Eupatoire à feuilles de chanvre

espèce de plantes

Eupatorium cannabinum

L'Eupatoire à feuilles de chanvre, le chanvre d'eau ou l'eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum), est une espèce de plante à fleurs de la famille des Astéracées[1].

Étymologie et dénominations modifier

Le terme " eupatoire " créé au XVe siècle, vient du latin impérial eupatoria (herba) identifié comme l'« Aigremoine eupatoire » ; le terme latin est lui-même emprunté au grec εὐπατόριον eupatôrion, à l'étymologie incertaine[2],[3].

D'après Gaston Bonnier[4], elle porte également le nom de « Pantagruélion aquatique » (héritant ainsi du nom donné par Rabelais à une plante proche du chanvre, citée à la fin du Tiers Livre).

Description[5] modifier

L'eupatoire chanvrine est une grande plante herbacée vivace, de 60 cm à 1,50 m de haut, à tige dressée, simple ou rameuse, en général rougeâtre, pubérulente, poussant sur un court rhizome.

Les feuilles opposées sont à 3-5 segments pétiolulés et ont une nervation pédalée, chaque segment est lancéolé et denté. Elles sont glanduleuses en dessous, rappelant celles du chanvre. Parfois, les feuilles supérieures sont simples, lancéolées et légèrement alternes.

Les inflorescences sont des racèmes corymbiformes de capitules, terminaux, compacts, en têtes pourprées aux fleurons blancs, rosés ou purpurins. La floraison a lieu à la fin de l'été, au début d'automne.

Les fruits sont des akènes avec le calice adhérent (cypselae) de 2-3 mm et une aigrette de 20-30 poils de 3-5 mm.

Sous-espèces modifier

  • Eupatorium cannabinum L. subsp. cannabinum, des mégaphorbiaies planitiaires-collinéennes, eutrophiles
  • Eupatorium cannabinum L. subsp. corsicum (Req. ex Loisel.) P. Fourn., des mégaphorbiaies subalpines, hygrophiles mésotrophiles, corso-sardes[6]

Écologie modifier

L'eupatoire chanvrine croît volontiers dans les zones humides, au bord de fossés, dans les marais, jusqu'à 1 700 mètres d'altitude[1], sur des sols riches. C'est une des plantes les plus caractéristiques des mégaphorbiaies[7].

On la trouve dans toute la France, en Europe, en Asie Mineure et en Afrique septentrionale.

Il s'agit d'une plante mellifère, particulièrement appréciée des papillons[1].

Caractéristiques modifier

Organes reproducteurs
Graine
Habitat et répartition
  • Habitat type: voir sous-espèces
  • Aire de répartition: eurasiatique méridional

Propriétés modifier

La plante contient des polysaccharides immunologiquement actifs[8], des benzofuranes, des lactones sesquiterpéniques du groupe des germacranolides[9] (eupatoriopicrine et dérivés voisins), des flavonoïdes, des stérols, des huiles essentielles (70 constituants identifiés mais avec des variations importantes suivant les lieux de récoltes) et des alcaloïdes pyrrolizidiniques

Quelques constituants d'Eupatorium cannabinum
Classe Composés Références
Huiles essentielles Germacrène D (27 %), germacrène B (12 %), valencène (10 %), β-caryophyllène (9 %), cypérone, α-phellandrène Mirza[10], Paolini[11]
Alcaloïdes pyrrolizidiniques Echinatine, lycopsamine, intermédine, rindérine (feuilles), supinine (racines), viridiflorine, cynaustraline, amabiline Bruneton[9], Edgar[12], Yan[13]
Flavonoïdes Hispiduline, pectolinarigénine, eupafoline, jaceosidine, centaureidine Stevens[14]

Une étude[9] sur le Rat a mis en évidence des propriétés cholérétiques (facilitant la sécrétion de la bile) et hépatoprotectrices, à fortes doses, en accord avec la tradition populaire qui en fait une plante cholagogue.

Traditionnellement, la racine est reconnue comme douée de propriétés cholagogues et laxatives. La plante (feuilles, fleurs et racines) est recommandée pour pallier des troubles du foie ou des reins[15]. Cependant, l'eupatoire contient des alcaloïdes pyrrolizidiniques, et présente donc une toxicité à forte dose ou en usage prolongé.

Une eupatoire chinoise proche, Eupatorium fortunei, est une plante médicinale[16] importante de la pharmacopée traditionnelle. Elle est réputée traiter les refroidissements dus à la chaleur de l'été, les nausées et les troubles gastro-intestinaux.

Remarque : Les textes de l'Antiquité gréco-latine traitent d'une plante appelée « eupatorion » mais elle ne saurait être identifiée à aucune espèce du genre Eupatorium (famille des Astéracées) mais à l'aigremoine eupatoire.

Entomofaune modifier

L'entomofaune de l'eupatoire a été étudiée en 2016 dans l'Ouest de l'Hérault (Biterrois : Lopez, 2016[17]) où ses inflorescences attirent essentiellement des lépidoptères, en particulier le Tabac d'Espagne (Argynnis paphia, Nymphalidae) et l'Écaille chinée (Euplagia quadripunctaria, Erebidae), ainsi que des diptères Syrphidae (Eristalis, Volucella, Milesia) et Tachinidae (Tachina grossa, Phorinae). Les PAs = alcaloïdes pyrrolizidines recueillis pourraient intervenir dans la biologie sexuelle du tabac d'Espagne et dans la protection de l'écaille chinée.

Photos modifier

Références modifier

  1. a b et c (fr) Michael Lohmann, Guide complet de la nature p.342, (ISBN 2-8034-4019-9), Éditions Chantecler, Aartselaar, Belgique
  2. Pour Ducourthial. « Selon certains, il ferait référence à Mithridate VI Eupator, roi du Pont, qui en aurait découvert les propriétés et recommandé l'usage; selon d'autres, il s'agirait d'une déformation du mot hêpatêros, synonyme de hêpatikos qui désigne ce qui se rapporte au foie, car la plante avait, parmi d'autres, la réputation de soigner les affections »
  3. Guy Ducourthial, Flore magique et astrologique de l'Antiquité, Belin, , 655 p. (ISSN 1257-5887)
  4. (fr) Gaston Bonnier, Les Noms des fleurs trouvés par la méthode simple, Paris, librairie générale de l'enseignement, sans date
  5. (fr) Référence Tela Botanica (France métro) : Eupatorium cannabinum
  6. (fr) Julve, Ph., 1998 ff. - Baseflor. Index botanique, écologique et chorologique de la flore de France. Version : 23 avril 2004.
  7. CATTEAU, DUHAMEL et al., Guide des végétations des zones humides de la région Nord-Pas-de-Calais, Centre régional de phytosociologie agréé du conservatoire botanique national de Bailleul, 2009, section "Mégaphorbiaies", pages 384 à 403
  8. (en) ANGELIKA VOLLMAR, WOLFRAM SCHAFER and HILDEBERT WAGNER, « IMMUNOLOGICALLY ACTIVE POLYSACCHARIDES OF EUPATORIUM CANNABINUM AND EUPATORIUM PERFOLIATUM », Phytochemistry, vol. 25, no 2,‎
  9. a b et c Bruneton, J., Pharmacognosie - Phytochimie, plantes médicinales, 4e éd., revue et augmentée, Paris, Tec & Doc - Éditions médicales internationales, , 1288 p. (ISBN 978-2-7430-1188-8)
  10. (en) Mehdi Mirza, Mehrdokht Najafpour Navaei and Mohammad Dini, « Volatile constituents of essential oils isolated from flowers of Eupatorium cannabinum L. from Iran », Iranian Journal of Pharmaceutical Research, vol. 2,‎
  11. (en) Juline Paolini, Jean Costa, Antoine-François Bernardini, « Analysis of theessential oil from aerial parts of Eupatorium cannabinum subsp. corsicum (L.) by gas chromatography with electron impact and chemical ionization masss pectrometry », Journal of Chromatography A, vol. 1076,‎ , p. 170-178
  12. (en) Edgar JA, Lin HJ, Kumana CR, Ng MM, « Pyrrolizidine alkaloid composition of three Chinese medicinal herbs, Eupatorium cannabinum, E. japonicum and Crotalaria assamica. », Am. J. Chin Med., vol. 20, nos 3-4,‎
  13. (en) Yan Jiang, Peter P. Fu and Ge Lin, « Hepatotoxicity of naturally occurring pyrrolizidine alkaloids », Asian Journal of Pharmacodynamics and Pharmacokinetics, vol. 6, no 3,‎ , p. 187-192
  14. (en) JAN F. STEVENS, ELIZABETH T. ELEMA and ECKHARD WOLLENWEBER, « Exudate Flavonoids of Eupatorium cannabinum », Biochemical Systematics and Ecology, vol. 23, no 4,‎
  15. L'équipe des enseignants du DUMENAT Phytothérapie (faculté de médecine Paris-XIII, Bobigny), Phytothérapie, la santé par les plantes, Sélection du Reader's Digest, coll. Vidal, (ISBN 2709818515)
  16. Universités de Médecine Traditionnelle Chinoise de Nanjing et Shanghai, La pharmacopée chinoise. Les herbes médicinales usuelles. 中药学, Éditions You Feng,‎ (ISBN 978-2-84279-361-6)
    Traduit et augmenté par Dr You-wa Chen
  17. Lopez,A., « - Note sur l'Eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum : Asteraceae) et son entomofaune dans l'ouest de l'Hérault. », Bull.Soc.Et.Sci.nat.Béziers; N.S.- T.XXVIII- 69 e volume, années 2015-2016 : p.9 -18.http://www.sesnb.fr/publications/bulletin-sesnb-69.pdf,‎

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