Claude-Henri Belgrand de Vaubois

général français

Claude-Henri Belgrand,
comte de Vaubois
Claude-Henri Belgrand de Vaubois

Naissance
Longchamp-sur-Aujon (Aube)
Décès (à 90 ans)
Beauvais (Oise)
Origine Drapeau de la France France
Grade Général de division
Distinctions Comte de l'Empire
Chevalier de Saint-Louis
Commandeur de l’Ordre de la Couronne de fer
Grand officier de la Légion d'honneur
Autres fonctions Sénateur
Pair de France

Claude-Henri Belgrand, comte de Vaubois, né le à Longchamp-sur-Aujon (près de l’abbaye de Clairvaux)[1] et mort le à Beauvais[2], est un général français de la Révolution et de l’Empire. En 1796, il participe à la campagne d'Italie sous les ordres de Bonaparte. Vaubois commande entre 1798 et 1800 le port de La Valette, pendant le blocus de Malte. Il siège au sénat conservateur sous le consulat et l’Empire, puis à la chambre des pairs à la Restauration. Son nom est inscrit sur l’Arc de Triomphe à Paris.

Biographie modifier

Claude-Henri Belgrand naît en 1748 dans une famille champenoise. Son père, Henri Belgrand (1707-1792), est maître de forges à Clairvaux et receveur du duché de Châteauvillain pour Louis de Bourbon, petit-fils de Louis XIV[3]. La famille de sa mère, Anne Febvre (1712-1786), est également propriétaire de fermes et de forges en Champagne. Il étudie chez les oratoriens à Troyes[4]. Belgrand, connu sous le nom de Vaubois, rejoint l'armée à vingt ans, étudiant à l’école royale d’artillerie d’Auxonne[5]. Il est lieutenant d’artillerie en 1770 et devient en 1784 capitaine du régiment de la Fère (où il rencontre l’année suivante Napoléon Bonaparte, alors âgé de seize ans). Il se marie en 1788 avec Ursule de Barthélemy (1763-1800)[6]. Leur fille a pour parrain le duc de Penthièvre. Vaubois est fait chevalier de Saint-Louis le 17 octobre 1791[7].

La Révolution et les guerres d'Italie modifier

À l’été 1792, son plus jeune frère, chevalier de Saint-Jean de Jérusalem, émigre à Malte après la nationalisation des biens de son ordre. Lorsque leur père décède deux mois plus tard, en septembre, son héritage et ses forges sont saisis par la République[3].

Radié de l’armée républicaine, Vaubois réussit néanmoins à se faire élire à la tête du 3e bataillon de volontaires de la Drôme. Il participe au siège de Lyon[8] en 1793 et devient général de brigade de l’armée des Alpes (commandée par le général Kellerman, vainqueur de Valmy), puis général de division en 1795[6]. En mai 1796, il passe sous le commandement de Napoléon Bonaparte, nommé à la tête de l'armée d'Italie. Après la prise de Livourne le 27 juin, Bonaparte confie à Vaubois le commandement de la ville[9].

À l’été 1796, les Autrichiens lancent une contre-offensive qui tourne à l'avantage des Français (batailles de Lonato et de Castiglione). Les Autrichiens sont commandés par le maréchal alsacien Dagobert von Wurmser (qui avait combattu aux côtés de la France lors de la guerre de Sept Ans) - désormais âgé de soixante-douze ans et souffrant de surdité. Le , Wurmser confie au général Paul Davidovitch la défense de Trente, pendant qu’il mène son armée dans les vallées de la Brenta pour atteindre Mantoue en contournant les positions françaises. Vaubois, à la tête de 10 000 hommes, tient la rive occidentale du lac de Garde[10]. Le 4 septembre, il participe à la victoire de Rovereto. Près de 10 000 Autrichiens sont mis hors de combat et 3 000 sont capturés, contre moins de 1 000 pertes françaises.

Le lendemain, Bonaparte entre dans Trente. Il ordonne à Vaubois de contenir Davidovitch dans le Tyrol [10], tandis qu’il se lance à la poursuite de Wurmser. Le 8 septembre, après sa défaite à Bassano, Wurmser fuit vers Mantoue, parvenant de justesse à s’y enfermer le 13 septembre.

En octobre, des renforts autrichiens se préparent. Le général hongrois Josef Alvinczy, membre du Hofkriegsrat (le conseil de guerre de l’empereur François), a pour mission de briser le siège de Mantoue. Le 22 octobre, son armée se met en marche depuis l’Est. Au Nord, Davidovitch reçoit des renforts du Rhin. Il doit faire la jonction avec Alvinczy en s’emparant de la vallée de l’Adige [10].

Le 2 novembre, les 10 000 hommes de Vaubois sont attaqués à Cembra par les 18 000 hommes de Davidovitch. Contrainte de se retirer vers Trente, Calliano, puis Rivoli le 7 novembre[11], sa division perd en 5 jours 4 400 hommes, tandis que les Autrichiens comptent 2 000 tués et blessés et 1 500 prisonniers[12]. L’offensive de Davidovitch s’arrête devant Rivoli, où Vaubois organise une ligne de défense. Les Français sont aussi en difficulté à l’Est. Le 12 novembre, après la bataille de Caldiero, Bonaparte, menacé, doit se replier vers Vérone. Il décide alors de lancer une offensive surprise par le Sud de l’Adige (bataille du pont d'Arcole) pour interrompre l’avancée d’Alvinczy en attaquant ses arrières.

Le 17 novembre, sommé de faire la jonction avec Alvinczy à Vérone, Davidovitch attaque les Français à Rivoli. Les Autrichiens font 1 000 prisonniers [10] et Vaubois échappe de peu à la capture. Après la bataille du pont d’Arcole, Bonaparte se porte à son secours, repoussant Davidovitch vers le Nord. Il remplace ensuite Vaubois. Sa division est confiée à Barthélemy Joubert. Une deuxième tentative d’Alvinczy visant à briser le siège de Mantoue donne lieu à la fameuse bataille de Rivoli en janvier 1797.

En février 1797, Vaubois est de nouveau envoyé à Livourne, puis en Corse au mois d’avril[7]. Avec le soutien de Lucien Bonaparte, il y organise la répression d’un mouvement d’insurgés catholiques en janvier 1798. Le 21 février, le meneur de la révolte âgé de quatre-vingts ans, Agustinu Giafferi, est fusillé à Bastia.

L'occupation française de Malte modifier

En mai 1798, il est embarqué pour l'expédition d’Égypte par le général Louis-Alexandre Berthier. La flotte française s’empare de l’île de Malte, au large de la Sicile. Le 12 juin 1798, Ferdinand von Hompesch zu Bolheim, le grand maître de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem (qui gouverne l'archipel depuis 1530), signe la reddition à bord de L'Orient , le navire amiral de la flotte française.

Le commandement de l’île est confié à Vaubois. Bonaparte écrit dans une lettre adressée au directoire : « c’est lui qui a commandé le débarquement, et il s’est concilié les habitants de l’île par sa sagesse et sa douceur. »[13] Belgrand de Vaubois retrouve son frère chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, qui avait quitté la France en 1792.

Le 19 juin 1798, Bonaparte met le cap sur Alexandrie emportant avec lui le trésor des Hospitaliers. L'Orient et ses richesses sont coulés le par la flotte d’Horatio Nelson lors de la bataille d'Aboukir. Il laisse à Vaubois une garnison de trois milliers d'hommes, cinq compagnies d'artillerie et une unité médicale. Les Français mettent fin à la juridiction papale et instaurent une législation révolutionnaire (abolition de la noblesse, mariage civil, construction d’une synagogue). Un journal officiel est créé - le premier de l’histoire de Malte. Les esclaves et les prisonniers sont libérés.

Les pillages des soldats français scandalisent le clergé maltais et la population. Le 2 septembre, une révolte éclate : 10 000 Maltais, menés par Emmanuel Vitale et le Père Francesco Saverio Caruana, s’attaquent à la garnison de Vaubois. Les Français se replient dans le port fortifié de La Valette. Le 18 septembre, des navires portugais instaurent un blocus[14] qui ne prend fin qu’avec l’occupation française de Malte : les forces britanniques détachées par Nelson débutent un siège de deux ans, sous le commandement d’Alexander Ball, qui se fait nommer gouverneur de l'île par le roi de Naples Ferdinand Ier. Vaubois refuse pendant deux ans de se rendre aux Anglais et aux Maltais.

En juin 1800, il apprend le coup d’état de Bonaparte. Le , il réunit ses hommes et leur annonce la reddition. La population de La Valette est affamée et assoiffée. La garnison française, vêtue de haillons, est ravagée par le scorbut[7].

Le 4 septembre, les 2 800 Français survivants sortent de La Valette avec les honneurs de la guerre (tambours battants, gardant leurs armes ainsi qu'une partie des objets pillés sur l’île). Il est rapatrié avec sa garnison vers Toulon, sur un vaisseau anglais[15]. Vaubois a été élu sénateur le 27 juillet 1800, sur proposition de Bonaparte.

 

L'Empire et la Restauration modifier

À son retour de Malte, il met un terme à sa carrière militaire. Son épouse, âgée de trente-sept ans, est morte quelques semaines avant sa reddition aux Anglais. Il se remarie en 1801 au château de Courcelles avec Catherine-Françoise de Gantelet d'Asnières de Veigy (1782-1819)[6] (la fille d'un baron du lac Léman qui était avant la révolution l’écuyer du frère de Louis XVI, le futur Charles X), morte à trente-sept ans comme sa première compagne.

Vaubois siège au sénat conservateur, où il côtoie notamment Volney. Quand Bonaparte devient consul à vie, en 1802, il est nommé sénateur de Poitiers. L’empereur le fait comte de Vaubois en 1808[2],[16]. Le général interrompt sa retraite en 1809 pour commander une division de la garde nationale, après le débarquement britannique en Zélande[17].

 
Armes du comte de Vaubois : « De gueules à la bande componnée de sable et d'argent, quartier des comtes-sénateurs. »

Il se rallie en 1814 à Louis XVIII qui l’élève à la dignité de pair de France[18]. Il vote la mort du maréchal Ney, lequel avait trahi Napoléon en 1814 puis Louis XVIII en 1815[19]. Resté fidèle au roi pendant les cent-jours, ses titres sont rendus héréditaires en 1817. Il siège au palais du Luxembourg jusqu’en 1825, avant de se retirer dans son château de Courcelles. Il se rallie à Louis-Philippe Ier après les Trois Glorieuses et la chute de Charles X.

Belgrand de Vaubois s'éteint en 1839, à quatre-vingt-dix ans, et repose au cimetière général de Beauvais[20]. Mort sans héritier mâle, son gendre, Casimir Le Poittevin de La Croix, reçoit l’autorisation d’ajouter à son nom celui de Vaubois en 1829. Le neveu et gendre d'icelui, le général Louis Joseph Le Poittevin de La Croix-Vaubois, relève son titre de comte en 1869, avec l'autorisation de Napoléon III mais sans attribution officielle.

Il est le grand-oncle de l’hydrologue Eugène Belgrand[6], concepteur du service des eaux et des égouts de Paris sous le Second Empire.

Notes et références modifier

  1. Archives nationales
  2. a et b « Cote LH/167/17 », base Léonore, ministère français de la Culture
  3. a et b « Annales de Bourgogne : revue historique trimestrielle publiée sous le patronage de l'Université de Dijon et de l'Académie des sciences, arts et belles lettres de Dijon, 1971 »
  4. « Almanach de la Champagne et de la Brie : (Aube, Ardennes, Marne, Haute-Marne, Seine-et-Marne, Yonne) »
  5. « Actes et documents pour servir à l'histoire de l'occupation française de Malte pendant les années 1798-1800 »
  6. a b c et d « Les familles titrées et anoblies au XIXe siècle : titres, anoblissements et pairies de la Restauration, 1814-1830. Tome 1 »
  7. a b et c « Général Belgrand de Vaubois, défenseur de Malte (1748-1839) - Les Contemporains, 1909 »
  8. Jean Tulard (dir.), Dictionnaire Napoléon, vol. I-Z, Paris, Fayard, , 1000 p. (ISBN 2-213-60485-1), p. 920
  9. « Napoléon à l’île d’Elbe, Marcellin Pellet, 1888, p.206 »
  10. a b c et d « Napoléon : recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins, discours sur les matières civiles et politiques, etc., formant une histoire de son règne écrite par lui-même. Tome 1 »
  11. Jacques-Olivier Boudon et Jacques Garnier, « La campagne d'Italie 3 : Vers la paix de Campoformio », Napoléon Ier : Le magazine du Consulat et de l'Empire, no 26,‎ , p. 44-52 (ISSN 1298-6380)
  12. (en) Digby Smith, The Greenhill Napoleonic Wars Data Book : Actions and Losses in Personnel, Colours, Standards and Artillery, 1792-1815, Londres, Greenhill Books, , 582 p. (ISBN 1-85367-276-9), p. 127
  13. « Pièces diverses relatives aux opérations militaires et politiques du général Bonaparte, p.9 ».
  14. « Campagne d'Égypte et de Syrie : mémoires pour servir à l'histoire de Napoléon, dictés par lui-même à Sainte-Hélène. Tome 1 »
  15. « Actes et documents pour servir à l'histoire de l'occupation française de Malte pendant les années 1798-1800 »
  16. « BB/29/974 page 156. », Titre de comte accordé à Claude Henri Belgrand de Vaubois. Erfurt ()., sur chan.archivesnationales.culture.gouv.fr, Centre historique des Archives nationales (France) (consulté le ).
  17. Chandler, p 458
  18. François Velde, « Armory of the French Hereditary Peerage (1814-30) », Lay Peers, sur www.heraldica.org, (consulté le )
  19. « Le général sénateur et la carpe ou une réception à Thouars en l’An XIII »
  20. Cimetières de France et d'ailleurs

Voir aussi modifier

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Bibliographie modifier

Liens externes modifier