et du Fluchthorn (3 794 m). Il entame une descente sur l'axe nord-est avant de bifurquer vers l'est, son avancée vers le nord étant bloquée par l'Allalinhorn (4 027 m). À l'ouest, le glacier de l'Allalin est relié au glacier de Mellich via le col de l'Allalin (Allalinpass) (3 564 m). La langue glaciaire aboutit à l'ouest du barrage du Mattmark à une altitude d'environ 2 750 mètres (état en 2007). De la langue émerge le torrent de la Saaser Vispa qui descend ensuite dans le Saastal avant de rejoindre le Rhône en plaine.

Dans sa partie médiane, le glacier évolue parallèlement au glacier du Hohlaub d'environ 3,5 kilomètres de long et 1 kilomètre de large. Ils étaient auparavant liés. Le glacier du Hohlaub part depuis le flanc nord de l'Allalinhorn (4 027 m) et longe le Hohlaubgrat qui le sépare du glacier de l'Allalin.

Topographie et dynamique glaciaire modifier

Le glacier de l'Allalin est marqué par des mouvements importants au cours de son histoire[2],[3]. Lors des périodes d'extension maximale, le glacier envahit la vallée au niveau de Mattmark. Il est fréquent que ce phénomène entraîne la création de lac glaciaire et augmente le risque de débâcle. À l'inverse, lors des phases de recul, le glacier se retire sur des zones en surplomb de la vallée, prenant une position relativement similaire à celle d'un glacier suspendu.

Dans ses phases de retrait, le glacier de l'Allalin occupe une zone à forte pente[2]. Les observations montrent par ailleurs un important travail d'érosion du glacier sur les roches à ce niveau. Le profil lisse de ces parois n'offre que peu d'appui et d'accroche pour la masse glaciaire.

Le glacier de l'Allalin est réputé pour son instabilité[2],[4]. C'est un glacier dont la température relativement élevée entraîne un phénomène de fonte important à sa base. Le ruissellement de ces eaux réduit les frottements entre la masse glaciaire et la roche, favorisant le glissement de pans du glacier.

Comme l'ensemble des glaciers alpins, le glacier de Mattmark connaît une phase de recul importante depuis plusieurs années. La topographie des lieux impose toutefois des contraintes particulières pouvant occasionner des avancées temporaires comme en [5]. Les volumes des neiges hivernales influencent également cette dynamique, pouvant ralentir le phénomène par rapport à ce qui est constaté dans d'autres régions alpines[6].

 
Évolution du glacier en mètres. En vert, les différences de longueur cumulées. En rouge, les variations de longueur annuelles.

Catastrophes naturelles et risques modifier

Débâcle et crue modifier

Pendant le petit âge glaciaire, le glacier de l'Allalin descendait jusqu'au fond de la vallée et bloquait le passage des eaux, formant ainsi un lac glaciaire similaire à celui du glacier du Giétro. Ce phénomène était à l'origine de débâcles glaciaires qui inondaient la vallée et provoquait de nombreux dégâts et victimes. Entre 1589 et 1850, les documents rapportent 26 vidanges importantes et brutales. Au XVIIe siècle, le danger atteint son paroxysme, forçant même la population la plus exposée à quitter la vallée[7].

En 1926, ce danger fut en partie écarté grâce à la réalisation d'une galerie d'évacuation des eaux du côté est de la vallée. Mais le glacier fut à l'origine d'une autre menace puisque la stabilité dans sa partie terminale diminua. La masse de glace n'était en effet plus supportée par la barrière glaciaire présente au fond de la vallée et le glacier s'arrêtait désormais dans une pente abrupte.

Catastrophe de Mattmark modifier

 
Mémorial dédié aux 88 victimes de la catastrophe de Mattmark, le .

Le , un partie du glacier de l'Allalin s'effondre et provoque un important éboulement de glace, de roches et de terre qui enseveli une partie du chantier du barrage de Mattmark[8],[9]. Au total, 88 ouvriers sont tués, principalement des immigrés. Cette catastrophe met en lumière l'importance de l'immigration pour la construction des infrastructures suisses ainsi que les conditions de travail parfois précaires sur ces chantiers.

Chronologie des principaux évènements[10] modifier

 
Vue du barrage et du lac de Mattmark. La catastrophe de 1965 a eu lieu sur le site du barrage.
  •  : inondations et destruction de la route de la vallée
  • 1626 : inondations importantes menant à l'évacuation d'une partie de la population
  • 1629, 1630 : inondations et dégâts dans la vallée
  •  : inondations importantes, 18 maisons et 6 000 arbres détruits ou endommagés, la moitié de la population de la vallée doit quitter les lieux
  • 1680 : des crues au cours de l'été détruisent des ponts et provoquent des dégâts dans la vallée
  • 1719, 1724, 1733, 1740 : inondations
  • 1752, 1755, 1764, 1766 : inondations, en 1755 elles se produisent en hiver alors que le phénomène a habituellement lieu en été
  •  : une crue soudaine endommage 18 habitations
  • 1790, 1793, 1798, 1808, 1827 : inondations
  • 1828, 1834, 1837, 1839, 1850 : inondations
  • 1920-1922 : quelques inondations mineures
  • 1949 : une chute de séracs tue près d'une dizaine de personnes[11].
  •  : 88 personnes sont tuées dans la catastrophe de Mattmark[8],[9]. Une partie de la langue du glacier s'effondre entraînant un éboulement de glace, de rochers et de terre sur le chantier du barrage.
  •  : l'écoulement des eaux est perturbé par de la glace
  •  : effondrement d'une partie de la langue[12]
  •  : effondrement d'une partie de la langue (environ 1 million de m3)[2]

Sports et loisirs modifier

Loisirs modifier

Le glacier de l'Allalin représente une part importante du domaine skiable de la station de Saas-Fee[13],[14]. L'accès au glacier peut se faire par l'intermédiaire d'un funiculaire construit en 1985, qui permet aux visiteurs et skieurs d'accéder à l'altitude de 3 500 mètres. L'exploitation profite par ailleurs de la forte étendue de la zone glaciaire pour proposer du ski d'été[15]. Cette situation permet à de nombreux sportifs de neige de s'entraîner sur le glacier, voire d'y réaliser des performances. Ainsi, la skieuse freestyle fribourgeoise Mathilde Gremaud a réussi le premier 1440 féminin sur le glacier en octobre 2020[16].

Avec sa connexion au sommet de l'Allalinhorn, le glacier est l'un des points de passage de voies d'alpinisme[13],[17].

Événement sportif modifier

En avril, l'« Allalin Abfahrt » se tient sur les pentes du glacier[18]. Il s'agit d'un événement de ski durant lequel les participants doivent réaliser une descente à ski de 9 kilomètres de long et près de 1 800 mètres de dénivelé.

Références modifier

  1. Hilaire Dumoulin, Amédée Zryd, Nicolas Crispini, Glaciers : Passé-présent du Rhône au Mont-Blanc, Éditions Slatkine, coll. « Beaux livres », 2010 (ISBN 978-2832103630)
  2. a b c et d Françoise Funk-Salami, « Le glacier de l'Allalin. Un glacier à problèmes. », Les Alpes,‎ (lire en ligne  )
  3. Vivian (1966), p. 98.
  4. Failletaz et Funk (2013), p. 160 ; 166-169.
  5. agences et Ian, « Le recul des glaciers s'est poursuivi en 2008 », RTS Info,‎ (lire en ligne  )
  6. ATS, « Les glaciers ont souffert de l'été caniculaire », La Liberté,‎ (lire en ligne  )
  7. hochwasser_f.QXD
  8. a et b Sonia Fenazzi, « Mattmark, une page dramatique de l'histoire suisse », Swiss Info,‎ (lire en ligne  )
  9. a et b Xavier Lambiel, « Les sacrifiés de Mattmark ont changé la Suisse », Le Temps,‎ (lire en ligne  )
  10. Naturgefahren Gletscher
  11. Toni Ricciardi et Sandro Cattacin, « À la recherche d'une représentation de la mémoire : les mémoriaux de la tragédie de Mattmark », Cahiers d'histoire du mouvement ouvrier, vol. 33,‎ , p. 117-118 (DOI 10.5169/seals-681758, lire en ligne   [PDF])
  12. Failletaz et Funk (2013), p. 167.
  13. a et b Annie Barbaccia, « Sous l'Allalin, Saas-Fee, le village branché », Le Figaro Voyage,‎ (lire en ligne)
  14. Sylvain Bolt, « La guerre des piquets », 24 Heures,‎ (lire en ligne)
  15. « Suisse, seuls deux glaciers proposent encore du ski d'été », sur weekend.levif.be, .
  16. Mirko Hominal, « Mathilde Gremaud dans l'histoire », sur ski-nordique.net, .
  17. Jean-Charles Gilbert, « L’Allalin (Allalinhorn), Arête E, dite Hohlaubgrat ».
  18. SAW, « Saas-Fee accueille la plus haute descente du monde sur glacier », Le Nouvelliste,‎ (lire en ligne)

Bibliographie modifier

  • Jérôme Failletaz et Martin Funk, « Instabilités glaciaires et prédiction », Mémoires de la Société vaudoise des Sciences naturelles, vol. 25,‎ , p. 159-174. (ISSN 0037-9611, lire en ligne   [PDF]).  
  • Robert Vivian, « La catastrophe du glacier Allalin », Revue de Géographie Alpine, vol. 54, no 1,‎ , p. 97-112 (lire en ligne  ).  

Liens externes modifier