Daniel Mermet

journaliste et producteur de radio française
Daniel Mermet
Image illustrative de l’article Daniel Mermet
Daniel Mermet en octobre 2006.

Naissance (81 ans)
Les Pavillons-sous-Bois, France)
Nationalité Française
Profession Journaliste, animateur et producteur de radio
Autres activités Écrivain
Médias actuels
Pays France
Média Radio
Historique
Radio Émission Là-bas si j'y suis (anciennement sur France Inter)

Daniel Mermet, né le aux Pavillons-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, est une personnalité française du journalisme et de la radio. Il est surtout connu pour son rôle de producteur et animateur de l'émission Là-bas si j'y suis sur France Inter de 1989 à 2014. Il est également écrivain.

Mermet est aussi cofondateur de l'association Attac, qui milite pour la taxation des transactions financières et l'action citoyenne.

Biographie modifier

Formation et débuts professionnels modifier

Il est issu d'une famille ouvrière de la banlieue parisienne, comptant huit enfants[1].

En 1962, il sort diplômé de l'École normale d'arts appliqués de Paris et étudie aussi à l'École nationale supérieure des beaux-arts[2],[1]. À la même époque, ses premiers engagements politiques le rapprochent des positions du FLN et du réseau Jeanson[1]. Le , il est témoin des massacres sur le pont Saint-Michel à Paris[3].

À la fin des années 1960, il dessine et fabrique des modèles de jouets en bois pour l'industrie. Il dessine[2] également pour l'industrie textile et collabore au magazine Elle. Il a brièvement collaboré avec Paul Grimault ce qui lui a donné l'occasion de rencontrer Pierre et Jacques Prévert[1].

Les années 1970 et 1980 modifier

Daniel Mermet crée en 1973 le « Théâtre de la table qui recule ». Un spectacle, Mortimer Baltimore, est joué entre autres au Festival d'Avignon. Daniel Mermet connaît des difficultés financières, et la troupe disparaît lorsque son fondateur entre à France Culture en 1976 où il réalise des contes quotidiens et des émissions sur l'art brut (Dans la Banlieue de l'Art)[1].

En 1977, il entre à L'Oreille en coin de Jean Garretto et Pierre Codou sur France Inter où il réalise une émission de voyage poétique (Dans la ville de Paramaribo, il y a une rue qui monte et qui ne descend jamais), puis il fait une émission quotidienne d'horreur en 1984 : Chair de poule[1],[4](un livre en sera extrait en 1991 : Ugly : Ohmondieumondieumondieu ! paru aux éditions du Seuil), sur le jazz Charlie Piano Bar en 1983, et une émission humoristique en 1987, Bienvenue à bord du Titanic[1].

Outre ces émissions, il participera aussi à des programmes radiophoniques érotiques : Tendre est la nuit et Malin plaisir[4] et La Coulée Douce durant les étés 1985 et 1986, une émission « suffisamment érotique pour que des poils se hérissent »[1] qui fit scandale.[réf. nécessaire]

Émission Là-bas si j'y suis (1989-2014) modifier

En septembre 1989, Daniel Mermet crée sur France Inter Là-bas si j'y suis, une émission quotidienne de voyage, d'enquête et de grands reportages. Il produit cette émission pendant près de 25 ans, jusqu'en juin 2014. Là-Bas si j'y suis est plusieurs fois récompensée : le prix Ondas 1992, le prix de la Société civile des auteurs multimédia (Scam) en 1993 et celui du Conseil français de l'audiovisuel 1998. Mermet est également cofondateur d'Attac[5],[6], reprenant en décembre 1997, à l'antenne de France Inter, l'idée d'Ignacio Ramonet de créer ce groupe contre ce qui est présenté comme l'incurie des marchés[7]. Le , Daniel Mermet obtient le « grand prix Scam 2013 pour l'ensemble de son œuvre »[1].

Ligne éditoriale modifier

Là-Bas si j'y suis est une émission clairement engagée à gauche[8],[2], orientation que Daniel Mermet revendique par ailleurs[8],[1].

La manière de présenter Là-bas si j'y suis montre les engagements sociétaux de Daniel Mermet ; Mermet a ainsi produit des reportages afin de lutter contre le Front national, de protester contre l'invasion de la Tchétchénie, d'aider une rescapée d'un goulag nord-coréen ou encore d'interviewer l'ancien médecin nazi Hans Münch, précipitant sa mise en accusation face au tribunal correctionnel par de multiples associations[3]. Outre ces reportages, Mermet produit aussi des émissions plus légères et au ton pittoresque. Moins fréquents que les reportages engagés, ces reportages n'en représentent pas moins une grande part de l'émission[3].

Son émission militante et atypique a su fédérer une forte communauté de fans. François Ruffin, futur député France insoumise, ainsi que des voix de Radio France comme Sonia Kronlund (productrice des Pieds sur terre sur France Culture) ou Yann Chouquet, devenu directeur des programmes de France Inter, y ont travaillé.

La ligne éditoriale de l'émission a parfois été critiquée par certains journalistes de la rédaction de France Inter, comme opposée à la recherche de la neutralité à laquelle eux doivent s'astreindre[2]. Détenteur d'une carte de presse depuis la fin des années 1990[9], Daniel Mermet et Là-Bas si j'y suis ne dépendaient cependant pas de la rédaction, mais de la direction des programmes de Radio France[n 1],[n 2],[8].

Reportages marquants modifier

Parmi les reportages considérés comme marquants de l'émission, figure la série d'émissions au Rwanda, où Daniel Mermet s'est rendu avec le journaliste de RFI Jérôme Bastion au moment du génocide des Tutsis en 1994. Ils avaient découvert au milieu d'un charnier, une petite fille vivante, Valentine. Un an après, Daniel Mermet est retourné au Rwanda, et a retrouvé Valentine[10],[11].

Lors d'un reportage à Sarajevo pendant la guerre de Bosnie-Herzégovine, Daniel Mermet est grièvement blessé le , victime d'un accident de voiture alors qu'il circulait à vive allure pour se prémunir contre de possibles tirs de snipers[12],[13],[14].

Des reportages de l'émission ont servi de base à un spectacle chorégraphique de Denis Plassard, Onde de choc (1999). En 2002, avec Antoine Chao, Daniel Mermet met en scène Mords la main qui te nourrit avec des chômeurs stagiaires à la Maison de la Culture d'Amiens[15].

En 1999, l'une de ses émissions, Carnets de voyages fait figure de journal de voyage[4],[16].

En 2014, il reçoit Fanny Bugnon, auteur du livre Les Amazones de la terreur, Sur la violence politique des femmes, de la Fraction armée rouge à Action directe, dans le cadre d'une émission rétrospective sur le mouvement d'extrême gauche[17].

Là-Bas si j'y suis sur Internet (depuis 2015) modifier

À la suite de son licenciement de France Inter en juin 2014, Daniel Mermet fonde l'Association Modeste et Géniale, une association à but non-lucratif avec laquelle il continue Là-Bas si j'y suis sur internet. L'association emploie une dizaine de travailleurs : journalistes, monteurs, réalisateurs et chroniqueurs. Le format privilégié reste le grand reportage radio, mais le site propose également des textes, entretiens, chroniques ou reportages vidéos. Le site (la-bas.org) fonctionne sur abonnement et revendique 20 000 abonnés et 1 million de vues par mois. L'association publie ses comptes chaque année[18].

En novembre 2017, Daniel Mermet fait condamner Radio France en appel pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse. L'entreprise publique est condamnée à 300 000 euros d'indemnités pour avoir renouvelé ses CDD pendant près de 40 ans[19].

Controverses modifier

Gestion du personnel modifier

En 2013, les pratiques de gestion du personnel de Daniel Mermet, déjà mises en cause par le journaliste Olivier Cyran dans le journal CQFD dix ans plus tôt[20], font l'objet, dans la revue Article 11, d'une enquête du même Olivier Cyran intitulée « Daniel Mermet ou les délices de “l'autogestion joyeuse” »[21]. Elle révèle les plaintes de deux anciens collaborateurs de l'émission Là-bas si j'y suis[22],[23],[24],[25],[26]. Cette polémique a trouvé son dénouement en novembre 2013 : à la suite d'une enquête du CHSCT de Radio France, le DRH Christian Mettot avait déclaré dans Télérama[27] : « À ce jour, le dossier est clos. J'y ai vu des signes de mal-être, mais pas de preuve tangible et irréfutable de harcèlement. Pour moi, Daniel Mermet n'a pas franchi la ligne rouge. [...] »

François Ruffin, qui a longtemps travaillé pour l'émission, estime que « dans ce portrait tout en obscurité, [il ne reconnaît] pas [s]on patron »[28]. D'autres collaborateurs et anciens collaborateurs de Là-bas si j'y suis, Antoine Chao, Agnès Le Bot et Christophe Imbert, ont dénoncé le caractère militant de l'article d'Olivier Cyran. Leurs témoignages, publiés sur différents sites internet, dont Rue89 et Fakir, ont été regroupés sur le site non officiel de « Là-bas si j'y suis », sous le titre : « Daniel Mermet, Là-bas si j'y suis répond »[29].

En 2020, une grève de dix salariés sur douze, du site qu'il a créé, amène fin 2022, à une condamnation aux prud'hommes pour harcèlement moral[30].

Relaxé d'incitation à la haine raciale modifier

À l'initiative de Gilles-William Goldnadel, Daniel Mermet a été poursuivi pour avoir diffusé, en 2001, des propos d'auditeurs sur le conflit israélo-palestinien tenant, selon Goldnadel, de l'« incitation à la haine raciale ». Mermet a été relaxé en juillet 2002 et définitivement acquitté par la Cour d'appel de Versailles le 20 décembre 2006. Reporters sans frontières a dénoncé des « pressions croissantes exercées sur les journalistes critiquant la politique d'Ariel Sharon »[31].

Réalisation de documentaires modifier

 
Daniel Mermet (debout) à côté de Noam Chomsky dédicaçant ses livres à Paris (2010).

Une souscription a été lancée sur le site Internet de la coopérative audiovisuelle et cinématographique de production Les Mutins de Pangée[34], afin de financer le film qui est sorti au cinéma en 2015. Une suite est en préparation.

Sur le site des Mutins de Pangée[35], les films sont disponibles en DVD et en VOD.

Publications modifier

 
Daniel Mermet au festival du livre de Mouans-Sartoux en octobre 2015.

Livres modifier

CD-livre modifier

- Reprise de l'émission Là-bas si j'y suis du
- Inclus dans un livre de 47 pages
- Illustration musicale :
The Left hand of God, de Victor Young, interprété par le Charlie Haden Quartet West
J'aurais bien voulu, L'Ours, Signalétique, de et interprété par Jacques Higelin et Areski Belkacem, extraits de l'album Higelin et Areski

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. D'après Deleu 2006, p. 172, l'émission Là-bas si j'y suis ne relève pas de la grille « journalisme » de France Inter mais de celle des « programmes » tout comme sa dépendance hiérarchique qui est celle du directeur des programmes. Mermet n'aurait, par ailleurs, pas de carte de presse, du moins jusqu'à 2006.
  2. D'après Fribourg 2006 « Les producteurs radio ne sont pas journalistes, n'en ont pas le titre, seuls certains se définissent comme tels » déclare Hervé Glévarec.

Références modifier

  1. a b c d e f g h i et j La Lettre de la SCAM n°46 2013.
  2. a b c et d Deleu 2006, p. 172
  3. a b et c Deleu 2006, p. 174
  4. a b et c Deleu 2006, p. 176
  5. « Le collège des fondateurs d'Attac », sur Attac France (consulté le )
  6. Deleu 2006, p. 173
  7. Bonnassieux 2005, p. 81.
  8. a b et c Fribourg 2006, p. 50
  9. « Daniel Mermet : « Les dirigeants de Radio France ne sont plus journalistes, mais gestionnaires » » publié le 27 juin 2014 par lemonde.fr
  10. Sylvie Bidet, « FRANCE INTER, 14 heures à 15 heures. «Là-bas si j'y suis». Daniel Mermet, au Rwanda, sur les traces de Valentine. Il y a un an, il découvrait l'enfant au milieu d'un charnier », Libération, 23 mai 1995
  11. INA Plateau Daniel Mermet, 18 mai 1995 - sur le Rwanda
  12. Florence Mitri, « « Salut, c’est Daniel Mermet… » », La Vie, no 2497,‎ (lire en ligne)
  13. L'accident de Daniel Mermet à Sarajevo INA
  14. Émission Là-bas si j'y suis du 4 décembre 2013, diffusion entre la 30e et la 36e minute de l'enregistrement précédant l'accident
  15. L'Humanité, 12 avril 2002, Quinze chômeurs un matin dans la Somme…
  16. La-bas.org L'émission Carnets de voyages
  17. 1987, la fin d'Action directe, France Inter
  18. « Compte de résultats 2016 », Là-bas si j'y suis,‎ (lire en ligne, consulté le )
  19. « Radio France condamnée à verser 300 000 € à Daniel Mermet », Ouest-France.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  20. « T'en baves là-bas si j'y suis », article publié dans le no 7 de CQFD (décembre 2003).
  21. Olivier Cyran, « Daniel Mermet ou les délices de “l'autogestion joyeuse” », Article 11, 26 juin 2013.
  22. La rédaction de Mediapart, « Daniel Mermet ou les délices de l'« autogestion joyeuse » », sur Mediapart, (consulté le )
  23. Slate.fr, « Là-bas si j'y suis: portrait cinglant de Daniel Mermet », sur Slate.fr, (consulté le )
  24. « "Là bas si j'y suis"... je n'y reste pas ? - Par Sébastien Rochat | Arrêt sur images », sur www.arretsurimages.net, (consulté le )
  25. « « Harcèlement moral chez Mermet : émoi en ligne, embarras à Radio France » », sur Rue89, (version du sur Internet Archive)
  26. « Conflit à « Là-bas si j’y suis » », sur Acrimed,
  27. « Daniel Mermet : l’intouchable de France Inter ? », Télérama.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  28. François Ruffin, « Mes années Mermet », sur fakirpresse.info,
  29. Daniel Mermet, Là-bas si j'y suis répond
  30. « Chez "Là-bas", Daniel Mermet écrase les grévistes - Par Loris Guémart | Arrêt sur images », sur www.arretsurimages.net (consulté le )
  31. Mona Chollet, « Daniel Mermet, la « mauvaise cible » des pro-Israéliens », sur Le Courrier, (version du sur Internet Archive)
  32. Le site du film Chomsky et Cie
  33. Les Mutins de Pangée
  34. Les Mutins de Pangée
  35. Les Mutins de Pangée, à propos du documentaire Howard Zinn, une histoire populaire des États-Unis

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Christophe Deleu, Les anonymes à la radio : Usages, fonctions et portée de leur parole, Bruxelles/Paris/Bry-sur-Marne, De Boeck Supérieur, coll. « Médias recherches », , 232 p. (ISBN 2-8041-5044-5 et 978-2-8041-5044-0, lire en ligne).  
  • « Astérisque », La Lettre de la SCAM, Société civile des auteurs multimédia, no 46,‎ (lire en ligne)
  • Jean-Baptiste Fribourg, Salut Daniel... La communauté des auditeurs de là-bas si j'y suis sur France Inter : Mémoire de fin d'étude, Science-Po Lyon, (lire en ligne)
  • Alain Bonnassieux, Que sont les dirigeants associatifs devenus ? : Enquêtes sur l'évolution des engagements bénévoles dans la région stéphanoise, université de Saint-Étienne, , 145 p. (lire en ligne).  

  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

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