Crash du Tupolev Tu-144 à Goussainville

accident aérien impliquant un Tupolev Tu-144

Accident du Tu-144 au Salon du Bourget
Le Tu-144 impliqué dans l'accident, vu en vol de démonstration la veille de l'accident.
Le Tu-144 impliqué dans l'accident, vu en vol de démonstration la veille de l'accident.
Caractéristiques de l'accident
Date
TypeDésintégration en vol
CausesErreur de pilotage
SiteGoussainville, Val-d'Oise
Coordonnées 49° 01′ 31,05″ nord, 2° 28′ 25,67″ est
Caractéristiques de l'appareil
Type d'appareilTupolev Tu-144S
No  d'identificationCCCP-77102
PhaseVol de démonstration
Passagers0
Équipage6
Morts14 (dont 8 au sol)
Blessés20 (tous au sol)
Survivants0

Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Accident du Tu-144 au Salon du Bourget

Le dimanche , à 15 h 29, un Tupolev Tu-144 effectuant une démonstration en vol lors du 30e Salon du Bourget[1] s'écrase à Goussainville, dans le nord de la région parisienne.

Peu après son décollage, le supersonique soviétique, concurrent du Concorde, part subitement en piqué, son aile se rompt à quelques dizaines de mètres du sol, l'avion prend feu, explose et s'écrase en flammes, détruisant une quinzaine de maisons et une école — fermée ce jour-là.

L'accident, peut-être dû à une modification visant à étendre le domaine de vol pour sa seconde démonstration, a fait 14 morts (les six membres d'équipage et huit personnes au sol).

L'accident modifier

 
Le Concorde décollant devant le Tupolev Tu-144.

Le dernier jour du salon, le Concorde et le premier appareil de production de l'avion de ligne supersonique Tupolev Tu-144 (no 77102)[1] sont présentés devant un public de 350 000 personnes[2]. Concorde fait une première démonstration, suivi par le Tupolev[2].

À la fin de son ascension verticale à pleine puissance[2], aux environs de 1 200 m[2], au moment où les plans canards à l'avant du fuselage sont rétractés[1], le Tupolev bascule en piqué et lorsque le pilote tente de le redresser[2], tout en redéployant les plans canards[1], l'important facteur de charge entraîne la rupture de l'aile gauche[1],[2].

Les débris de l'avion en flammes s'abattent sur les cités Mozart et Bel-Air de Goussainville et atteignent une centaine de pavillons, dont une vingtaine seront complètement détruits[3], ainsi que l'école Louis Pasteur[4],[5],[6],[7],[8] — heureusement fermée ce jour-là[9]. Les six membres d'équipage périssent dans l'écrasement. Au sol, il y a huit personnes tuées[1],[10] et une vingtaine de blessés[3]. De plus, 173 personnes se retrouvent sans toit et doivent être relogées[3].

Les secours, vite arrivés sur place, sont rejoints par Alexeï Tupolev et par de nombreux gardes soviétiques qui s'assurent, en cette période de guerre froide, que les pompiers ne prélèvent aucune pièce de l'avion[3].

Les causes modifier

Selon des témoins au sol, l'incendie aurait résulté de la rupture d'un plan canard avant gauche qui aurait perforé un réservoir ou se serait introduit dans un moteur et aurait provoqué l'explosion, détruisant l'aile[1],[2].

Des informations d'archives, maintenant ouvertes au public, indiquent que la boîte noire fut rapportée en URSS et analysée. Les causes de l'accident demeurent floues[3]. On pense que la cause de l'accident pourrait être une modification réalisée au sol, par l'équipe d'ingénieurs, sur les capteurs du système de stabilisation automatique, la veille du second jour de démonstration en vol[1]. Ces changements auraient eu pour but d'étendre le domaine de vol Tu-144 en démonstration, afin de réaliser une meilleure prestation que le Concorde[1]. À l'origine, pour des raisons de sécurité, le braquage des commandes de vol est limité à 5° avec les plans canards sortis[1]. La modification effectuée consiste à désactiver cette limitation, ce qui, après rétractation des plans canards, aurait entraîné une erreur du circuit électronique d'autostabilisation se traduisant par une commande de déflexion des élevons de 10° vers le bas et aurait provoqué la mise en piqué brutale du Tupolev[1]. Pendant la tentative de l'équipage pour redresser l'avion, la caméra de la Première chaîne de télévision française, maniée par un participant russe, l'ingénieur V.N. Benderov, pour filmer le vol, tombe sur le sol de la cabine de pilotage et fait perdre un temps précieux aux pilotes[2] (le journaliste Michel Tauriac devait initialement monter à bord pendant la démonstration mais les Soviétiques avaient refusé au dernier moment, n'acceptant que d'embarquer sa caméra[11],[Note 1]).

Selon une autre explication avancée à l'époque, le pilote aurait voulu éviter un Mirage III en vol au-dessus de lui et dont il ignorait la présence[2].

In memoriam modifier

En 1999, la municipalité de Goussainville a édifié une stèle à la mémoire des victimes à l'angle du boulevard du Général-de-Gaulle et de la rue de la Vallée[12]. Le , pour le cinquantième anniversaire de l'écrasement, elle y organise une cérémonie au nom du devoir de mémoire[3].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Michel Tauriac faisait le forcing depuis trois ans pour pouvoir embarquer dans le nouveau Tupolev, écrivant même au maréchal Gretchko, alors ministre de la Défense de l'Union soviétique. Le 16 mai 1973, l'ambassade soviétique à Paris l'informe qu'il pourra faire le voyage entre Moscou et Le Bourget à bord du supersonique. Mais à ce moment, il couvre l'opération spectaculaire « Mazamet, ville morte » co-organisée par la Sécurité routière et sa chaine de télévision. Il demande alors aux Soviétiques de monter à bord de l'avion lorsqu'il sera au salon du Bourget qui s'ouvre le 24 mai. Il a alors une réponse positive de l'ambassade. Le 1er juin, il visite l'avion au sol avec André Turcat. Il constate que l'avion n'est pas achevé, sièges passagers en fer, tuyaux courant dans l'allée centrale. Turcat lui fait remarquer que l'avion ne dispose que d'un moteur pour les dérives contre trois pour le Concorde et juge l'avion peu sûr. Le , jour du vol de démonstration, il doit embarquer à bord mais les Soviétiques refusent au dernier moment à la suite d'un incident diplomatique qui s'est produit la veille : un des attachés militaires soviétiques, le colonel Mirikof, a été surpris par la DST en train de voler un appareil électronique sur un stand français du salon et a été renvoyé immédiatement en URSS. Le chef des essais en vol du Tupolev, Vladimir Benderov, n'accepte d'embarquer qu'une petite caméra de la chaine dont Tauriac lui montre rapidement le fonctionnement. La caméra sera détruite dans le crash et seul un petit bout de bande sera retrouvé.

Références modifier

  1. a b c d e f g h i j et k (en) « ASN Aircraft accident Tupolev Tu-144S CCCP-77102 Goussainville », sur aviation-safety.net, (consulté le ).
  2. a b c d e f g h et i (en) « Tu-144 SST Accidents : Accident Cause », sur tu144sst.com (consulté le ).
  3. a b c d e et f Par Anne Collin Le 3 juin 2023 à 06h02, « Crash du Tupolev il y a 50 ans : quand le « Concorde soviétique » endeuillait Goussainville », sur leparisien.fr, (consulté le )
  4. « crash Tu144 », sur crashdehabsheim.net (consulté le ).
  5. « VIDEO. Les victimes du crash du Tupolev se souviennent - Le Parisien », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  6. « Le jour où le ciel est tombé. - Libération », sur liberation.fr, (consulté le ).
  7. « G_Vié - 1973 : le crash du Tupolev », sur ec-vie-goussainville.ac-versailles.fr, (consulté le ).
  8. « Témoignage d'un officier sapeur pompier anonyme et non daté mais présent et intervenant sur les lieux », sur ocdpc.com (consulté le ).
  9. L'accident a lieu un dimanche.
  10. « Crash de l'avion Tupolev 144 au salon du Bourget » [vidéo], sur ina.fr, journal télévisé de 20 heures, ORTF, (consulté le ).
  11. Michel Tauriac, « ... une bouteille de vodka m’a sauvé la vie », Paris Match,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. « Tupolev Tu-144 salon du Bourget - Goussainville », sur aerosteles.net (consulté le ).

Voir aussi modifier

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Articles connexes modifier

Liens externes modifier