Gerard Horenbout

peintre flamand
Gerard Horenbout
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Œuvres principales

Gerard Horenbout (vers 1465 – 1541) est un peintre et enlumineur, actif de 1485 à 1526 environ, vivant probablement à Gand ou peut-être à Bruges. C'est l'un des miniaturistes les plus illustres parmi les primitifs flamands. Il est généralement identifié au Maître de Jacques IV d'Écosse, nom de convention de l'auteur du portrait de Jacques IV d'Écosse ornant les Heures de Jacques IV d'Écosse, un livre d'heures conservé à Vienne[1].

Bréviaire Grimani, le mois de décembre.
Portraits de Lievin van Pottelsberghe et Lievine de Steelandt. Musée des beaux-arts de Gand.

Le « Maître de Jacques IV d'Écosse » est considéré[2] comme le plus éminent enlumineur de la génération ayant vécu entre le Maître viennois de Marie de Bourgogne (actif vers 1460-80) et Simon Bening (1483/1484-1561). Comme le Maître du Livre de prières de Dresde avant lui et Simon Bening après lui, il jouit d’une carrière exceptionnellement longue. Dirigeant un atelier d'artiste, il prend part à l'illustration de manuscrits éminents et fastueux. Un bréviaire à l'usage de Windesheim conservé à Manchester, seul exemple de son style de jeunesse, remonte à 1487. Le calendrier et les portraits du frontispice des Heures Holford, datés de 1526, sont ses dernières miniatures connues[2]. Toutefois peu des manuscrits produits entre ces deux termes peuvent être datés avec précision.

Biographie modifier

Gerard Horenbout est mentionné pour la première fois en 1487, à son admission à la guilde de Saint-Luc, confrérie des peintres de Gand. Seul peintre parmi les cinq membres qui ont parrainé son adhésion, Lieven de Stoevere (actif vers 1463) a peut-être joué un rôle dans sa formation. À Gand, Horenbout dirige un atelier productif. Outre des tableaux et des enluminures, l'artiste réalise des cartons de tapisseries et de ferronneries ainsi que des cartes et des plans[3]. En 1498 il embauche un compagnon et en 1502, un apprenti enlumineur. Au moins trois de ses enfants ont fréquenté son atelier : Lucas et Suzanne, tous deux devenus peintres, et un autre fils. Vers 1503, il possède dans la « Drabstraat » une maison ornée d'une façade peinte, vraisemblablement de sa main, chose suffisamment remarquable pour être notée. Il est aussi copropriétaire, à Gand, d'un domaine appelé « le Verger », revendu vers 1517.

Entre 1515 et 1522 environ, Gerard Horenbout est peintre à la cour de Marguerite d'Autriche, alors régente des Pays-Bas[3]. En 1521, il rencontre Albrecht Dürer lorsque ce dernier achète un manuscrit exécuté par sa fille Suzanne.

Il séjourne ensuite en Angleterre, où il est mentionné en 1528 accompagné de son fils Lucas Horenbout, peintre renommé établi dans ce pays depuis 1525 au moins[4], et de sa fille Suzanne, également enlumineur, dont la présence en Angleterre est attestée en 1529 (elle est alors mariée à un John Palmer[5]). D'après Carel van Mander, Gerard Horenbout travaille pour le roi Henri VIII d'Angleterre. On a suggéré que le déplacement des Horenbout à Londres était lié à la tentative du roi - ou peut-être du cardinal Thomas Wolsey - de revivifier l'enluminure anglaise. Cette hypothèse reste controversée[6].

Gerard Horenbout retourne en Flandre probablement après 1531. Il meurt à Gand en 1541.

La famille Horenbout compte des enlumineurs, des peintres et des décorateurs actifs à Gand du XVe siècle au XVIIe siècle[7]. Si les archives gantoises mentionnent de nombreux artistes de ce nom, elles n'identifient que peu d'œuvres de leur main.

Identification modifier

Gerard Horenbout est généralement assimilé au Maître de Jacques IV d'Écosse. Georges Hulin de Loo est le premier expert à proposer cette identification[8],[6]. Il est suivi par Friedrich Winkler, Robert G. Calkins et d'autres. Seul Bodo Brinkmann est sceptique sur cette identification[9]. Les œuvres de l'un et de l'autre sont encore souvent étudiées séparément sous les deux noms[10],[11], Horenbout comme peintre de panneaux et le maître anonyme comme enlumineur[12].

L'identification, considérée comme « plausible »[6] d'après des concordances de lieu et de dates, s'avère « plus subtile »[6] quant au style. L'une des raisons en est qu'il subsiste peu d'enluminures signées de Horenbout[6]. Les liens stylistiques entre les Heures Sforza, seul manuscrit documenté de Horenbout, et l’œuvre du « Maître de Jacques IV » sont moins évidents mais toujours discernables. Les Heures Sforza présentent des ressemblances avec des enluminures du Maître. Jacob Wisse note une similitude dans la technique picturale, la couleur et le modelé du Maître de l’Adoration des mages de New York et la miniature analogue des Heures Sforza de Horenbout. Par exemple, dans les deux miniatures le bleu de la robe de la Vierge, au modelé identique, contraste avec le vêtement doré du dessus. La tonalité sarcelle (une nuance de bleu-vert pouvant tirer sur l'un ou l'autre), l'une des couleurs favorites du « Maître de Jacques IV », se rencontre plusieurs fois dans les miniatures flamandes des Heures Sforza. Dans le Couronnement de la Vierge, les types faciaux de Dieu le père et du Christ présentent un air de famille avec les membres de la Trinité des Heures de Spinola, bien que la facture soit plus brillante dans la première. De plus, un personnage masculin plutôt âgé, charnu, aux larges mâchoires - figure de base du répertoire du « Maître de Jacques IV » - apparaît dans le Crucifiement de Saint André des Heures Sforza. Enfin, dans la Vierge et l'Enfant avec des Anges musiciens du même manuscrit, le trône couvert et arrondi ressemble beaucoup à celui de la sainte Anne du Triptyque Poortakker, l'une des premières peintures dans le style du « Maître de Jacques IV », signée Gerardus[6].

Éléments stylistiques modifier

Les miniatures du Maître se distinguent stylistiquement par leurs groupes de figures robustes et non idéalisées, placés dans des paysages colorés ou des intérieurs riches de détails. Elles révèlent un goût marqué pour la peinture narrative et l'utilisation fréquente de représentations bibliques rares. Conçues pour illustrer les calendriers, ses scènes de la vie quotidienne sont considérées comme particulièrement vivantes. Surtout, il procède à des mises en scène à l'intérieur d'une page. En employant divers éléments qui créent des illusions, il estompe souvent la ligne séparant la miniature centrale de son encadrement et utilise les deux champs spatiaux pour faire progresser la narration de ses scènes[13].

 
Heures de Spinola, Scène de mort (folio 184v).
 
Heures de Spinola, Office de mort (folio 185r).

Cette conception emblématique du Maître, qui provoque l'illusion d'un passage de l'extérieur vers l'intérieur, se retrouve fréquemment dans ses œuvres, notamment dans les Heures de Spinola. Il y utilise, avec de nombreuses variations, ce traitement particulier des miniatures centrales et de leur bordure pour surprendre et ravir le spectateur sans pour autant sacrifier la rigueur narrative[14]. Les folios 184 verso et 185 recto des Heures de Spinola, qui se font face lorsque le manuscrit est ouvert, sont composés de manière identique. Réduit à trois courtes lignes, le texte laisse toute leur place aux images. Les miniatures montrent des bâtiments - à gauche une demeure bourgeoise, à droite une église - tous deux situés dans un cadre urbain traité en grisaille, composé de maisons, de tourelles et d'escaliers, d'où la vue s'échappe sur un verdoyant paysage champêtre. La partie centrale renferme la scène principale, à l'encadrement supérieur arrondi. Elle montre à chaque fois l'intérieur du bâtiment, comme si une coupe transversale en avait été effectuée[15]. La narration tire avantage de cette séparation. Dans la miniature de gauche, le mort est entouré d'un grand nombre de personnes. À gauche, un homme entre par une porte qui se prolonge, à l'extérieur du cadre central, par un retour du bâtiment et un escalier que vient de gravir un petit personnage vêtu de rouge. Dans la partie inférieure, une scène violente, inspirée du Dit des trois morts et des trois vifs, représente trois cavaliers dont l'un, effrayé par un squelette qui brandit vers lui une longue flèche, chute de cheval, allusion possible aux circonstances du décès[13].

La miniature opposée reprend le même découpage stylistique. Cette-fois ci, l'intérieur de l'église montre l'office funèbre avec le cercueil au centre, de nombreux officiants et des drapeaux bleus aux croix blanches accrochés aux voûtes. Sous l'image centrale s'ouvre la crypte, où un sarcophage accueillera le corps du défunt. Au bord inférieur droit, l'amoncellement de têtes de mort et la croix indiquent un cimetière. Dans les deux images, le Maître utilise à des fins narratives les vues intérieures et extérieures de ses bâtiments. Même s'il n'est probablement pas l'inventeur de ce type de bordures[14], il en pousse le concept jusqu'à ses limites pour obtenir des résultats complexes mais remarquablement esthétiques.

Œuvres modifier

Les œuvres de Horenbout sont fréquemment attribuées au « Maître de Jacques IV d'Écosse ». Vu leur nombre et leur taille, ce sont des manuscrits souvent enluminés par plusieurs artistes ou ateliers[16].

Miniatures et enluminures modifier

 
Bréviaire à l'usage de Windesheim, Assomption de Marie.
Probablement exécuté à Gand[17] il comporte 265 feuilles de taille plutôt petite (le texte est de 179 × 120 mm, avec douze miniatures dans des pages à deux colonnes, et dix-huit miniatures dans des pages à une colonne. Le bréviaire contient notamment une Assomption de la Vierge où des anges portent la Vierge au-dessus de sa tombe ornée de trois hosties eucharistiques[17],[18],[19],[20].

Tableaux modifier

Notes et références modifier

  1. Catalogué dans Illuminating., p. 371-373.
  2. a et b Illuminating., p. 366.
  3. a et b Le Dictionnaire des peintres belges (BALaT), Bruxelles, La Renaissance du Livre, département de De Boeck-Wesmael,, (lire en ligne), « Gerard Horenbout ».
  4. Richardson, Woods et Franklin 2007, p. 10-11.
  5. Reynolds 2006, p. 45.
  6. a b c d e et f Illuminating., p. 427-428.
  7. Dictionnaire des peinntres belges (BALaT), « Famille Horenbout ».
  8. voir Illuminating., p. 367
  9. D'après Illuminating., p. 428, Note 14
  10. voir Mark L. Evans, Bodo Brinkmann et Hubert Herkommer, The Sforza Hours : Additional Manuscript 34294 of the British Library, London et Lucerne, British Library et Faksimile Verlag,
  11. Par exemple dans Illuminating..
  12. Par exemple : Gerard Horenbout sur le site du Centre d'étude des Primitifs Flamands (Bruxelles).
  13. a et b Illuminating the Renaissance, p. 414-416.
  14. a et b Illuminating the Renaissance, p. 414.
  15. Kren et McKendrick disent (Illuminating the Renaissance, p. 414), à propos de l'Annonciation que Horenbout « provides a glimpse of the interior of a building, whose exterior can be seen in the border, providing a sort of X-ray vision », une sorte de coupe aux rayons X.
  16. Illuminating., p. 418-426.
  17. a et b Illuminating the Renaissance, p. 367-368 (notice 108).
  18. Description sur le site de Telma (Traitement électronique des manuscrits et des archives).
  19. Brève description dans le catalogue en ligne de la John Rylands Library : « a beautiful Horae with a dedication scene to St Barbara, now assigned to Utrecht, second half of the fifteenth century (Latin ms 39) ».
  20. Une description détaillée dans A descriptive catalogue of the Latin manuscript in the John Rylands Library at Manchester, datant de 1921.
  21. Description sur le catalogue de la bibliothèque qui renvoie aux Manuscripta Mediaevalia.
  22. The Isabelly Breviary, The British Library Board, 1993.
  23. L. Hellinga et J. B. Trapp, The Cambridge History of the Book in Britain : 1400-1557, Cambridge University Press, 1999, p. 56 [1].
  24. Exposition virtuelle Livres d'heures de la collection Marcel-Lajeunesse, Bibliothèque de l'Université de Montréal.
  25. Considéré comme « the most pictorially ambitious and original sixteenth-century Flemish manuscript » dans Illuminating., p. 414.
  26. Heures Sforza. Manuscrit numérisée en haute résolution.
  27. Norbert Wolf, Hans Holbein the Younger, 1497/98-1543 : the German Raphael, Taschen, , 96 p. (ISBN 978-3-8228-3167-0, lire en ligne), p. 48.
  28. image et notice du premier,image et notice du second.
  29. Notice sur le site du musée [2].

Annexes modifier

Bibliographie modifier

  • (de) Michaela Krieger, Gerard Horenbout und der Meister Jakobs IV. von Schottland : stilkritische Überlegungen zur flämischen Buchmalerei, Vienne, Böhlau Verlag, 2012, 596 p. (ISBN 9783205787266)
  • Graham Reynolds, The Sixteenth and Seventeenth-Century Miniatures in the Collection of Her Majesty The Queen, Londres, Royal Collection Publications Ltd, , 319 p. (ISBN 1-902163-45-1).
  • (en) Thomas Kren et Scot McKendrick (éditeurs), Illuminating the Renaissance : the triumph of Flemish manuscript painting in Europe, Londres, Getty Museum - Royal Academy of Arts, , 576 p. (ISBN 1-903973-28-7, lire en ligne).
  • (en) Carol M. Richardson, Kim W. Woods et Michael W. Franklin (éditeurs), Renaissance Art Reconsidered : An Anthology of Primary Sources, Malden, Wiley-Blackwell, , 449 p. (ISBN 978-1-4051-4640-1 et 1-4051-4640-0)
  • (en) L. Campbell, « Gerard, Lucas and Susanna Horenbout », The Burlington Magazine, 126, 1986, p.719-727
  • (en) R.C. Calkins, « Gerard Horenbout and his Associates: Illuminating Activities in Ghent, 1480-1521 », in: L.S. Dixon (red.), In Detail. New Studies of Northern Renaissance Art in Honor of Walter S. Gibson, Brepols, Turnhout, 1998, p.49-67

Articles connexes modifier

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