Ghréline

protéine humaine

Ghréline
Image illustrative de l’article Ghréline
Modèle théorique de préproghréline humaine (ex PDB 1P7X[1])
Caractéristiques générales
Nom approuvé Ghrelin And Obestatin Prepropeptide
Symbole GHRL
Homo sapiens
Locus 3p25.3
Masse moléculaire 12 911 Da[2]
Nombre de résidus 117 acides aminés[2]
Entrez 51738
HUGO 18129
OMIM 605353
UniProt Q9UBU3
RefSeq (ARNm) NM_001134941.2, NM_001134944.1, NM_001134945.1, NM_001134946.1, NM_001302821.1, NM_001302822.1, NM_001302823.1, NM_001302824.1, NM_001302825.1, NM_016362.4, XM_017006612.1, XM_017006613.1
RefSeq (protéine) NP_001128413.1, NP_001128416.1, NP_001128417.1, NP_001128418.1, NP_001289750.1, NP_001289751.1, NP_001289752.1, NP_001289753.1, NP_001289754.1, NP_057446.1, XP_016862101.1, XP_016862102.1
Ensembl ENSG00000157017
PDB 1P7X, 6H3E

GENATLASGeneTestsGoPubmedHCOPH-InvDBTreefamVega

Liens accessibles depuis GeneCards et HUGO.

La ghréline est une hormone digestive qui stimule l’appétit[4] : son taux est élevé avant les repas et diminue à mesure que l'estomac se remplit. Elle est considérée comme l'agoniste inverse de la leptine, hormone produite par l'estomac, qui induit la satiété lorsque son taux augmente.

De multiples facteurs[3] peuvent entraîner un déséquilibre hormonal et favoriser l'obésité. Ce déséquilibre met en jeu de nombreux signaux centraux et périphériques impliqués dans la régulation de la prise alimentaire, tels que la ghréline orexigène (régulation à court terme) et la leptine anorexigène (régulation à long terme).

La ghréline est produite et sécrétée principalement par les cellules P/D1 du fundus de l’estomac humain, et, secondairement, par les cellules Epsilon du pancréas.

La ghréline est également produite dans le noyau arqué de l’hypothalamus moyen, où elle stimule la sécrétion de l’hormone de croissance (« GH ») par la glande hypophyse antérieure[5]. À la suite de certaines chirurgies gastriques, les taux moyens postabsorption et postprandial de ghréline diminuent, entraînant une satiété plus rapidement qu’en temps normal (i.e. : sans la déviation gastrique).

Les récepteurs de la ghréline sont exprimés par les cellules neuronales du noyau arqué de l’hypothalamus moyen et de l’hypothalamus ventromédian. Ce récepteur de type métabotropique couplé aux protéines G (GPCR), plus précisément, il s’agit du récepteur sécrétagogue de l’hormone de croissance (GHS). La ghréline joue un rôle significatif dans la neurotrophie, en particulier au niveau de l’hippocampe, et elle est essentielle dans l’adaptation cognitive aux changements d’environnements et dans les processus de l’apprentissage[6]. Récemment, il a été démontré que la ghréline pouvait activer l’isoforme « endothéliale » de l’oxyde nitrique synthase, dans une voie métabolique qui dépend de plusieurs kinases, incluant la sérine/thréonine kinase Akt. Chez le fœtus, il semble que la ghréline est produite précocement par les poumons, en stimulant la croissance[7].

Histoire et nom modifier

La découverte de la ghréline a été faite par le chercheur Masayasu Kojima et ses collègues en 1999[8]. Le nom de l'hormone est basé sur son rôle de peptide activant la sécrétion de l'hormone de croissance, dont la racine serait ghre (growth hormone-releasing peptide) [réf. nécessaire], qui veut dire « grandir ».

Biochimie modifier

Isoformes modifier

La ghréline existe dans une forme endocrinologiquement inactive (peptide « pur »), la ghréline non acylée, et dans sa forme active (octanoylée) (voir Hexatropine), la ghréline acylée[9]. D'autres chaînes latérales que l'octanoyl ont également été observées.

Mécanismes d'action modifier

La ghréline fut la première hormone de régulation de l'appétit à être découverte. La ghréline et les mimétiques synthétiques de la ghréline (GHS) augmentent la prise alimentaire et augmentent la masse adipeuse[10],[11] par une action exercée au niveau du noyau arqué de l'hypothalamus[12],[13], incluant les neurones sensibles au neuropeptide orexigénique Y (NPY)[14]. La sensibilité de ces neurones à la ghréline est à la fois leptino-insulino-dépendante[15]. La ghréline active aussi la voie métabolique mésolimbique-cholinergique-dopaminergique, le circuit de récompense qui communique des signaux hédonistes et de type renforcement positif lié au substrat, comme pour la nourriture, les drogues à forte dépendance ou l'alcool[16],[17],[15].

La forme inactive de la ghréline (ghréline non acylée) en quantité suffisante, limiterait l'efficacité de la forme active et neutraliserait l'effet orexigène de la ghréline active[9].

Concernant la régulation de l'appétit, les critères les plus pertinents seraient les ratios :

  • ratio ghréline acylée (forme active) vs ghréline non acylée (forme inactive)[9]
  • ratio ghréline vs obestatine.
    Le niveau de leptine est également un indicateur important.

Modèle animal modifier

Les modèles sur les animaux de laboratoire indiquent que la ghréline pénétrerait dans l'hippocampe depuis la circulation sanguine, stimulant les facultés de la mémoire et de l'apprentissage[18]. Ainsi, il est suggéré que l'apprentissage serait plus efficace durant la journée, quand l'estomac est vide, car les concentrations de ghréline sont plus élevées. Chez les rongeurs, les cellules imitant les cellules X/A-like produisent la ghréline. En 2011, on démontre chez la souris que la sécrétion de ghréline par les cellules de l'estomac est stimulée par le goût amer, expliquant de ce fait l'action stimulante de l'appétit de certaines boissons apéritives[19].

Des chercheurs ont mis en évidence le rôle de la ghréline dans la prise de décision liée à l'appétit[20]. Publiés dans la revue Neuron, leur travaux, réalisés sur des souris, montrent que les neurones de l'hippocampe utilisent les récepteurs de ghréline pour contrôler leur activité. L'hippocampe des souris affamées a été stimulé par un niveau élevé de ghréline à proximité de la nourriture, avant qu'elles se restaurent. Ce phénomène ne s'est pas produit sur les souris rassasiées, qui n'ont d'ailleurs pas consommé la nourriture présentée.

Relation avec l'obestatine modifier

L'obestatine est une hormone découverte à la fin de l'année 2005, qui diminue l'appétit. La ghréline et l'obestatine sont codées par le même gène, le propeptide initial se brisant pour donner naissance aux deux hormones[21]. La raison de cette même origine génétique pour deux hormones antagonistes demeure inconnue.

Mesure modifier

Une analyse de sang faite en laboratoire permet de mesurer les taux de ghreline acylée et ghréline non acylée[22].

Pathologies reliées modifier

Obésité modifier

Les taux plasmatiques de ghréline chez les individus obèses sont moins élevés que chez les individus d'IMC sain. Yildiz et al. ont montré que le taux plasmatique de ghréline augmentait entre minuit et l'aurore chez les individus de masse corporelle saine, ces découvertes suggérant une hypothétique faille dans le cycle circadien des individus obèses[23].

Le professeur Cappuccio, de l'Université de Warwick, a récemment découvert que la privation de sommeil pouvait conduire à l'obésité. En effet, un manque de sommeil entraîne une production accrue de l'hormone ghréline, qui stimule l'appétit et ce manque de sommeil causerait aussi une diminution de la production de leptine, qui supprime l'appétit. Toutefois, cette étude n'explique pas les faibles taux plasmatiques de ghréline que l'on retrouve dans la population des individus obèses[24].

Anorexie modifier

Les individus souffrant d'anorexie mentale semblent avoir un taux plasmatique de ghréline plus élevé. Ces découvertes suggèrent que la ghréline n'est pas impliquée dans la physiopathologie de ce trouble alimentaire. Au contraire, cette hormone semble plutôt tenter de « corriger » la situation, en quelque sorte.

Cancer modifier

Les niveaux de ghréline sont également plus élevés chez les patients cachéxiques, d'étiologie cancéreuse[25].

Syndrome Prader-Willi modifier

Le syndrome de Prader-Willi est aussi caractérisé par une hausse accrue de la concentration plasmatique de ghréline, parallèlement à une prise alimentaire très importante[26].

Une étude a démontré que la déviation gastrique chirurgicale, en plus de réduire la capacité volumique gastrique pour la nourriture, diminue significativement les niveaux plasmatiques de ghréline[27].

Vaccin anti-obésité modifier

Un vaccin anti-obésité, dirigé spécifiquement contre la ghréline est en cours de test[28],[29]. Ce vaccin utilise le système immunitaire, notamment les anticorps, afin de se lier aux molécules désirées, dirigeant en quelque sorte le système immunitaire contre son propre corps. Cela empêcherait la ghréline d'atteindre le système nerveux central (SNC), produisant en théorie une diminution de l'appétit, et du poids de l'individu obèse.

Articles connexes modifier

Références modifier

  1. (en) « Theoretical Model of Human Ghrelin Precursor », (DOI 10.5452/ma-cfzyt, consulté le ).
  2. a et b Les valeurs de la masse et du nombre de résidus indiquées ici sont celles du précurseur protéique issu de la traduction du gène, avant modifications post-traductionnelles, et peuvent différer significativement des valeurs correspondantes pour la protéine fonctionnelle.
  3. Facteurs génétiques, métaboliques (maladies, médicaments, drogues), psychologiques (stress, troubles des conduites alimentaires), socio-économiques (milieu de vie, éducation alimentaire, sociétés industrielles marquées par une abondance de nourriture et une diminution progressive de la dépense énergétique)...
  4. (en) A Inui, A Asakawa, CY Bowers et al, « Ghrelin, appetite, and gastric motility: the emerging role of the stomach as an endocrine organ », The FASEB Journal, vol. 18, no 3,‎ , p. 439-56 (PMID 15003990, DOI 10.1096/fj.03-0641rev, lire en ligne).
  5. (en) M.S. Mondal, Y. Date, H. Yamaguchi, K. Toshinai, T. Tsuruta, K. Kangawa et M. Nakazato, « Identification of ghrelin and its receptor in neurons of the rat arcuate nucleus », Regul. Pept, vol. 126,‎ , p. 55-59 (DOI 10.1016/j.regpep.2004.08.038).
  6. « Hunger hormone tied to learning » (consulté le ) at The Scientist
  7. (en) M. Santos, P. Bastos, S. Gonzaga, J.M. Roriz, M.J. Baptista, C. Nogueira-Silva, G. Melo-Rocha, T. Henriques-Coelho, R. Jr Roncon-Albuquerque et al., « Ghrelin expression in human and rat fetal lungs and the effect of ghrelin administration in nitrofen-induced congenital diaphragmatic hernia », Pediatr Res, vol. 59, no 4,‎ , p. 531-7 (PMID 16549524, lire en ligne).
  8. (en) M. Kojima, H. Hosoda, Y Date, M Nakazato, H. Matsuo et K. Kangawa, « Ghrelin is a growth-hormone-releasing acylated peptide from stomach », Nature, vol. 402, no 6762,‎ , p. 656-60 (PMID 10604470, lire en ligne).
  9. a b et c Jean-Louis Nandrino, L'anorexie mentale: Des théories aux prises en charge, Dunod, (ISBN 978-2-10-072550-2, lire en ligne), page 202
  10. (en) S. Lall, L.Y. Tung, C. Ohlsson, J.O. Jansson et S.L. Dickson, « Growth hormone (GH)-independent stimulation of adiposity by GH secretagogues », Biochemical and Biophysical Research Communications, vol. 280, no 1,‎ , p. 132-138 (PMID 11162489).
  11. (en) M. Tschöp, D.L. Smiley et M.L. Heiman, « Ghrelin induces adiposity in rodents », Nature, vol. 407, no 6806,‎ , p. 908-913.
  12. (en) A.K. Hewson et SL. Dickson, « Systemic administration of ghrelin induces Fos and Egr-1 proteins in the hypothalamic arcuate nucleus of fasted and fed rats », J Neuroendocrinol, vol. 12, no 11,‎ , p. 1047-1049 (PMID 11069119).
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  14. (en) S.L. Dickson et S.M. Luckman, « Induction of c-fos messenger ribonucleic acid in neuropeptide Y and growth hormone (GH)-releasing factor neurons in the rat arcuate nucleus following systemic injection of the GH secretagogue, GH-releasing peptide-6 », Endocrinology, vol. 138, no 2,‎ , p. 771-777 (PMID 9003014).
  15. a et b (en) A.K. Hewson, L.Y. Tung, D.W. Connell, L. Tookman et S.L. Dickson, « The rat arcuate nucleus integrates peripheral signals provided by leptin, insulin, and a ghrelin mimetic. », Diabetes, vol. 51, no 12,‎ , p. 3412-3419 (PMID 12453894).
  16. (en) E. Jerlhag, E Egecioglu, S.L. Dickson, M Andersson, L. Svensson et J.A. Engel, « Ghrelin Stimulates Locomotor Activity and Accumbal Dopamine-Overflow via Central Cholinergic Systems in Mice: Implications for its Involvement in Brain Reward », Addiction Biology, vol. 11, no 1,‎ , p. 45-54 (PMID 16759336).
  17. (en) E. Jerlhag, E. Egecioglu, S.L. Dickson, A. Douhan, L. Svensson et J.A. Engel, « Ghrelin administration into tegmental areas stimulates locomotor activity and increases extracellular concentration of dopamine in the nucleus accumbens », Addiction Biology, vol. 12,‎ , p. 6-16 (PMID 17407492).
  18. (en) Learning and memory stimulated by gut hormone | Science Blog
  19. (en) S. Janssen et I. Depoortere, Bitter taste receptors... [1]
  20. Coralie Lemke, « La ghréline, hormone de la faim, a un effet direct sur notre prise de décision », sur Sciences et Avenir, (consulté le )
  21. (en) J Zhang, P. Ren, O. Avsian-Kretchmer, C. Luo, R. Rauch, C. Klein et A. Hsueh, « Obestatin, a peptide encoded by the ghrelin gene, opposes ghrelin's effects on food intake », Science, vol. 310, no 5750,‎ , p. 996-9 (PMID 16284174, lire en ligne).
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Voir aussi modifier