Château de Carneville

château à Carneville (Manche)

Le château de Carneville est une demeure, du début du XVIIe siècle, remaniée au XVIIIe siècle, qui se dresse, dans le Val de Saire sur le territoire de la commune française de Carneville, dans le département de la Manche, en région Normandie.

Château de Carneville
La façade côté cour.
Présentation
Type
Fondation
Propriétaire initial
François-Hervé Simon de Carneville
Propriétaire actuel
Guillaume Garbe
Patrimonialité
Inscrit MH (partie en )
Patrimoine en péril (2018)
Classé MH (partie en )Voir et modifier les données sur Wikidata
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Localisation
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Coordonnées
Carte

Le château fait l’objet d'une protection partielle aux monuments historiques.

Localisation modifier

Le château est situé à 1,1 kilomètre au sud de l'église Saint-Malo de Carneville, dans le département français de la Manche.

Historique modifier

Un château connu sous le nom de château de la Motte existait à Carneville dès le Moyen Âge, et sera détruit en 1405 par les Anglais[1].

C'est François Simon (v. 1592-1660), qui fit construire, sur les terres de la seigneurie, un nouveau manoir, encore visible et qui porte gravé, sur un linteau, la date de 1640[2]. Son fils, Hervé François Simon (1652-1708) fait construire un second manoir daté de 1699[2]. Ces deux manoirs, transformés en dépendances du nouveau château, n'ont pratiquement pas été modifiés depuis lors.

Le château lui-même est édifié en 1755[3] par François Hervé Simon de Carneville (1721-1798)[4], sur le modèle du château de Saint-Pierre-Église. Il comporte une boulangerie et un parc d'arbres fruitiers, avec l'idée de développer la rusticité, suivant les idées des physiocrates[5]. De son union avec Françoise Charlotte Brohier (1729-1804), François Hervé eu cinq enfants, Françoise Constance (1749-1825), épouse de Bon Paul Jacques Érard de Belisle ( 1805), baron de Saint-Pierre-Église, Marie Françoise Charlotte (née en 1752), mariée à Pierre Charles Bernardin du Tertre, Georges François (1750-1837) et François Charles Adrien Symon (1754-1816), vicomte de Carneville, lieutenant-général honoraire, tous deux officiers de cavalerie et qui émigrèrent à la Révolution pour servir dans l'armée des Princes puis au service de l'empereur d'Autriche. En 1792 François Charles Adrien finança une « Légion de Normandie » ou premier « corps de Carneville » dans laquelle il dépensa 600 000 francs et dont il était colonel propriétaire. Ce corps eut une durée éphémère[note 1]. En 1793[6], il crée un nouveau corps franc, et deviendra feld-maréchal ainsi que chambellan de l'empereur d'Autriche, et épousera en secondes noces la fille du prince Lichnowski. Son frère, Georges François Symon[note 2], comte de Carneville, lieutenant-général honoraire, servira également à la tête des « Hussards de Carneville ». De retour en France sous la Restauration, les deux frères furent maréchaux de camp puis lieutenant-généraux honoraires[7].

Le plus jeune des frères, Louis François Paulin Symon, né en 1769, sera maire de Carneville de 1822 à 1831. En 1836, il est contrait de vendre le château qui est acquis la même année par un avocat d'Avranches, monsieur Jean-Jacques La Hougue. Le domaine est décrit alors comme comprenant le château couvert en pierres, soit un rez-de-chaussée, deux étages et greniers formant le comble, « composé de 75 appartements, avec ses dépendances, cour, avenues, un très vaste jardin contenant trente ares et deux étangs, une ferme et bâtiment d'exploitation et trois-cent vergées de terre… en bon état… d'un revenu de 6 000 francs »[6],[note 3].

En 1880, Georges Ernest Symon, (1831-1915), officier, comte de Carneville, fils de Georges François Dominique Symon[note 4] de Carneville (1799-1868), gentilhomme ordinaire du roi Charles X et de Marguerite Émilie Montmorin de Saint-Herem (1797-1871), rachète l'ancien domaine familial. Georges Ernest épousa Françoise Marie Étiennette Cozzi avec qui il eut deux filles, Ernestine-Eugénie et Marie Caroline, ainsi qu'un fils, Georges François, licencié en droit, mort en 1922[6].

En 1927, le château est la possession du comte René Clérel de Tocqueville (1899-1989), fils du châtelain de Tocqueville, maire de Tocqueville de 1924 à 1945 puis de Carneville de 1947 à 1977, et de sa femme née Marie de Gargan (1902-1989) épousée en 1926, et sœur de la future maréchale Leclerc de Hauteclocque et apparenté à la famille de Wendel[6]. Lors de la Seconde Guerre mondiale, le château sert de lupanar aux Allemands[réf. nécessaire]. Après le conflit, le comte et la comtesse de Tocqueville le restaurent. Hélène de Tocqueville, leur fille, embellira le jardin avec la création d'une roseraie, avant de vendre le château en 2011 à un antiquaire.

En 2012, le château est acquis par Guillaume Garbe. Son nouveau propriétaire engage alors des aménagements pour ouvrir au public le parc du château. Des manifestations culturelles et des événements festifs pour la commune sont notamment organisées dans ses jardins[8].

L'intérieur du château, très dégradé par la mérule, est actuellement en travaux[5]. En 2015, le prix Hélie de Noailles, doté de 15 000 euros, récompensant un jeune repreneur, est attribué à Guillaume Garbe[9].

En , il est retenu pour bénéficier du loto du patrimoine[10].

Description modifier

Le château de Carneville, avec sa façade longue de 26 mètres, couvre 900 m2, auxquels il faut ajouter 2 000 m2 de dépendances et un parc de 7 hectares[5], et derrière le château un jardin à la française[11], est précédé d'une vaste cour d'honneur à laquelle on accède grâce à une majestueuse allée, bordée de chaque côté de deux rangées d'arbres. La cour d'honneur a été aménagée par René de Tocqueville qui fit creuser sur le côté une pièce d'eau et mis en place un puits du XVIIIe siècle. Dans le parc, on peut admirer un chêne centenaire datant d'au moins 600 ans[8].

Le château se présente sous la forme d'un corps de logis quadrangulaire au plan massé (deux pièces en profondeur) long de 26 mètres, haut d'un étage surmonté de lucarnes aux fenêtres cintrées, sur rez-de-chaussée surélevé. La façade sud-ouest, côté cour d'honneur, arbore un pavillon ou avant-corps central, surmonté d'un fronton triangulaire, avec trois fenêtres, souligné par deux rangées verticales de pierres en bossages est flanqué de deux ailes très courtes qui s'éclairent par deux fenêtres à chaque niveau.

Sa façade côté cour au rythme ternaire, très en vogue au XVIIe siècle, est percée de quatorze baies, alors que sa façade arrière en compte dix-huit. Les diverses formes des linteaux apportent à l'ensemble une certaine harmonie[12]. De par son architecture, il peut être rapproché du château de Tourville à Lestre ou encore de l'hôtel de Folliot de Ferville (ou de la Grimonnière), rue de Wéléat à Valognes.

Les deux manoirs construit en matériaux du pays, dont le granit rose de Fermanville et le schiste des toitures, ont subi peu de transformations, depuis leurs édifications. Le plus ancien, un temps écurie, s'agrémente d'un escalier extérieur protégé par un auvent. Subsiste à proximité de ce bâtiment les vestiges d'un pigeonnier détruit à la Révolution. Le second manoir, d'époque Louis XIV, se présente sous la forme d'un long bâtiment, aux ouvertures allongées, dont le linteau surhaussé s'encastrant dans le toit sert d'appui à des petites lucarnes surmontées d'un épi à feu, et couvert en schistes. Il est agrandi en 1725[2] d'une boulangerie, avec un toit de chaume ondulé, bâtie par Charles François Simon (1697-1736), fils d'Hervé François.

La basse-cour est agrémentée au XIXe siècle de différents bâtiments, notamment avec l'écurie de 1895, aujourd'hui la « salle du canal » et d'une dindonnerie ; une pierre porte toutefois le millésime 1078 mais il s'agit d'une pierre de réemploi, venant certainement de l'église primitive du village du XIe siècle entièrement reconstruite à la fin du XIXe siècle. Est présent également une ancienne glacière, sans doute de la fin du XVIIIe siècle, qui fut modifiée durant la Seconde Guerre mondiale par l'occupant.

Le parc modifier

Il est situé sur d'anciens marais asséchés, entre 1764 et 1770, sur ordre de Louis XV[4]. Le jardin à la française fait suite à un jardin à l'anglaise ravagé par la tempête de 1987[4]. Le parc est ouvert à la visite du printemps jusqu'à la fin septembre. À la périphérie de ce dernier, une petite chapelle a été édifiée par le comte de Tocqueville.

Protection aux monuments historiques modifier

Au titre des monuments historiques[13] :

  • les façades et toitures et les pièces suivantes avec leur décor : salle à manger, le bureau et le petit salon au rez-de-chaussée, la chambre située au-dessus du petit salon à l'entresol, les cheminées des chambres 4, 8, 15 avec leur trumeau sont classés par arrêté du  ;
  • les façades et toitures du bâtiment ancien des communs et de la boulangerie sont inscrits par arrêté du .

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Elle viendra notamment renforcer le Régiment Loyal-Émigrant et participera à la bataille d'Austerlitz.
  2. Il est enterré au cimetière de Montmartre, 32e division.
  3. Paru dans le Journal de Cherbourg, , .
  4. Selon l'orthographe de leur nom sur leur sépulture au cimetière de Montmartre (division 32) en bordure de l'avenue Saint-Charles. Georges François Dominique était le fils du général comte de Carneville et de Louise Gabrielle d'Arjoux de Salancy

Références modifier

  1. « Secrets de châteaux et manoirs - Cotentin - Saint-Lô - Coutances », La Presse de la Manche, no Hors-série,‎ , p. 18 (ISBN 979-1-0937-0115-8).
  2. a b et c Centorame 2013, p. 48.
  3. Centorame 2013, p. 49.
  4. a b et c Secrets de châteaux et manoirs, 2008, p. 19.
  5. a b et c Maryvonne Ollivry de Montalembert, « Guillaume Garbe, 27 ans : "Ma vie pour un château" », Paris Match, semaine du 16 au 22 août 2018, p. 99-102.
  6. a b c et d Centorame 2013, p. 51.
  7. Centorame 2013, p. 50-51.
  8. a et b Centorame 2013, p. 52.
  9. « Le château reconnu au plan national », Ouest-France, 14 février 2015.
  10. « Le Figaro dévoile la liste des monuments retenus pour bénéficier du loto du patrimoine », sur lefigaro.fr, .
  11. Secrets de châteaux et manoirs, 2008, p. 9.
  12. Edmond Thin, « Promenade archéologique », Vikland, la revue du Cotentin, no 5,‎ avril-mai-juin 2013, p. 15-16 (ISSN 0224-7992).
  13. « Chateau », notice no PA00110357, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.

Voir aussi modifier

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Bibliographie modifier

  • Bruno Centorame, « Le domaine de Carneville », Vikland, la revue du Cotentin, no 5,‎ avril-mai-juin 2013, p. 48-53 (ISSN 0224-7992).

Articles connexes modifier

Liens externes modifier