Élections fédérales canadiennes de 1988

élection des députés siégeant à la Chambre des communes du Canada de 1988 à 1993

Élection fédérale
canadienne de 1988
295 sièges de la Chambre des communes
(Majorité absolue : 148 sièges)
Type d’élection Élection législative fédérale
Parti progressiste-conservateur – Brian Mulroney
Voix 5 667 543
43,02 %
en diminution 7
Sièges obtenus 169 en diminution 34
Parti libéral – John Turner
Voix 4 205 072
31,92 %
en augmentation 3,9
Sièges obtenus 83 en augmentation 45
NPD – Ed Broadbent
Voix 2 685 263
20,38 %
en augmentation 1,6
Sièges obtenus 43 en augmentation 11
Résultats par province
Carte
Sièges à la Chambre des communes
Diagramme
Premier ministre
Sortant Élu
Brian Mulroney
Progressiste-conservateur
Brian Mulroney
Progressiste-conservateur

L'élection fédérale canadienne de 1988 se déroule le afin d'élire les députés de la trente-quatrième législature à la Chambre des communes du Canada. Il s'agit de la trente-quatrième élection générale depuis la confédération canadienne en 1867. Le Parti progressiste-conservateur de Brian Mulroney remporte l'élection avec un gouvernement majoritaire.

Déroulement de la campagne modifier

La campagne électorale porte essentiellement sur un seul enjeu : la signature d'un accord de libre-échange avec les États-Unis. Le premier ministre sortant, Brian Mulroney, avait signé l'accord. Ses adversaires, le Parti libéral du Canada mené par John Turner et le Nouveau Parti démocratique mené par Ed Broadbent, s'y opposent fermement. Parmi les partis mineurs participant également à l'élection, le Parti de l'héritage chrétien, qui présente pour la première fois des candidats lors d'une élection générale, appuie le principe du libre-échange mais exprime de sérieuses réserves sur l'accord tel que négocié.

Les conservateurs entrent dans l'élection souffrant de plusieurs scandales. Malgré leur énorme majorité remportée quatre ans auparavant, ils paraissent vulnérables dès le départ.

La campagne libérale connaît quelques ratés au départ, notamment lors d'une journée à Montréal, où trois coûts différents sont donnés pour le programme proposé de services de garde. La campagne est freinée également par un reportage de la Société Radio-Canada affirmant qu'un mouvement visant à remplacer Turner par Jean Chrétien se dessinait dans les coulisses bien que Turner avait gagné un vote de confiance en 1986.

Les intentions de vote voyagent entre les conservateurs et les libéraux sur la question du libre-échange. Avec les sondages de mi-campagne qui prédisent une victoire des libéraux, les conservateurs abandonnent la stratégie de campagne relativement calme qu'ils ont menée jusque-là et suivent la suggestion d'Allan Gregg de « bombarder le pont » qui relie les électeurs opposés au libre-échange aux libéraux : la crédibilité de Turner. Ils lancent une série de publicités mettant en relief les difficultés de leadership de Turner. Combinés à des publicités au coût de 6 millions de dollars vantant les mérites du libre-échange, ces incidents parviennent à freiner le momentum des libéraux. Des guerres intestines au Parti libéral et le partage des votes entre le NPD et les libéraux contribuent à reconduire le Parti progressiste-conservateur au pouvoir avec un second gouvernement majoritaire.

Le Parti libéral est le plus grand parti opposé au libre-échange et double sa représentation aux communes en obtenant 83 sièges sur 295 (contre 40 lors de l'élection précédente) et 32 % des voix et est reconduit dans son rôle d'opposition officielle. Le Parti progressiste-conservateur remporte une confortable majorité, quoique réduite, avec 43 % des voix et 169 des 295 sièges. Malgré la position sensiblement améliorée des libéraux, les résultats sont considérés comme un échec pour Turner après les sondages de mi-campagne, qui prédisaient un gouvernement libéral. La défaite électorale scelle le sort de Turner, qui démissionne en 1990 pour être remplacé par Jean Chrétien.

Le Nouveau Parti démocratique obtient 43 sièges et un peu plus de 20 % des voix, un record historique pour ce parti social-démocrate. Il domine en Colombie-Britannique et en Saskatchewan et reçoit également des appuis importants en Ontario.

Cette élection est la dernière pour le Parti du Crédit social du Canada, qui ne remporte aucun siège et récolte une part insignifiante des suffrages. Le parti ne réussit pas à présenter le nombre de candidats requis pour être officiellement reconnu, mais Élections Canada accepte de faire apparaître le nom du parti sur les bulletins de vote par respect pour sa longue histoire en tant que parti reconnu.

Le tout nouveau Parti réformiste du Canada, qui prendra du gallon au cours de l'élection générale suivante, participe également à l'élection ; toutefois, il est considéré comme un parti purement marginal. Il obtient un peu plus de 2 % des voix tout en ne présentant que 72 candidats. Le Parti Rhinocéros, qui se moque ouvertement du processus, obtient 1 % des voix avec 74 candidats.

Des douze partis qui se font la lutte, seuls les trois premiers (Progressiste-conservateur, Libéral et NPD) présentent des candidats dans chacune des 295 circonscription. Outre le Parti réformiste et le Parti Rhinocéros, aucun tiers parti n'obtient plus de 1 % des voix. Au total, 1575 personnes ont posé leur candidature dont 156 n'appartenaient à aucun parti reconnu.

Toutefois, un certain nombre de partis non enregistrés auprès d'Élections Canada conteste également l'élection en présentant des candidats indépendants, dont deux partis indépendantistes de l'Ouest canadien : le Western Canada Concept, mené par Douglas Christie, présente trois candidats en Colombie-Britannique ; le Western Independance Party en présente un en Colombie-Britannique, sept en Alberta, et trois au Manitoba[note 1]. Le Parti marxiste-léniniste présente également des candidats dans plusieurs circonscriptions.

Des 17 639 001 personnes inscrites sur les listes électorales, 13 281 191 électeurs, soit environ 75 % des personnes inscrites, se sont prévalus de leur droit de vote ; 13 175 599 votes sont reconnus valides (99,20 %) contre 105 592 bulletins (0,80 %) qui sont rejetés.

Soutiens de la presse modifier

Soutiens accordés
En 1984 En 1988
Le Devoir PC PC
Le Soleil PC PC
La Presse Aucun PC
The Gazette Aucun[note 2] PC
The Globe and Mail PC PC
Le Droit PC[1]

Le , Benoît Lauzière, directeur du journal Le Devoir, accorde son soutien au Parti progressiste-conservateur. L'éditorial pointe la performance satisfaisante du gouvernement conservateur et surtout un soutien fort au projet de libre-échange rejeté par les autres partis. Malgré son soutien au Parti progressiste-conservateur, Benoît Lauzière souligne la qualité de certains candidats du NPD au Québec et semble soutenir leur élection pour que ce parti ait quelques députés du Québec en son sein[2]. Le même jour Le Soleil publie un éditorial de son éditeur Robert Normand appuyant également la reconduction du gouvernement progressiste-conservateur[3].

Le , le journal The Gazette publie son soutien au Parti progressiste-conservateur par la voix de son éditeur Clark W. Davey. Celui-ci pointe le choix historique à faire à propos du libre-échange et enjoint aux électeurs de l'appuyer en reconduisant le gouvernement majoritaire de Brian Mulroney pour un nouveau mandat. Davey pointe cependant que le libre-échange n'est pas la seule raison justifiant l'appui au Parti progressiste-conservateur, pointant notamment l'avancée selon lui que représente l'Accord du lac Meech. L'éditeur critique également la campagne du Parti libéral et du NPD, jugée comme une « campagne de peur » faite auprès des aînés et chômeurs[4].

Le même jour Roger D. Landry, président et éditeur de La Presse publie également un soutien à la réélection du gouvernement de Brian Mulroney, avec un argumentaire similaire à celui publié dans The Gazette, soit l'appui au libre-échange et une appréciation positive du bilan du premier mandat du gouvernement conservateur, notamment au plan constitutionnel (avec l'Accord du lac Meech) et économique[5].

Sondages modifier

Des élections de 1984 à celles de 1988
Pendant la campagne électorale ( au )
Intentions de votes
  • Parti progressiste-conservateur
  • Parti libéral du Canada
  • NPD

Résultats modifier

Pays modifier

 
Parti Chef Nombre de
candidats
Sièges Voix
1984 Dissolution Élus % Diff. Nombre absolu % Diff.
     Progressiste-conservateur Brian Mulroney 295 211 203 169 -19.9% 5 667 543 43,02 % -7,02 %
     Libéral John Turner 294 40 38 83 +107,5 % 4 205 072 31,92 % +3,89 %
     NPD Ed Broadbent 295 30 32 43 +34,4 % 2 685 263 20,38 % +1,57 %
     Réformiste Preston Manning 72 * * - * 275 767 2,09 % *
     Héritage chrétien Ed Vanwoudenberg 63 * * - * 102 533 0,78 % *
     Rhinoceros Charles McKenzie 74 - - - - 52 173 0,40 % -0,39 %
     Vert Seymour Trieger 68 - - - - 47 228 0,36 % +0,14 %
     Confederation of Regions Elmer Knutson 51 - - - - 41 342 0,31 % -0,68 %
     Libertarien Dennis Corrigan 88 - - - - 33 135 0,25 % +0,06 %
     Commonwealth Gilles Gervais 58 - - - - 7 467 0,06 % -0,21 %
     Communiste George Hewison 51 - - - - 7 066 0,05 % -0,01 %
     Crédit social Harvey Lainson 9 - - - - 3 407 0,03 % -0,10 %
     Indépendant 55 1 4 - - 22 982 0,17 % -0,01 %
     Aucune appartenance 100 - - - 24 516 0,19 % -0,12 %
Vacant 5
Total 1 573 282 282 295 +4,61 % 13 175 494 100 %

Notes :

« % Diff. » réfère au changement depuis l'élection précédente

Par province modifier

Parti[note 3] C-B AB SK MB ON QC N-B N-É ÎPE TNL TNO YK Total
     Progressiste-conservateur Sièges : 12 25 4 7 46 63 5 5 - 2 - - 169
     Voix (%) : 35,3 51,8 36,4 36,9 38,2 52,7 40,4 40,9 41,5 42,2 26,4 35,3 43,0
     Libéral Sièges : 1 - - 5 43 12 5 6 4 5 2 - 83
     Voix : 20,4 13,7 18,2 36,5 38,9 30,3 45,4 46,5 49,9 45,0 41,4 11,3 31,9
     NPD Sièges : 19 1 10 2 10 - - - - - - 1 43
     Voix : 37,0 17,4 44,2 21,3 20,1 14,4 9,3 11,4 7,5 12,4 28,3 51,4 20,38
Total sièges 32 26 14 14 99 75 10 11 4 7 2 1 295
Partis n'ayant remporté aucun siège :
     Réformiste Voix : 4,8 15,4 3,3 2,1
     Héritage chrétien Voix : 1,1 1,4 2,0 0,8
     Rhinocéros Voix : 1,2 0,4
     Vert Voix : 0,4
     Confederation of Regions Voix : 4,3 0,3
     Libertarien Voix : 0,3
     Commonwealth Voix : 0,2 0,1
     Communiste Voix : 0,1
     Crédit social Voix : xx
     Autre Voix : 0,4
xx - moins de 0,05 % des voix.

10 circonscriptions les plus serrées modifier

  1. London-Middlesex, ON : Terry Clifford (PC) défait Garnet Bloomfield (lib.) par 8 voix
  2. Northumberland, ON : Christine Stewart (lib.) défait Reg Jewell (PC) par 28 voix
  3. Hamilton Mountain, ON : Beth Phinney (lib.) défait Marion Dewar (NPD) par 73 voix
  4. York-Nord, ON : Maurizio Bevilacqua (lib.) défait Michael O'Brien (PC) par 77 voix
  5. Rosedale, ON : David MacDonald (PC) défait Bill Graham (lib.) par 80 voix
  6. London-Est, ON : Joe Fontana (lib.) défait Jim Jepson (PC) by 102 votes
  7. Haldimand—Norfolk, ON : Bob Speller (lib.) défait Bud Bradley (PC) par 209 voix
  8. Hillsborough, ÎPE : George Proud (lib.) défait Tom McMillan (PC) par 259 voix
  9. Cariboo—Chilcotin, C-B : Dave Worthy (PC) défait Jack Langford (NPD) par 269 voix
  10. Vancouver-Centre, C-B : Kim Campbell (PC) défait Johanna Den Hertog (NPD) par 269 voix

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Un des candidats manitobains s'est désisté avant la date du scrutin.
  2. Le journal The Gazette est en grève à la fin août 1984 et sa parution ne reprend que le 4 septembre 1984, trop tard pour un éditorial de soutien.
  3. Les partis ayant remporté moins de 1 % des voix dans une même province ne figurent pas dans ce tableau.

Références modifier

  1. André Préfontaine, « Les conservateurs méritent un deuxième mandat », Le Droit,‎ , p. 14 (lire en ligne)
  2. Benoît Lauzière, « Le choix du Devoir : un gouvernement conservateur », Le Devoir, Montréal,‎ , p. 10 (lire en ligne)
  3. Robert Normand, « L'élection : le choix du Soleil », Le Soleil, Québec,‎ , B14 (lire en ligne)
  4. (en) Clark W. Davey, « A historic choice », The Gazette, Montréal,‎ , A1
  5. Roger D. Landry, « Entre la peur et la raison », La Presse, Montréal,‎ , B2

Lien externe modifier