Au nom de tous les miens

livre autobiographique de Martin Gray

Au nom de tous les miens est un livre autobiographique de Martin Gray, rédigé par Max Gallo et paru en 1971. L'action se situe en Pologne et en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale, puis aux États-Unis et en Europe. La véracité de certains épisodes a été mise en doute.

Au nom de tous les miens
Auteur Martin Gray et Max Gallo
Préface Max Gallo
Genre Récit autobiographique
Éditeur Robert Laffont
Date de parution
Collection Vécu

Le livre fut adapté au cinéma en 1983 sous le même titre.

Résumé modifier

En 1939, la Pologne est envahie par les Allemands. À Varsovie, les Juifs sont parqués dans un ghetto. Le livre semble dire que Martin Gray a alors 14 ans[1], ce qui est en contradiction avec le site officiel de Martin Gray, d'après lequel il est né le 27 avril 1922[2]. Alors que les habitants du ghetto meurent de faim, Martin se met à faire du marché noir avec l'extérieur. Ces passages du mur du ghetto sont ses premiers actes de résistance contre les Nazis. Il échappe aux camps de concentration pour un temps, mais finit par se faire arrêter avec sa mère et ses deux frères. Il s'échappe du camp d'extermination de Treblinka pour participer à la Résistance. Il participe ainsi au soulèvement du ghetto de Varsovie.

Après la guerre, il s'installe à New York, où il fait fortune en vendant à des antiquaires américains des porcelaines et des lustres non antiques, qu'il fait fabriquer en Europe[3]. Puis il fonde une famille en France. Mais le malheur continue à s'acharner contre lui puisque sa femme et ses quatre enfants périssent, le dans un feu de forêt, lors de l'incendie du Tanneron.

Les liens de Martin Gray avec les États-Unis se relâchent : sa grand-mère meurt[4], il est de plus en plus suspect au FBI et les contrôles des douanes deviennent systématiques[5]. Sa femme a la nostalgie de l'Europe et trouve que le couple est assez riche pour liquider tout et partir[6].

Attaques contre la véracité du livre modifier

Séjour à Treblinka modifier

Selon Gitta Sereny[7] et Pierre Vidal-Naquet[8], la partie du récit de Max Gallo se déroulant à Treblinka est romancée. Ils ont vérifié des dates, interrogé des témoins et acquis la certitude que Max Gallo avait romancé cet épisode tragique de la vie de Martin Gray et cela sans parvenir à faire la part du vécu et du fictif. Selon Gitta Sereny, ce chapitre aurait été ajouté à la demande de l'éditeur, afin de rendre plus dramatique cette partie de l'ouvrage. Il serait inspiré en particulier du roman de Jean-François Steiner, Treblinka, répétant les erreurs commises par celui-ci[9]. Elle précise qu'interrogé à ce propos, Martin Gray lui avait répondu :

« Mais est-ce important ? La seule chose importante n'est-elle pas que Treblinka ait eu lieu, qu'il fallait écrire là-dessus et que certains juifs devaient être montrés comme des héros[10] ? »

Pierre Vidal-Naquet quant à lui ne met pas en cause Martin Gray mais la transcription de Max Gallo[11]. Les deux historiens condamnent d'une même voix le procédé de Gallo qui, en mélangeant les genres, alimente les polémiques autour de l'holocauste et le discours de négationnistes comme Robert Faurisson.

Participation au raid sur la prison de Pinsk modifier

D'après Au nom de tous les miens[12], Martin Gray aurait participé au raid sur la prison de Pinsk, organisé par Jan Ponury (nom de guerre de Jan Piwnik) pour délivrer, entre autres, le capitaine Wania (Alfred Paczkowski), qui aurait été ami de Gray.

Le quotidien polonais Nowiny Rzeszowskie a publié le 2 août 1990 une interview de Wacław Kopisto, qui prit part à ce raid (18 janvier 1943) comme capitaine dans l'unité d'élite Cichociemni. On montra à Kopisto un photo de Martin Gray datant de la guerre et il déclara n'avoir jamais vu Grajewski/Gray en personne. Interrogé sur la présence éventuelle d'un Juif dans l'unité, Kopisto répondit que parmi les seize soldats polonais de son groupe de résistants, il y avait un Juif polonais de Varsovie, Zygmunt Sulima, ami de longue date et, après la guerre, collègue de Kopisto, mais que personne de ressemblant à la photo de Gray n'appartint jamais à l'unité. « Quand j'ai vu Martin Gray pour la première fois de ma vie, c'était sur une photo de 1945 publiée en mars 1990 dans le magazine Przekrój (en) (...) Nous n'étions que seize à participer au raid de 1943 et il n'était pas parmi nous[13]. »

Livre tenu en défiance par les universitaires modifier

Jean-François Forges estime en 1997 qu'Au nom de tous les miens fait partie des livres qui « mélangent indistinctement histoire avérée et imagination de l'auteur »[14].

En 2010, Alexandre Prstojevic[15], universitaire spécialiste de littérature, mentionne dans une même phrase les livres de Martin Gray, de Jean-François Steiner et de Misha Defonseca comme exemples de récits « qui ont tous en commun de laisser planer un doute sur l'identité de leurs auteurs et la réalité de leur présence durant les événements relatés[16] ».

Notes et références modifier

  1. « C'est septembre 1939 […]. Des quatorze années qui précèdent ces jours je ne sais presque plus rien », Au nom de tous les miens.
  2. Site officiel de Martin Gray.
  3. Martin Gray et Max Gallo, Au nom de tous les miens, Paris, éditions Robert Laffont, (réimpr. 1998 (Pocket)), p. 327-329 et 332.
  4. Martin Gray, Au nom de tous les miens, éd. Livre de poche, 1976, p. 390-391.
  5. Martin Gray, Au nom de tous les miens, éd. Pocket, 1998, p. 332, 336-337.
  6. Martin Gray, Au nom de tous les miens, éd. Pocket, 1998, p. 346.
  7. Sunday Times, 2 mai 1973, et New Statesman, 2 novembre 1979, p. 670-673.
  8. Le Monde, 27-28 novembre 1983, p. 9.
  9. Gitta Sereny, The German Trauma : Experiences and Reflections 1938-1999, Penguin, 2001, 416 p. (ISBN 978-0140292633), p. 145 et 165.
  10. Gitta Sereny, The German Trauma : Experiences and Reflections 1938-1999, Penguin, 2001, 416 p. (ISBN 978-0140292633), p. 145.
  11. Le Monde, 29-30 janvier 1984, p. 11.
  12. Éd. Livre de poche, 1976, p. 238-239; éd. Pocket, 1998, p. 204-205.
  13. Jacek Stachiewicz (2 août 1990), « Kim jest Martin Gray? » (Qui est Martin Gray ?), Nowiny Rzeszowskie, n° 163, 1990. Consultable sur le site Podkarpacka Digital Library.
  14. Jean-François Forges, Éduquer contre Auschwitz, ESF éditions, 1997, p. 35 [lire en ligne sur books.google.com].
  15. « Alexandre Prstojevic », sur franceculture.fr, France Culture, (consulté le ).
  16. Alexandre Prstojevic, « Faux en miroir : fiction du témoignage et sa réception », Témoigner. Entre histoire et mémoire, no 106, dossier « Faux témoins », 2010, p. 23-37, ce passage p. 23.

Article connexe modifier