Fort Lucotte de Saint-Antoine

fort militaire construit au {{s|XIX}}

Le fort (de) Saint-Antoine, appelé également fort Lucotte, est un fort militaire construit au XIXe siècle. Il fait partie du système Séré de Rivières. Érigé sur la commune française de Saint-Antoine (département du Doubs, région Bourgogne-Franche-Comté), il se situe sur une crête séparant le lac Saint-Point de la station de ski de Métabief. Il s'agit d'un fort d'arrêt qui avait pour mission d'interdire le contournement de la Cluse de Pontarlier par le sud, l'accès à la route venant de Lausanne et les itinéraires permettant de rejoindre Salins et Champagnole via le défilé de Bonnevaux.

Fort Lucotte de Saint-Antoine
Image illustrative de l’article Fort Lucotte de Saint-Antoine
Description
Type d'ouvrage Fort à massif central et batteries basses
Dates de construction De 1879 à 1882
Ceinture fortifiée Place de Pontarlier
Utilisation Fort d'arrêt
Utilisation actuelle Cave d'affinage de meules de fromage
Propriété actuelle Commune loue la cave à l'affineur de comté Marcel Petite
Garnison A l'époque : 420 hommes
Armement de rempart
Armement de flanquement /
Organe cuirassé /
Modernisation béton spécial Magasins à poudre et abris souterrains ; bétonnage partiel des casemates
Programme 1900
Dates de restructuration /
Tourelles
Casemate de Bourges
Observatoire
Garnison /
Programme complémentaire 1908 /
Coordonnées 46° 47′ 20″ nord, 6° 20′ 00″ est
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Fort Lucotte de Saint-Antoine
Géolocalisation sur la carte : Doubs
(Voir situation sur carte : Doubs)
Fort Lucotte de Saint-Antoine

Nom Boulanger modifier

Par le décret du , le ministre de la Guerre Georges Boulanger renomme tous les forts, batteries et casernes avec les noms d'anciens chefs militaires[1]. Pour le fort de Saint-Antoine, son « nom Boulanger » est celui du général de division Edme Aimé Lucotte. Le nouveau nom est gravé au fronton de l'entrée[2].

Défense du Jura modifier

Le fort Lucotte fait partie de l'ensemble défensif de Pontarlier comprenant également :

Plus au sud, se trouvent :

Construction modifier

Les ingénieurs militaires ont construit ce fort polygonal Séré de Rivières, suivant le modèle dit "1874-1875" [3], en optant pour le type "à massif central et batterie basse"[4].

L'emplacement choisi est situé à 1104 m d'altitude, sur une crête, orientée S.SO-N.NE, à 1300 m au nord du bourg de Saint-Antoine.

Le fort, destiné à recevoir une garnison de 420 hommes[5], est construit en maçonnerie sur 3 ha[6]. 600 tailleurs de pierre et 600 maçons ont travaillé à sa construction, assistés de 3200 hommes de troupe[7] pour le creusement des fossés et les manutentions. Joseph Joffre, alors capitaine du Génie, fait partie de l'encadrement.

Au printemps 1884, 194 arbres, sur 3 rangs en quinconce, sont plantés sur le glacis. Un chemin stratégique (la route du fort) est aménagé sur 4,5 km depuis Saint-Point.

Histoire modifier

Extérieur modifier

Les fossés, de 6,5 à 7 m de profondeur pour 9 m de largeur, ont la forme d’un hexagone presque régulier de 3 ha de superficie. Leur défense est assurée par 3 caponnières doubles aux angles N-E, O et S (chaque caponnière flanque les 2 fossés adjacents). Les différentes casemates : casernements, magasins à poudre et munitions, locaux de stockage de la nourriture... sont voûtés et recouverts d'une couche de 7 à 8 m de cailloux et terre, assurant un bon amortissement des explosions des obus chargés alors (jusqu'au début des années 1880) de poudre noire, un explosif déflagrant. Les eaux de pluie, pénétrant jusqu'aux voûtes, à travers la couche de protection, sont dirigées vers des citernes[8]. Un pont-levis à basculement, précédé d'un pont dormant, dont l'entrée était protégée par un ravelin, constituent le seul accès au fort. Les 2 parties du casernement occupent l’épicentre, séparées par la "cour d'honneur". Partant de la cour d'entrée et faisant le tour du massif central (casernement), une "rue du rempart" à ciel ouvert, passant en tunnel sous 5 grandes traverses de protection latérale, dessert une quinzaine de plates-formes d'artillerie à ciel ouvert, séparées par des traverses-abris.,

Des couloirs voûtés mènent aux 3 caponnières ; celui de la caponnière ouest permet également de descendre, via un escalier en colimaçon, aux abris "temps de guerre".

Une caserne "temps de paix", dont les ruines des 2 bâtiments sont encore visibles depuis l'entrée, a été construite à l'extérieur.

Casemates modifier

Pour l'hébergement des hommes, 8 chambrées de 44 et 52 lits sont aménagées dans le casernement. Les officiers et sous-officiers se logent dans 7 chambres. Le fort dispose d’une infirmerie, d’une cuisine avec four à pain, d’une forge, d’une écurie, et bien sur, de magasins (vivres, huile, habillement, poudre, gargousses, projectiles). Des citernes, récupèrent les eaux de pluie.

Près de l'entrée se trouve le local du télégraphiste : Le fort était doté d'un poste optique, à signaux Morse, placé au sommet du talus de l'escarpe du front de gorge, et accessible par l'escalier en colimaçon débutant à proximité du local. Il était ainsi possible de communiquer avec le fort du Larmont supérieur, distant de 12 km, lui-même relié à la place de Besançon (fort de Montfaucon).

Aménagements ultérieurs modifier

En 1885, la mise au point de l'obus-torpille chargé d'un explosif brisant, la mélinite, fait craindre une trop grande faiblesse de tous les forts Séré de Rivières construits jusque là. Aussi, des abris et magasins à poudre[9] sont creusés sous la partie nord-ouest en 1888-1889, tandis que la partie supérieure de certaines casemates est bétonnée en 1891. En 1908 sont réalisés des tests de tir au canon[10] qui infirmèrent quelque peu les résultats catastrophiques constatés au fort de la Malmaison 22 ans auparavant. Les experts estimèrent que le fort pouvait résister jusqu'à 15 jours au feu de l'artillerie de campagne. Les dégâts causés par les tirs seront réparés et le fort restera opérationnel jusqu'à la première Guerre mondiale.

Seconde guerre mondiale modifier

Si la place de Pontarlier n'a pas été mise en défense en août 1914, en 1939, le fort de Saint-Antoine, tout comme ceux de Joux, du Larmont et du Risoux, est réoccupé, sans renforcements particuliers, assurant un soutien (comme position d'artillerie préparée) au secteur fortifié du Jura de la ligne Maginot[11],[12]. Seul le fort du Larmont supérieur sera attaqué par l'armée allemande en juin 1940.

Armement modifier

Au début des années 1880, Il devait être comparable à celui des autres forts Séré de Rivières avec, notamment, le canon de 120 mm de Bange comme pièce de place, et le canon à balle (canon revolver Hotchkiss) pour assurer le flanquement des fossés.

Les fantassins disposaient à cette époque du fusil Gras, modèle 1874, remplacé ensuite par le Lebel modèle1886.

Seconde affectation modifier

Désaffecté, sans avoir connu l'épreuve du feu, le fort est cédé[13] par l'armée à la commune, en 1965, et loué[14] au fromager Marcel Petite, en 1966, pour y être transformé en caves d'affinage de comté. Celui-ci investit dans un premier temps le casernement et les gaines souterraines, puis construit une première salle d'affinage au-dessus de la cour d'entée, et enfin, entre 2008 et 2011, la « cave des remparts » au-dessus de la cour d'honneur[15]. L'ensemble couvre 5000 m2, soit 1/6e de la surface totale du fort. Les conditions sont idéales pour un affinage lent, avec une température oscillant entre 6 et 9°C et une hygrométrie importante, de 94 à 98%.

Ce sont aujourd'hui (2022), 100 000 meules qui sont stockées, pour une durée de 10 à 20 mois, dans les 2 caves. En 50 ans, plus d'un million de meules ont été affinées dans le fort.

Galerie modifier

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Robert Dutriez et al., Vauban et ses successeurs en Franche-Comté : trois siècles d'architecture militaire, Besançon, C.R.D.P., 1981, 248 p. (BNF 34664251).
  • Guy Le Hallé, Histoire des fortifications en Franche-Comté et pays de l'Ain, Amiens, Martelle, 1991, 223 p. (ISBN 2-87890-009-X).
  • Guy Le Hallé, Le système Séré de Rivières ou le Témoignage des pierres : La France et Verdun, Louviers, Ysec éd., 2001, 224 p. (ISBN 2-84673-008-3).
  • Philippe Truttmann, La Barrière de Fer : l'architecture des forts du général Séré de Rivières, 1872-1914, Thionville, Gérard Klopp, 2000, 542 p. (ISBN 2-911992-37-7).

Liens externes modifier

Notes et références modifier

  1. Note no 5285 le du ministre de la Guerre Boulanger aux généraux commandant les régions militaires ; décret présidentiel du pour les nouvelles dénominations des forts, batteries et casernes sur proposition du ministre de la guerre, M. le général Boulanger.
  2. Dès le , le successeur de Boulanger au ministère, Théophile Ferron, abroge le décret. Le fort reprend officiellement son nom précédent, tout en gardant le nom Boulanger à son fronton.
  3. « Le fort Séré de Rivières modèle 1874-1875 », sur L'Antre du Stratège, (consulté le ).
  4. « Albertville-Fortifications », sur www.albertvillefortifications.com (consulté le )
  5. 375 hommes de troupe (artilleurs et fantassins) et 45 sous-officiers et officiers
  6. Il mesure 250 m de long sur 150 de large.
  7. « Partez à la découverte du Fort Saint-Antoine | Montagnes du Jura », sur www.montagnes-du-jura.fr (consulté le )
  8. L'étanchéité est réalisée avec de l'asphalte provenant du Val de Travers en Suisse.
  9. Il s'agissait de protéger les hommes et d'éviter l'explosion des magasins à poudre.
  10. Avec des obus de 155, 220 et 270 mm.
  11. « Wikimaginot - Le wiki de la ligne Maginot », sur wikimaginot.eu (consulté le )
  12. « Ligne Maginot : FORT de SAINT ANTOINE (Position d'artillerie préparée) par wikimaginot.eu », sur wikimaginot.eu (consulté le )
  13. Le fort est cédé pour 1 franc symbolique et les 11 ha de pré-bois constituant l'emprise militaire, pour 17 000 francs.
  14. Bail emphytéotique
  15. Située entre les 2 casernes.