Anarcha Westcott

esclave
Anarcha Westcott
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Anarcha Westcott (vers 1828 - inconnue) est une esclave noire qui subit une série d'interventions chirurgicales expérimentales douloureuses menées par le médecin J. Marion Sims, sans anesthésie, pour traiter une combinaison de fistule vésico-vaginale et de fistule recto-vaginale[1]. L'expérimentation médicale de Sims avec Westcott et d'autres femmes esclaves, et son rôle dans le développement de la gynécologie moderne, suscitent la controverse parmi les historiens de la médecine.

Au xxie siècle, Anarcha Westcott devient une héroïne pour les femmes noires[2].

Contexte modifier

On sait peu de choses sur Anarcha Westcott, et ce que l'on sait provient des registres tenus par le propriétaire de la plantation, des revues médicales écrites sur le travail de Sims et des documents écrits par Sims lui-même[3]. Au moment de sa grossesse, Anarcha Westcott est une esclave de dix-sept ans vivant en Alabama. Elle souffre d'une forme sévère de rachitisme due à un manque de vitamine D et à une malnutrition, déformant son bassin, l'empêchant d'accoucher. Elle entre en travail en juin 1845 et après avoir tenté d'accoucher pendant trois jours, Sims, un «médecin de la plantation», fut convoqué pour l'aider dans son travail[4].

Aucune source ne commente l'enfant mort-né d'Anarcha Westcott. Le père, non identifié, est soit son propriétaire blanc ou son délégué ou un esclave noir.

Chirurgie expérimentale modifier

Après la mort de l'enfant, Anarcha Westcott est ramenée à Sims parce qu'elle a plusieurs déchirures non cicatrisées dans son vagin et son rectum - une fistule vésico-vaginale et une fistule recto- vaginale. Ces déchirures ont pour conséquence une incontinence urinaire et fécale, avec des écoulements à travers ses plaies ouvertes, qui lui causent une douleur atroce. Cette incontinence entraîne des infections, des tissus enflammés et des odeurs[4].

Sims effectue 30 opérations expérimentales, non consensuelles et sans anesthésie sur Anarcha Westcott avant de réussir à refermer la fistule et les déchirures[5]. Pendant les opérations, Westcott ne reçoit aucune anesthésie alors que celle-ci est une technique récemment devenue disponible[5]. Après les opérations, Sims lui administre de l'opium, qui est alors une méthode acceptée pour traiter la douleur[6]. Les opérations expérimentales que Sims effectue sur Anarcha Westcott et d'autres esclaves révolutionnent la chirurgie gynécologique ; la technique développée par Sims est le tout premier traitement des fistules vésico-vaginales[5].

Le Anacha [sic] , âgée de 32 ans, est admise au Woman's Hospital géré par Sims à New York. Selon les registres, elle y reste environ un mois et peut sortir en janvier 1857, considérée comme guérie. Son propriétaire William Lewis Maury (en), appartient à la US Navy, comté de Caroline, Virginie. Les circonstances de son voyage à New York sont inconnues[7],[8].

Une pierre tombale pour une personne dénommée «Annacay» [sic], épouse de Lorenzo Jackson, est retrouvée par hasard dans le comté de King George, en Virginie (adjacent au comté de Caroline). Dans le recensement de 1870, son nom est orthographié Anaky Jackson, et sur son acte de décès, Ankey. La date de décès sur les statistiques de l'état civil ne correspond pas à celle de sa pierre tombale (1869/70). Le cinéaste Josh Carples conclut qu'il s'agit de la même Anarcha que Sims a traitée en Alabama. Si elle a eu 32 ans en 1856, elle est née en 1824 et elle est enceinte à 13 ans lorsqu'elle est soignée pour la première fois par Sims.

Héritage modifier

En 2015, l'auteur J.C. Hallman (en) s'intéresse à l'histoire d'Anarcha Westcott, et souhaite absolument retrouver et raconter son histoire. Il publie des articles « Sims et Anarcha » dans le Harper's Magazine, le Montgomery Advertiser[9] et The Baffler[10] et son travail pour découvrir la dernière demeure d'Anarcha Westcott est présenté dans le film documentaire de Josh Carples, Remembering Anarcha. Hallman travaille sur un livre intitulé The Anarcha Quest, basé sur les premières preuves d'archives de la vie d'Anarcha Westcott qui ne proviennent pas des propres récits de Sims[11].

Sims pratique de manière controversée une chirurgie expérimentale sur des femmes noires sans anesthésie[5].

Une petite statue d'Anarcha Westcott est érigée par des manifestants près de la statue de Sims sur le terrain du Capitole de l'État de l'Alabama. Elle est très rapidement volée[9].

En 2021, l'artiste Michelle Browder (en) parcourt le pays pour collecter des fonds et demander des dons d'objets métalliques au rebut, qu'elle soude pour construire un mémorial de 15 pieds en hommage à Anarcha Westcott et à deux autres femmes opérées par Sims. Les travaux sont achevés à San Francisco et la sculpture est érigée à Montgomery, en Alabama, dans le cadre d'un projet de campus plus large visant à sensibiliser, Mothers of Gynecology Movement (en)[12].

Poésie modifier

Bibliographie modifier

Références modifier

  1. (en) « Remembering Anarcha, Lucy, and Betsey: The Mothers of Modern Gynecology », NPR.org,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. (en) John Gillespie, Jr., « Anarcha's Science of the Flesh: Towards an Afropessimist Theory of Science. », Catalyst: Feminism, Theory, Technoscience, vol. 8, no 1,‎ (lire en ligne)
  3. (en) Rachel Dudley, « Toward an Understanding of the 'Medical Plantation' as a Cultural Location of Disability », Disability Studies Quarterly, vol. 32, no 4,‎ (ISSN 2159-8371, DOI 10.18061/dsq.v32i4.3248, lire en ligne)
  4. a et b (en) Harriet A. Washington, Medical Apartheid The Dark History of Medical Experimentation on Black Americans from Colonial Times to the Present, New York, Doubleday,
  5. a b c et d (en) L. Lewis Wall, « The medical ethics of Dr J Marion Sims: a fresh look at the historical record », Journal of Medical Ethics, vol. 32, no 6,‎ , p. 346–350 (ISSN 0306-6800, PMID 16731734, PMCID 2563360, DOI 10.1136/jme.2005.012559)
  6. (en) L. Lewis Wall, « Did J. Marion Sims deliberately addict his first fistula patients to opium? », Journal of the History of Medicine and Allied Sciences, vol. 62, no 3,‎ , p. 336–356 (ISSN 0022-5045, PMID 17082217, DOI 10.1093/jhmas/jrl045)
  7. Rosalind Bentley, « 'The Mothers of Gynecology’ remembered in Montgomery monument », The Atlanta Journal-Constitution,‎ (lire en ligne)
  8. Josh Carples (Kirby I. Bland, Michelle Browder, LaToya Clark, Harriet E. Amos Doss), « Remembering Anarcha » (Documentaire), 803 Films, Carolyn Jean's Son Visions, Terrible Master Films,
  9. a et b (en) J. C. Hallman, « J. Marion Sims and the Civil War — a rollicking tale of deceit and spycraft », Montgomery Advertiser,‎
  10. (en-US) J. C. Hallman, « The Cry of Alice. One of the best stories in Africa today is linked to one of the worst stories in America’s past », The Baffler,‎ (lire en ligne, consulté le )
  11. (en-GB) Nadja Sayej, « J Marion Sims: controversial statue taken down but debate still rages », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  12. (en-US) « Enslaved women suffered in gynecology experiments. A monument project for them visits L.A. », Los Angeles Times, (consulté le )
  13. Safiya Charles, « Artist to unveil 'Mothers of Gynecology' tribute to enslaved Black women operated on without consent », Montgomery Advertiser,‎ (lire en ligne)

Articles connexes modifier

Lectures complémentaires modifier